La sécheresse oculaire regroupe un ensemble d’affections allant de formes banales jusqu’aux atteintes sévères de la surface oculaire. Rappelons à ce sujet que le film lacrymal (constitué de 3 couches principales : muqueuse, aqueuse – formant un gel aqueux -, et lipidique) représente, après l’appareil palpébral, le premier système de défense de l’œil (défense mécanique, chimique et immunologique) et que seulement 10 % du volume normal des larmes seraient nécessaires au maintien de l’intégrité de la surface oculaire.
La prévalence de la sécheresse oculaire est élevée, atteignant 20 à 30 % des plus de 50 ans ; avec une forte proportion féminine (9 femmes pour 1 homme). En effet, la glande lacrymale est soumise à une régulation hormonale sous la dépendance principale des androgènes.
Lors de la ménopause, la production lacrymale diminue, voire disparaît chez la femme entraînant des modifications trophiques de la glande, ainsi que de l’épithélium conjonctival ; cette régulation androgénique explique l’absence d’amélioration sous traitement hormonal substitutif. La fréquence du syndrome de Gougerot-Sjögren, beaucoup plus rare, est estimée entre 0,1 et 0,5 % de la population.
Les deux principales causes de la sécheresse oculaire sont représentées par le déficit aqueux (notamment par atteinte des glandes lacrymales ; ce qui est observé, notamment, dans le syndrome de Gougerot-Sjögren) et l’hyper-évaporation. Les deux causes majeures étant représentées par l’hyperosmolarité du film lacrymal (majorée par le port de lentilles) et la dysrégulation nerveuse de la production lacrymale. Il faut savoir qu’une autre composante fondamentale de cette pathologie est son caractère inflammatoire, qui accroît le désordre local par destruction des cellules à mucus, ajoutant une instabilité au déficit aqueux initial.
La symptomatologie exprimée par le patient est non spécifique : brûlures oculaires, sensation de grains de sable, picotements, larmoiement. Le tableau peut prendre la forme d’une banale conjonctivite persistante, mais sans hyperhémie conjonctivale marquée.
La sécheresse oculaire est objectivée par le test de Schirmer (mise en place dans le sac conjonctival inférieur d’une languette de papier de 5 mm de large graduée de 5 en 5 : une valeur inférieure à 10 mm caractérise une hypo-sécrétion) ainsi que par les tests aux colorants vitaux (rose Bengale ou vert de lissamine), ces derniers se fixant sur les zones dévitalisées de l’épithélium cornéen et conjonctival. L’examen à la lampe à fente à l’aide de fluorescéine permet d’évaluer le temps de rupture du film lacrymal pathologique (break-up time test) ; un temps inférieur à 10 secondes est témoin d’une instabilité lacrymale.
Il faut savoir qu’il n’existe pas de corrélation entre les symptômes ressentis et l’importance des signes identifiés.
Une enquête allergologique peut être utile ; surtout chez le sujet jeune.
Un syndrome sec de Gougerot-Sjögren, primitif ou secondaire (associé à une maladie auto-immune), doit être évoqué quand à une sécheresse oculaire s’associent d’autres symptômes, comme une augmentation de volume des glandes parotides, une fatigue, des polyalgies centrées sur les articulations et/ou des manifestations extraglandulaires (toux, sécheresse cutanée, phénomène de Reynaud, pancréatite, cytopénie, adénopathies…). L’atteinte salivaire est objectivée par une biopsie de glande salivaire.
La prise en charge peut être complexe dans les cas modérés à sévères. Le traitement de base repose sur l’administration de substituts lacrymaux, en évitant ceux qui renferment des conservateurs : on conseille généralement d’associer un gel utilisé 3 à 5 fois par jour à une formulation plus « liquide », type larmes artificielles ou sérum physiologique, en cas de gêne ressentie.
Les sécheresses sévères peuvent bénéficier d’un traitement complémentaire par un anti-inflammatoire local (dexaméthasone) ou un collyre renfermant de la ciclosporine (dans le syndrome de Gougerot-Sjögren).
Des acides gras essentiels per os, de type oméga 3 peuvent être utiles en complément pour freiner la cascade inflammatoire.
Enfin, le pharmacien pourra rassurer le patient sur l’absence (dans l’immense majorité des cas) de risque de diminution de la vision, et devra insister sur l’importance clé d’une utilisation pluriquotidienne des collyres (dont la posologie devra être modulée en fonction de l’intensité de la symptomatologie), sans oublier de rappeler l’influence de l’environnement (pollution, agents extérieurs, écrans d’ordinateurs, de télévision…) sur les symptômes ressentis.
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Françoise Amouroux
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