LA RÉTROCESSION de produits entre pharmaciens est dans le collimateur de la Direction générale de la santé (DGS). Il faut dire que, bien que largement répandue, cette pratique n’a jamais été considérée comme licite au regard du code de la santé publique (CSP). Les textes sont clairs. D’une part, l’officine est l’établissement affecté à la dispensation au détail des médicaments ou des produits autorisés à la vente en officine ; d’autre part, le pharmacien ne peut légalement exercer une activité de grossiste-répartiteur. Tout cela n’est pas nouveau en réalité. Mais, sous l’effet de la crise, de plus en plus de confrères optent pour ce mode d’achat susceptible de faire gagner des points de marge. Ainsi, face à l’explosion de cette pratique, la DGS a décidé de rappeler à l’ordre les intéressés. À la fin de l’année dernière, elle a écrit aux représentants de la profession pour leur remémorer les risques de sanction pénale encourus (jusqu’à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amendes). Cet avertissement ne signifie pas pour autant la fin des achats groupés. En effet, il existe des solutions pour continuer de commander à plusieurs tout en restant dans les clous du CSP, telle la création d’une structure de regroupement à l’achat (SRA).
SRA ou GIE.
C’est l’option choisie par le groupement local Pharmatomic. Ses membres (vingt pharmacies aujourd’hui) envisagent en effet de créer une SRA, qui serait une filiale de la société mère. Le transporteur serait le grossiste-répartiteur commun à toutes les officines du groupement (le service est toutefois payant). Compte tenu des niveaux de commandes demandés par certains laboratoires pour bénéficier de bonnes remises, il apparaît nécessaire de mutualiser ses achats. Pour les marchés importants, Pharmatomic mène ainsi des négociations avec les fabricants afin d’obtenir des conditions commerciales s’appliquant à tous ses membres. En pratique, chacun d’entre eux passe sa commande directement auprès du laboratoire et est facturé aux conditions Pharmatomic. Lorsqu’aucun accord n’a pu être trouvé, le principe de la rétrocession est utilisé. Autrement dit, l’un des pharmaciens du groupement achète pour tout le monde. Prochainement, les Pharmatomic pourront s’appuyer sur une SRA. Une façon finalement assez simple et peu coûteuse de répondre à la réglementation, souligne Virginie Buisson, membre du groupement, installée à Morsang-sur-Orge (Essonne).
Patrick Appel, titulaire dans le 19e arrondissement de Paris, a, lui, déjà négocié le virage de la rétrocession. « Conscients du fait que la pratique devenait limite sur le plan légal, nous avons souhaité, avec quatre autres confrères, rentrer dans la norme en créant un groupement d’intérêt économique (GIE) », témoigne le pharmacien. Ainsi, depuis le 1er janvier 2012, les commandes négociées par les cinq titulaires auprès de quelques laboratoires choisis, passent par le GIE. Les livraisons et les factures parviennent en revanche directement à chacune des officines. « Ce nouveau cadre nous permet de rester dans les clous tout en continuant de bénéficier de conditions commerciales avantageuses », souligne Patrick Appel.
« Nous n’avons pas attendu la remise en cause de la rétrocession pour nous structurer en GIE », déclare pour sa part Thierry Varin. Le titulaire de la pharmacie du Rocher à Saint-Mandé (Val-de-Marne) et une douzaine de confrères ont décidé, il y a plus de 3 ans, de regrouper leurs achats au sein d’une structure « plus transparente et mieux identifiable par les fournisseurs ». Pourquoi pas une SRA ? « J’ai bien été tenté par l’offre d’un grossiste qui permettait de profiter de sa plate-forme de répartition, mais la mise en place m’a paru un peu plus lourde et complexe eu égard aux avantages attendus », confie Thierry Varin.
SRA ou GIE, chacun trouve sa façon de se conformer à la loi. Les syndicats d’officinaux ne semblent pas, pour leur part, convaincus du bien-fondé de ces structures. Ils plaident plutôt en faveur d’une légalisation pure et simple de la rétrocession.
la loi.
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