« LES DONNÉES scientifiques étaient sans appel et la conclusion du groupe de travail, unanime : les gaz d’échappement des moteurs Diesel provoquent le cancer du poumon chez l’homme », a déclaré le Dr Christopher Portier, président du groupe d’experts qui s’est réuni la semaine dernière au siège du CIRC à Lyon. L’impact négatif de ces gaz est dû aux particules elles-mêmes et à l’exposition au mélange chimique. De surcroît, les experts ont noté une « association positive » avec un risque accru de cancers de la vessie. Le CIRC qui, en 1988, avait classé les émissions de moteurs Diesel parmi les cancérogènes probables pour l’homme (groupe 2A) souligne que, dès 1998, un groupe consultatif préconisait parmi les priorités de travail du centre que les gaz d’échappement des moteurs Diesel soient réévalués. De nouvelles données ont été examinées par les experts, en particulier une étude américaine réalisée chez des mineurs américains exposés professionnellement dont les résultats publiés en mars 2012 concluaient à un risque accru de la mortalité par cancer du poumon. Le Dr Kurt Straif, responsable du CIRC souligne, lui, que les principales études qui ont conduit à classer les gaz de moteurs Diesel comme des cancérogènes certains pour l’homme concernaient les expositions professionnelles. « Toutefois, nous avons appris par d’autres cancérogènes comme le radon, a-t-il précisé, que les premières études démontrant un risque chez des groupes professionnels fortement exposés étaient suivies de résultats comparables dans la population générale. Par conséquent, les actions entreprises pour réduire les expositions devraient concerner les travailleurs et la population générale. »
D’importantes populations sont exposées quotidiennement soit par leur travail, soit dans l’air ambiant non seulement par le biais des véhicules routiers, mais aussi par d’autres modes de transport (trains comme les TER en France, bateaux...) et par des générateurs d’électricité équipés de moteurs Diesel, rappelle le CIRC.
Le CIRC invite les gouvernements et autres décideurs à envisager des normes environnementales relatives aux émissions des gaz d’échappement Diesel et « de continuer à travailler avec les fabricants de moteurs et de carburants pour réaliser ces objectifs ».
Le CIRC reconnaît que, au cours de ces vingt dernières années, de nouvelles règlementations avec des normes d’émission de plus en plus strictes ont été adoptées à la fois pour les moteurs Diesel et les moteurs à essence – les experts ont maintenu les gaz d’échappement de moteurs à essence dans la catégorie des substances « peut-être cancérogène pour les humains (groupe 2B) ». Pour les moteurs Diesel, la composition des carburants a été changée avec, notamment une nette réduction de leur teneur en souffre. « Toutefois, bien que l’émission de particules et de produits chimiques soit réduite grâce à ces changements, on ne sait pas encore clairement si ces modifications qualitatives et quantitatives peuvent se traduire par un effet différent sur la santé », notent les experts qui suggèrent que des recherches soient menées en ce sens. Quant à remplacer les carburants et les véhicules actuels dépourvus de ces modifications, notamment dans les pays les moins développés, « il faudra des années », précisent-ils.
Enfin !
L’association Santé environnement France qui regroupe 2 500 médecins a accueilli favorablement cette dernière expertise. « Ma réaction, c’est : “enfin”, a réagi le Dr Patrice Halimi, secrétaire général et porte-parole. On sait depuis très longtemps que le Diesel est un mauvais choix sanitaire, et que cette politique publique (visant à promouvoir un parc Diesel en France) est une erreur. » À la suite de cette reconnaissance par l’OMS, « j’appelle à ce que nous mettions en place une politique publique qui soit réellement tournée vers la santé », a-t-il conclu. Favorisé par une politique fiscale avantageuse, le Diesel s’est fortement développé en France : il équipe près de 60 % du parc automobile aujourd’hui, contre à peine plus du quart en 1995. Réputé meilleur pour le climat que le moteur à essence en générant moins de CO2 au kilomètre, le diesel émet en revanche des particules fines. Ces particules, émises aussi par le chauffage au bois et l’industrie, seraient en France à l’origine de quelque 42 000 morts prématurées chaque année. Le Diesel émet par ailleurs un gaz, le dioxyde d’azote (NO2), responsable de maladies respiratoires et cardio-vasculaires. Un rapport récent du Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique remis au ministère de l’Écologie montre que le transport routier était responsable, en 2010, de 55 % des émissions d’oxyde d’azote, essentiellement du fait des moteurs Diesel. Le rapport note cependant un recul de 48 % des émissions d’oxyde d’azote entre 1990 et 2010 malgré une augmentation importante du trafic sur la même période (31 %), du fait de l’équipement des véhicules en pots catalytiques et du durcissement des normes européennes en la matière.
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