« Les Patient reported outcomes ou PROs sont un terme générique désignant toute mesure de l’état de santé du patient qui est rapportée directement par le patient, sans interprétation par un soignant ou toute tierce personne », explique Patricia Marino, économiste de la santé à l’institut Paoli Calmette à Marseille. Il s’agit ainsi d’interroger les patients sur la manière dont ils vivent la maladie, l’impact de celle-ci sur leur vie quotidienne, sociale, professionnelle, leur entourage, leur vécu du parcours de soins, leur perception des effets secondaires des traitements, etc.
« On en parle énormément depuis deux ans, depuis que l’oncologue américain Ethan Basch a présenté au congrès de cancérologie de l’ASCO les résultats d’un essai clinique mené de septembre 2007 à janvier 2011 », souligne Patricia Marino. Cette étude, portant sur 766 patients traités par chimiothérapie pour un cancer métastatique, visait à évaluer l’intérêt d’une application web appelée STAR (Symptom tracking and Reporting). Cette application permettait aux malades de signaler leurs symptômes en temps réel, parmi 12 symptômes différents. En cas de symptômes importants ou s’aggravant, l’application déclenchait une alerte pour les infirmières. Les résultats de cette étude ont montré que la survie des patients ayant bénéficié de cette application était significativement supérieure de 5 mois par rapport à celle des patients suivis de manière classiques (31,2 mois contre 26 mois). Par ailleurs, la durée de la chimiothérapie était supérieure de deux mois chez les patients avec l’application, du fait d’une nette amélioration de leur qualité de vie. « Le gain de survie peut paraître très modeste mais il est supérieur à ce qui est obtenu avec de nombreux médicaments très coûteux qui ciblent les cancers avancés », a précisé Ethan Basch lors de la plénière de l’ASCO.
Mesurer la qualité de vie
« La question des PROs se pose car le cancer est une maladie qui a beaucoup évolué. La guérison est possible, ou la chronicisation, avec des traitements administrés sur des durées prolongées. L’efficacité des traitements ne peut donc plus se mesurer qu’en termes de paramètres cliniques comme l’activité anti-tumorale, la survie sans rechute ou encore la survie globale, déclare Patricia Marino. Désormais, l’objectif thérapeutique principal est la qualité de vie ».
« Depuis maintenant une dizaine d’années, plusieurs chercheurs se sont interrogés sur l’utilisation des PROs comme source d’information pour évaluer les toxicités des traitements dans le cadre des essais cliniques », poursuit-elle. Dans ce cadre, quelle est l’utilité des PROs ? « C’est un outil remarquable de surveillance des événements secondaires des traitements, d’amélioration de la qualité des soins et de l’adhésion au traitement et d’amélioration de la relation médecin-malade », énumère Patricia Marino.
En effet, les chercheurs se sont notamment aperçus qu’il existait une sous-estimation systématique des événements secondaires par les médecins par rapport aux patients, d’autant plus sur les symptômes subjectifs. « L’analyse de ces études portant sur la discordance médecins/patients montre que le médecin a tendance à déclarer davantage (voire uniquement) les effets secondaires qui engagent le pronostic vital des patients, comme l’anémie ou la fièvre, mais à négliger d’autres effets indésirables qui peuvent être source d’un inconfort et de souffrance pour les malades », explique Patricia Marino. Les PROs peuvent ainsi être un bon outil pour mieux évaluer la balance bénéfice/risque des nouveaux médicaments. « Ils sont également un outil facilitateur de la communication médecin/patient, car ils permettent de fournir une information fiable et complète et de baser les choix sur cette information. Ils permettent ainsi une décision partagée plutôt que paternaliste », estime Patricia Marino.
Pour mesurer les PROs, il existe de nombreux questionnaires. Un consortium international, l’ICHOM (International consortium for health outcomes measurement) est actuellement en train de définir les standards internationaux pour la mesure des résultats en santé rapportés par les patients, ce qui permettra une standardisation des outils de mesure pour 24 pathologies.
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