Nous possédons du tissu adipeux blanc (graisse blanche) pour stocker l’énergie, caractérisé par des adipocytes renfermant une vacuole lipidique. Nous hébergeons aussi de la graisse brune (en petite quantité chez l’adulte), constituée d’adipocytes contenant de nombreuses gouttelettes lipidiques et mitochondries, qui peut brûler le glucose et la graisse pour générer de la chaleur (thermogenèse) afin de maintenir la température corporelle.
De plus, en réponse à des stimuli comme l’exposition chronique au froid et l’activation du récepteur bêta3-adrénergique (système nerveux sympathique), la graisse blanche peut se transformer en graisse beige, constituée d’adipocytes beiges riches en gouttelettes lipidiques et en mitochondries et capables de produire de la chaleur. À l’arrêt de ces stimuli toutefois, les adipocytes beiges perdent leurs mitochondries par dégradation autophagique (« mitophagie ») et redeviennent des adipocytes blancs.
La voie de la parkine
Dans une étude publiée dans « Science Signaling », Lu et coll. expliquent comment la parkine, responsable de la mitophagie dans les adipocytes beiges, déclenche leur reconversion en adipocytes blancs. Cette enzyme de type ubiquitine ligase était déjà connue pour favoriser l’autophagie des mitochondries endommagées. Les chercheurs montrent qu’en l’absence de parkine chez des souris KO, les mitochondries dans les adipocytes beiges sont préservées, même après l’élimination du stimulus qui représente le froid. Dans des adipocytes beiges en culture, le recrutement de la parkine dans les mitochondries est inhibé par la noradrénaline qui active les récepteurs bêta3-adrénergiques. « Nous avons découvert un nouveau mécanisme pour maintenir l’homéostasie mitochondriale dans les adipocytes thermogéniques de la graisse beige », précise au « Quotidien » le Pr Shingo Kajimura, biologiste à l’Université de Californie à San Francisco, qui a dirigé l’étude. « Nous avions déjà montré en 2016 (« Cell Metabolism ») que la graisse beige était régulée dynamiquement par des signaux environnementaux comme l’exposition au froid. Nous avons maintenant identifié comment ces cellules thermogéniques maintiennent leur activité. Une perte des cellules graisseuses beiges est constatée avec le vieillissement et l’obésité. Notre étude suggère une nouvelle approche pour prévenir ce déclin. Nous espérons ainsi développer une nouvelle intervention thérapeutique pour maintenir les cellules graisseuses beiges même dans le vieillissement ou l’obésité », poursuit-il.
Inflammation transitoire
Les adipocytes beiges peuvent aussi se former « de novo » dans le tissu adipeux, à partir de la différenciation de progéniteurs semblables à des cellules souches, en réponse à la noradrénaline stimulant les récepteurs bêta3-adrénergiques.Dans une deuxième étude dans « Science Signaling », Babei et coll. montrent que la famille Jak des kinases (Jak1/2-Stat 3) favorise la différenciation des progéniteurs vers les adipocytes beiges. La lipolyse induite par le signal bêta3-adrénergique déclenche une inflammation transitoire qui dirige les cellules progénitrices vers la formation des adipocytes beiges. « Nous avons découvert qu’une inflammation transitoire dans le tissu adipeux induit une cascade de signaux moléculaires qui favorisent la transformation de la graisse blanche en graisse beige. Cette cascade est déclenchée par un stress métabolique associé à une dégradation des lipides (lipolyse). Le résultat est l’activation de cellules progénitrices du tissu adipeux qui sont libérées pour former des adipocytes beiges », explique au « Quotidien » le Dr Alexandros Vegiopoulos, chercheur au Centre Allemand de Recherche sur le Cancer à Heidelberg.
« La découverte d’approches pouvant contrôler pharmacologiquement ces cellules souches pourrait permettre d’améliorer les propriétés métaboliques du tissu adipeux dans le cadre du traitement des troubles associés à l’obésité, en particulier le diabète de type 2. L’inflammation du tissu adipeux se révèle étroitement liée à la santé métabolique de l’organisme, et représente donc une cible intéressante pour traiter les maladies métaboliques. Comprendre les conséquences complexes des voies de signalisation est essentiel pour assurer le succès des approches thérapeutiques actuelles et futures qui ciblent l’inflammation dans les maladies métaboliques », conclut le Dr Vegiopoulos.
Science Signaling, 24 avril 2018, Lu et coll., Babei et coll., Sarraf et Youle, Sun et coll.
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