Dans quel cadre le pharmacien peut-il intervenir ?
La compétence reconnue du pharmacien en toxicologie, qui fait qu’il est souvent sollicité pour des questions sur les champignons par exemple, peut amener des propriétaires de carnivores domestiques à l’interroger en cas de suspicion d’intoxication de leur animal, en particulier s’ils l’ont vu consommer des végétaux au cours de leur promenade ou des plantes de leur maison. D’ailleurs il existe des listes regroupant les plantes potentiellement toxiques pour les chiens et les chats qu’il peut être intéressant d’avoir sous la main (même s’il est impossible qu’elles soient exhaustives) (https://www.aspca.org/pet-care/animal-poison-control/cats-plant-list ; https://www.aspca.org/pet-care/animal-poison-control/dogs-plant-list) Lors de la délivrance de certains médicaments pour l’homme, comme le paracétamol, des somnifères, des traitements hormonaux, de l’insuline… ou de certains édulcorants (à base de xylitol), le pharmacien doit insister sur les mesures de conservation de ces produits à l’abri des animaux domestiques (et des enfants) en raison des risques encourus. En effet ce sont souvent des médicaments qui restent sur une table de nuit, ou une table de la cuisine (pour les édulcorants). Les risques sont toujours plus importants en présence d’un chiot ou d’un chaton dont le comportement exploratoire est souvent développé.
Primun non nocere (avant tout, ne pas nuire !) : les gestes à éviter
Il convient en premier lieu d’éviter tout risque d’aggravation de l’intoxication en déconseillant l’automédication et l’usage du lait. Ce remède de grand-mère a la vie dure mais il est particulièrement nocif : par les graisses et l’eau qu’il contient, le lait peut faciliter l’absorption des toxiques lipophiles aussi bien qu’hydrophiles !
De manière générale, tant que le toxique en cause n’a pas été identifié et que l’éventualité d’un agent irritant ou corrosif n'a pas été exclue, il faut éviter les vomitifs. En outre l’utilisation d’un vomitif n’a véritablement d’intérêt que si la substance a été ingérée moins de 2 heures avant son administration (et dans ce cas les symptômes de l’intoxication sont rarement apparus). Il ne faut pas non plus conseiller de faire vomir « manuellement » l’animal en introduisant les doigts dans la gueule (risque de morsure !) ni en lui faisant avaler de l’eau mélangée avec du sel (risque d’intoxication au sel !). En fait les vomissements ne sont indiqués que lorsqu’ils sont expressément demandés (ou réalisés) par le vétérinaire ou le centre antipoison.
Le recours à un antidote éventuel nécessite l’identification préalable du toxique ainsi que l’évaluation clinique de l’animal, et par conséquent de se rendre chez son vétérinaire. De toute façon, il faut garder à l’esprit qu’il y a malheureusement peu d’antidotes aux principaux toxiques rencontrés. On citera pour mémoire : la vitamine K1 qui antagonise les effets des anticoagulants (toxiques utilisés comme raticides) ou l’atropine utilisée comme antidote partiel aux intoxications par les organophosphorés et carbamates insecticides. En pratique, la prise en charge d’une intoxication nécessite le plus souvent un traitement éliminatoire associé à un traitement symptomatique, sous contrôle vétérinaire.
Orienter immédiatement vers un centre antipoison vétérinaire et/ou un vétérinaire
Il peut être opportun d’avoir sous la main l’adresse des deux principaux centres anti-poisons vétérinaires :
Le Centre Anti Poison Animal et Environnemental de l'Ouest (CAPAE-Ouest/Tél. : 02 40 68 77 40). Il est animé par des enseignants-chercheurs, des vétérinaires et des étudiants vétérinaires de l'école vétérinaire de Nantes (Oniris). Le Centre National d'Informations Toxicologiques Vétérinaires (CNITV/Tél. : 04 78 87 10 40). Situé sur le campus vétérinaire de l'école vétérinaire de Lyon (VetAgroSup), le CNITV est animé par des vétérinaires toxicologues spécialisés permanents.
Sur la base des appels reçus par ces centres, les toxiques les plus fréquemment rencontrés ont été les suivants :
Aliments : le chocolat ; produits industriels : rodenticides anticoagulants, glyphosate, métaldéhyde, engrais et chloralose ; médicaments : paracétamol, perméthrine, ibuprofène, fipronil et bromazépam ; produits domestiques : eau de Javel végétaux : cannabis ; animaux : crapauds.
Lorsque le propriétaire décrit des signes graves (convulsions, détresse respiratoire, hyperthermie élevée, troubles digestifs sévères, diminution de la conscience etc…), il convient de l’orienter en urgence vers son vétérinaire praticien ou la clinique vétérinaire d’urgence (il peut être également opportun d’avoir la liste des cliniques ouvertes 24h/24 à proximité). Tout report des soins peut, dans ce cas, entraîner le décès de l’animal.
Quels autres conseils donner en pratique aux propriétaires ?
S’il est disponible, apporter un échantillon du toxique supposé (en vue de faciliter l’identification). En particulier s’il s’agit d’un médicament, ramener la boîte et la notice d’emploi. L’administration de charbon actif permet de réduire les effets de substances ingérées toxiques (ex. Carbomino® Biocanina, Carbodote/TVM). Il est généralement conseillé de l’administrer pendant 24 heures toutes les 4-6 heures. Ce sont des compléments alimentaires sans restriction de délivrance. Toutefois son administration ne doit en aucun cas retarder l’appel au vétérinaire. L’inspection régulière du jardin ou abords de la maison peut être utile en cas de suspicion d’intoxication par malveillance. Conserver systématiquement à l’abri des animaux tout produit d’entretien, de jardinage et tout médicament pour réduire au maximum les risques.
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