Le sommeil est crucial pour notre survie et notre santé. En moyenne, nous avons besoin de 8 heures à 8 heures et demie de sommeil pour un fonctionnement normal physique et mental. Toutefois, il existe quelques rares familles de « petits dormeurs » chez lesquels un sommeil naturellement court, allant de 4 à 6 heures par nuit (voire 3 heures et demie), est suffisant, tout en restant en pleine forme. Ces personnes considérées à sommeil court sont en bonne santé, dynamiques et optimistes.
« Il y a dix ans, lorsque nous avons identifié le premier gène du sommeil court, le domaine de la génétique en était à ses balbutiements. Il n’était pas encore pleinement connu ni admis que la génétique influençait de manière significative les comportements du sommeil. Aujourd’hui, nous commençons à mieux comprendre le rôle des gènes dans sa construction », déclare dans un communiqué le Pr Ying-Hui Fu, une neurologue à l’université californienne de San Francisco (UCSF) qui a dirigé la recherche et a identifié les trois gènes du sommeil court connus à ce jour.
Une nouvelle mutation rare
La découverte du second gène ADRB1 a été rapportée en août dernier dans la revue Neuron. L’étude actuelle publiée dans la revue Science Translational Medicine (1) décrit l’identification d’un gène muté chez deux membres d’une famille de « petits dormeurs » – le père dormant seulement 5 heures et demie chaque nuit et son fils dormant à peine plus de 4 heures. Tous deux étaient néanmoins en pleine santé physique et mentale. La mutation ponctuelle réside dans le gène NPSR1 (neuropeptide S receptor 1), un gène codant pour le récepteur du neuropeptide S (NPS) exprimé à la surface des neurones. La voie NPS/NPSR1 a déjà été identifiée chez la souris pour avoir des effets favorisant l’éveil. Cette mutation est extrêmement rare : une personne sur 4 millions.
Pour mieux comprendre la fonction du gène, l’équipe a étudié des souris modifiées porteuses de cette mutation (NPSR1-Y206H). « Ces souris dorment environ 70 minutes de moins chaque jour en comparaison aux souris normales, précise au « Quotidien » le Pr Fu. Nous avons constaté que le récepteur mutant est plus sensible à son ligand “NPS” et par conséquent plus actif que le récepteur normal (mutation avec gain de fonction). Alors que les souris normales sont incapables de mémoriser ce qu’elles apprennent si nous les privons de sommeil juste après l’apprentissage, nos souris mutantes sont aussi performantes que les souris témoins ; ceci suggère que leur processus de mémorisation est résistant à la perte de sommeil », ajoute-t-elle.
Un gène protecteur
« C’est le premier gène découvert qui exerce un effet protecteur contre l’un des nombreux effets néfastes de la privation de sommeil », souligne le Pr Fu. La chercheuse pense que ce gène protège probablement aussi contre d’autres effets néfastes. Les petits dormeurs sont différents des dormeurs normaux en termes de mécanisme régulateur du sommeil et des effets du sommeil sur leur physiologie corporelle. « Je pense que ces individus peuvent nous apprendre comment augmenter l’efficacité du sommeil », explique au « Quotidien » le Pr Fu.
« Augmenter l’efficacité du sommeil serait certainement bénéfique pour la population générale et notamment les patients avec des troubles du sommeil comme l’insomnie (mais pas pour les patients avec une narcolepsie ou un syndrome d’apnées du sommeil) », estime la neurologue.
Puisque la protéine NPSR1 est un récepteur de surface cellulaire, il pourrait être un jour possible de développer des médicaments qui activent ou interfèrent avec NPSR1. Non seulement cette découverte permet de mieux comprendre comment les gènes contribuent à un phénotype de sommeil inhabituel mais elle offre également une cible intéressante pour de futurs traitements pouvant aider à traiter les troubles du sommeil ou prévenir certains déficits cognitifs associés au manque de sommeil.
(1) L. Xing et al., "Science Transnational Medicine", 10.1126/scitranslmed.aax2014, 2019.
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