Quelques définitions
- Les hémorroïdes correspondent à une dilatation à type de varices du plexus hémorroïdal (veines de l’anus et du rectum). L’hémorroïde interne est prolabée et comprimée par le sphincter anal, et l’hémorroïde externe est située en dehors du sphincter. Il n’existe aucun lien entre les varices des membres inférieurs et les hémorroïdes.
- La thrombose hémorroïdaire aiguë est la principale complication de la pathologie. Le plus souvent externe, elle s’accompagne de douleurs violentes provoquées par un effort physique, une contrainte mécanique ou un traumatisme (grossesse, accouchement), et de la formation de caillots sanguins. On constate l’apparition d’une boule dure de taille variable. La thrombose peut être unique ou multiple. Sa régression dure une ou plusieurs semaines, elle peut laisser une séquelle cutanée inesthétique à la périphérie de l’anus (marisque) qui nécessite un geste chirurgical.
- La rectorragie est un autre signe de la maladie et correspond à l’évacuation par l’anus de sang rouge. Ce saignement provient des capillaires de la muqueuse anale, il se manifeste en jet ou en goutte à goutte et survient à la fin des selles, non mélangé aux matières fécales ou sous forme de simple trace à l’essuyage. Le saignement s’arrête toujours spontanément. Ce symptôme n’est pas spécifique de la maladie hémorroïdaire et peut révéler d’autres pathologies tumorales ou inflammatoires. C’est un signe d’alarme et un examen proctologique complet s’impose en cas de récidives fréquentes.
- Le prolapsus ou procidence (descente et protrusion de la muqueuse rectale à travers l’anus) se produit lors de la défécation. Il est la conséquence d’une élongation des tissus de soutien des hémorroïdes internes, et il se traduit par leur extériorisation hors du canal anal. Il peut persister et entraîner une gêne mécanique avec suintement, prurit et brûlures anales. L’examen montre une tuméfaction anale avec une zone interne rouge.
- La fistule anale est une lésion longitudinale de la muqueuse mettant le sphincter à nu, et elle ne constitue pas une complication des hémorroïdes.
Un peu de physiopathologie
La ligne pectinée sépare les hémorroïdes internes situées dans l’espace sous-muqueux, des hémorroïdes externes situées dans l’espace sous-cutané en grande partie en dehors du canal anal. Cette position entre la muqueuse anale et le muscle sphincter fait de cet endroit une région très exposée aux inflammations. Il peut se produire des perturbations d’origine vasculaire et/ou un relâchement du tissu de soutien.
Deux théories complémentaires prévalent pour expliquer l’origine des manifestations fonctionnelles des hémorroïdes :
La théorie circulatoire fait intervenir des perturbations d’origine vasculaire qui submergent les capacités d’adaptation du tissu hémorroïdaire. Il se produit une augmentation du débit de l’artère hémorroïdaire supérieure suite à une poussée congestive, et une thrombose ou un prolapsus peut apparaître.
La théorie mécanique met en jeu le relâchement puis la rupture du tissu de soutien qui provoque un glissement progressif du revêtement du canal anal. Lors d’efforts prolongés ou excessifs pendant la défécation, des forces de cisaillement étirent et fragmentent le tissu de soutien. Il se produit alors une strangulation des vaisseaux à l’origine de manifestations œdémateuses hémorragiques ou thrombotiques.
Les mots du conseil
La pathologie est le plus souvent bénigne mais elle suscite beaucoup d’inconfort et de l’inquiétude. Après avoir écarté un risque de complications et évaluer le caractère passager des symptômes, le pharmacien doit rassurer le patient en lui expliquant les causes et les symptômes de la maladie. Les trois principaux troubles observés sont des douleurs, des rectorragies et un prolapsus. Des picotements peuvent précéder la survenue des hémorroïdes. En revanche, il est rare qu’un prurit anal soit avant-coureur de la pathologie. Celle-ci se manifeste par la formation d’un ou plusieurs caillots sanguins, s’y associe un œdème inflammatoire plus ou moins important.
J’ai très mal et pourtant mes hémorroïdes sont peu visibles.
La symptomatologie hémorroïdaire n’est pas nécessairement corrélée à l’importance anatomique de la manifestation : des hémorroïdes volumineuses peuvent rester latentes et indolores, alors que de petites dilatations locales peuvent entraîner des douleurs insupportables. Les crises sont en général liées à un épisode diarrhéique ou un excès alimentaire (alcool, épices) et elles sont de courte durée (deux à quatre jours).
Je ne connais pas bien les circonstances qui provoquent ces symptômes.
Les facteurs déclenchants sont les troubles du transit (en particulier la constipation), la sédentarité, la grossesse, l’accouchement, l’alimentation, la pratique de certains sports (cyclisme, équitation) et certaines professions (conducteurs).
Mes hémorroïdes disparaissent toujours spontanément.
Le prolapsus est quantifié en quatre stades : des hémorroïdes congestives non prolabées aux hémorroïdes prolabées lors de la défécation et se réintégrant spontanément en fin de selle, ou celles nécessitant une réintégration manuelle. Le quatrième stade étant celui des hémorroïdes prolabées en permanence.
Je redoute des complications.
Pour éviter certaines confusions, le pharmacien peut apporter quelques précisions :
- Une irritation, voire une surinfection, peuvent se retrouver au niveau de la marge anale mais le risque mycosique n’est pas plus élevé chez les patients atteints d’hémorroïdes.
- Les hémorroïdes n’entraînent que très peu de complications et il n’y a aucun risque d’évolution maligne d’une pathologie hémorroïdaire.
Je voudrais savoir s’il existe des mesures diététiques préventives.
Aucun traitement préventif n’est efficace en dehors de la lutte contre les troubles du transit. Toutefois, en poussées, il est recommandé de s’abstenir de consommer certains aliments irritants pour la muqueuse digestive : épices, agrumes, boissons gazeuses, alcoolisées ou excitantes (café, thé).
Je ne sais pas comment soulager mon inconfort au quotidien.
Le pharmacien conseillera quelques mesures simples :
- Faire une toilette anale après chaque selle avec un savon acide ou neutre, ou une lotion sans parfum. En cas de démangeaisons, utiliser à la place du papier hygiénique, des lingettes type lingettes pour nourrisson ou imprégnées d’une lotion à base d’allantoïne, d’extraits de ruscus et d’aloès.
- Bannir les soins agressifs (savonnages excessifs) et les médicaments à usage local irritants sous forme de lavement ou de suppositoire. Empêcher les récidives en limitant les stations debout ou assise prolongées, et pratiquer une activité physique pour lutter contre la sédentarité.
Les produits conseils
Le diagnostic est purement clinique, il est basé sur un interrogatoire et un examen minutieux afin d’écarter d’autres affections plus graves (affections malignes de l’intestin, de l’anus…). La confirmation du diagnostic nécessite un bilan proctologique, voire colique, et génito-urinaire avec toucher rectal et si besoin, anuscopie et sigmoïdoscopie.
Un traitement court.
Quel que soit le stade anatomique de la maladie et quels que soient les symptômes, le traitement médicamenteux comporte la régulation du transit et, selon les cas, des formes locales éventuellement associées entre elles et/ou des formes orales. La durée du traitement doit être courte mais suffisante pour assurer la régression des symptômes et éviter les complications.
Les laxatifs mais pas n’importe lesquels.
Il s’agit d’éviter les efforts d’exonération et de permettre ainsi aux hémorroïdes de cicatriser en réduisant la sensation douloureuse. Les lubrifiants (huile de paraffine seule ou associée), les laxatifs de lest et osmotiques sont fréquemment utilisés. Sont à proscrire les laxatifs irritants (bourrache, séné, aloès, cascara). Un apport en fibres alimentaires douces (céréales, légumes verts, fruits frais ou secs…) et une bonne hydratation sont également recommandés.
Les veinotoniques à la bonne posologie.
Le traitement oral de la crise hémorroïdaire fait appel à des veinotoniques vasculoprotecteurs de synthèse type diosmine, heptaminol, troxérutine ou acide ascorbique. Ils doivent être administrés à très fortes doses (2 à 3 grammes par jour pour la diosmine) et en courte durée (quelques jours) pendant la crise. Leur emploi au long cours n’est pas justifié.
La place de la phytothérapie.
Les plantes apportent un soulagement appréciable et efficace. Il existe plusieurs spécialités formulées à partir d’extraits végétaux (marron d’Inde, fragon, vigne rouge, petit houx, cyprès, hamamélis), et de principes actifs d’origine végétale (esculoside, rutosides, flavones, hespéridines). Ces médicaments augmentent la vasoconstriction, la résistance des vaisseaux et diminuent leur perméabilité.
Pommades et/ou suppositoires.
Les traitements locaux se présentent sous deux formes : les crèmes ou pommades sont préférées pour les lésions externes (l’adaptation d’une canule anale permettant toutefois un traitement interne), alors que les suppositoires sont plus appropriés en cas de lésions internes. Il est toujours préférable d’associer les deux. Leur utilisation est en général biquotidienne et après chaque selle. (Crèmes rectales Phlébocrème, Rectoquotane, Sédorrhoïde, Titanoréine à la lidocaïne, crème dermique Hirucrème, pommade Avenoc…).
Les méthodes réfrigérantes.
Il est conseillé de faire des bains de siège très froids ou d’appliquer des glaçons sur l’anus au travers d’un linge. La vasoconstriction et l’anesthésie provoquées par le froid apportent un soulagement rapide. Le dispositif médical Cryochrono Coldstick Hemo est un bâtonnet anal, de forme anatomique destiné à être appliqué au niveau du rectum. Il suffit d’appliquer le coldstick refroidi au freezer ou au congélateur pendant quinze minutes. Il produit un froid sec et continu capable d’apporter une antalgie et un soulagement en moins de cinq minutes. Il est utilisable chez la femme enceinte.
Des effets spécifiques et complémentaires.
Les topiques ont tous un effet décongestionnant et mécanique en facilitant le passage des selles. Certaines spécialités ont une action plutôt astringente et décongestionnante (sels de bismuth et oxyde de zinc, vitamine A), d’autres sont cicatrisantes et protectrices, et d’autres sont hémostatiques. Certains topiques contiennent un anesthésique local (lidocaïne), pour une action plus antalgique. Attention aux allergies !
Les solutions intermédiaires.
Les traitements instrumentaux réservés aux stades avancés interviennent après échec du traitement médical et/ou en cas de récidives avec complications. Ils permettent de différer le traitement chirurgical : injections sclérosantes, ligature, coagulation, cryothérapie, incision ou excision de thrombose hémorroïdaire externe.
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