DEPUIS longtemps, la France est réputée être championne du monde de la consommation de médicaments. En matière de produits illicites, notre pays est aussi, malheureusement parmi les plus gros utilisateurs européens, selon une récente enquête menée auprès de 100 000 élèves de 36 États. En effet, qu’il s’agisse de tabac, d’alcool, de cannabis ou d’autres substances interdites, l’enquête paneuropéenne ESPAD*, place systématiquement la France dans le groupe de tête.
Ainsi, si l’on se penche sur l’utilisation de cannabis au cours des 30 derniers jours précédents l’enquête, l’Hexagone arrive sur la plus haute marche du podium avec 24 % des 15-16 ans, devant Monaco (21 %), la République thèque, l’Espagne (15 %) et le Royaume-Uni. En moyenne, 13 % des adolescents européens déclarent avoir consommé ce produit au cours des 30 derniers jours, 7 % au cours du mois écoulé et 17 % durant leur vie.
En ce qui concerne les autres drogues illicites (ecstasy, amphétamines, cocaïne, crack, LSD, héroïne), la France se trouve également dans le peloton de tête en compagnie de la Belgique (Flandres), la Bulgarie, le Lettonie, Monaco et le Royaume-Uni, avec un taux de prévalence au cours de la vie de l’ordre de 10 % chez les 15-16 ans. Tout comme pour la consommation de tranquillisants hors prescriptions, même si la tendance est à la baisse entre 2007 et 2011 (de 15 % à 11 %). Le recours aux produits à inhaler (comme la colle) est aussi au-dessus de la moyenne européenne.
Excès d’alcool et de tabac.
Pour le tabac, les jeunes Français ne montrent pas non plus l’exemple. En 2007 et 2011, la proportion d’élèves déclarant avoir consommé des cigarettes au cours des 30 derniers jours est passée de 30 à 38 %. Tandis que la tendance globale en Europe est à la stabilité, six autres pays sont dans le même cas que la France : Monaco (de 25 à 38 %), la Hongrie (de 33 à 37 %), la Finlande (de 30 à 34 %), le Portugal (de 19 à 29 %), la Roumanie (de 25 à 29 %) et la Norvège (de 21 à 28 %).
Enfin, l’enquête montre que la consommation d’alcool est monnaie courante chez les jeunes européens : 57 % d’entre eux déclarent en avoir bu au cours des 30 derniers jours. La proportion est encore plus importante dans l’Hexagone (67 %), mais ne fait pas figure de record. Nous sommes dépassés par les Maltais (68 %), les Monégasques (69 %), les Chypriotes (70 %), les Grecs (72 %), les Allemands (73 %), les Danois (76 %) et les Tchèques (79 %). Quant à la consommation excessive d’alcool (5 verres et plus lors d’une même occasion) au cours des 30 derniers jours, la France se situe dans la moyenne haute, derrière des pays comme le Danemark, Malte (56 %), l’Estonie (53 %), la Croatie (54 %), la Slovénie (53 %) ou le Royaume-Uni (52 %).
Quel que soit le critère observé, l’étude de l’ESPAD n’est pas très flatteuse pour notre pays. Elle laisse même apparaître une situation assez préoccupante. « La France est le cancre de l’Union européenne », lâche, dans un communiqué, le réseau français de réduction des risques, selon lequel cette enquête discrédite les cinq ans de politique ultra-répressive vis-à-vis des drogues illicites. Avis partagé par les pharmaciens impliqués dans la prévention des toxicomanies (voir ci-dessous). La Fédération addiction considère elle aussi que « ces chiffres signent les limites de la politique mise en œuvre avec obstination et méthode depuis cinq ans ». Dans le viseur, la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) - et plus précisément son président jusqu’à mai dernier, Étienne Apaire - qui s’était justement fixé pour objectif de faire reculer les consommations de drogues illicites et celles excessives d’alcool. Autant dire que le successeur de M. Apaire sera scruté de près par les spécialistes du secteur, dont de nombreuses personnalités appellent à une nouvelle politique en matière de lutte contre les drogues et les toxicomanies.
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