LE 18 OCTOBRE DERNIER, Francine (le nom a été changé) atterrit à l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle en état de fébrile. A priori rien de dramatique, sauf que Francine revient de Guinée où elle a travaillé dans le centre de Conakry de prise en charge des malades Ebola.
L’alerte est donc donnée, et la patiente transférée et isolée dans le service des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital Bichat avec une tension artérielle normale, une température de 38,4°, une rhinorrhée, une toux sèche et une céphalée. Le test diagnostic du paludisme est négatif, de même que les deux PCR réalisées dans les heures qui ont suivi l’admission pour exclure un diagnostic Ebola. Les mesures de protections sont allégées, et un prélèvement rhinopharyngé mettent en évidence un virus influenza du groupe B vraisemblablement contracté dans l’appartement de la capitale guinéenne qu’elle partageait avec sept autres volontaires internationaux.
Des symptômes aspécifiques
Pour le Pr Yazdan Yazdanpanah, chef du service des Maladies Infectieuses et Tropicales de l’hôpital Bichat, ce cas décrit dans une correspondance publiée dans « The Lancet » est représentatif des fausses alertes qui pourraient se multiplier, alors que la saison de la grippe commence tout juste. « La symptomatologie d’une infection par le virus Ebola est complètement aspécifique. Dans les trois premiers jours de la maladie, le syndrome pseudo-grippal peut aussi bien évoquer une grippe qu’un paludisme », explique-t-il. L’article cosigné par Sophie Matheron, Isabelle Lerat, Nadira Hourou et Yazdan Yazdanpanah de l’hôpital Bichat et Sylvain Baize, responsable du centre national de référence (CNR) fièvres hémorragiques virales de Lyon, attire l’attention sur la nécessité d’une bonne couverture vaccinale des personnels de santé en partance pour l’Afrique de l’Ouest.
En Guinée aussi, la saison grippale arrive.
« Nous nous sommes rapprochés de l’institut Pasteur de Dakar qui nous a confirmé qu’il y avait bien une saison de la grippe analogue à la nôtre en Afrique de l’Ouest, explique le Pr Yazdanpanah, et même s’il n’est pas certain qu’on y trouve les mêmes souches qu’en Europe, le vaccin contre la grippe saisonnière a une action protectrice. Malheureusement, les ONG n’obligent pas leurs personnels à se vacciner. Même dans les établissements de santé de référence, la couverture vaccinale contre la grippe est médiocre. » Interrogé par le « Quotidien du Médecin », le directeur général de l’Eprus qui fournit les volontaires du centre de tratiement de Macenta, Marc Meunier, a confirmé qu’il n’existait « pas de consigne concernant la vaccination antigrippale des volontaires ».
Les médecins de Bichat évoquent également la nécessité de mesures contre les autres maladies pouvant évoquer une infection par Ebola : « il faut proposer une prophylaxie pour le paludisme dans les zones épidémiques et s’assurer que la vaccination contre la fièvre typhoïde est bien réalisée. »
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