- Ça fait bizarre d’être dans la pharmacie et de garder les rideaux baissés, dit Maëlys alors qu’elle pioche un bonbon. Et si quelqu’un veut entrer parce qu’il voit que c’est allumé, on fait quoi ?
- Normalement, les patients sont tous au courant. Et puis il y a la grande banderole sur le parking, répond Christèle tout en réfléchissant à la meilleure façon de réorganiser la réserve. On va retirer toute la rangée de produits pour les mettre là-bas. Ce sera plus logique.
Nonchalamment, la jeune apprentie se déplace vers sa collègue et commence à prendre des boîtes pour les poser derrière elle.
- C’est ma première greffe.
- Ta première grève plutôt…
- Oui, si tu veux. Et tu vas à la manif toi ? Ça va être une dinguerie, de voir des pharmaciens dans la rue en hurlant. Moi qui ai toujours pensé que les pharmaciens étaient coincés.
Christèle sourit.
- Si tu veux y aller, il faut qu’on s’active. Nous devons être au point de rassemblement à 11 h 00.
Dans l’espace d’accueil, Gisèle, fidèle à son poste, est au téléphone avec une complémentaire santé. À côté d’elle, Marion finalise des dossiers. Depuis deux mois, l’adjointe a mis en place une traçabilité des interventions pharmaceutiques : chaque conseil délivré est consigné dans le dossier informatique du patient. La démarche de Marion, validée par les titulaires, s’inscrit dans une expérimentation initiée par la faculté de pharmacie. L’objectif est de s’appuyer sur les officines volontaires pour définir des consensus de prise en charge de certains soins de premier recours.
- C’est un sacré boulot ! Je m’étais laissée déborder. Heureusement qu’il y a cette journée off.
- Idem. C’est vraiment confortable de travailler sans les patients, répond Gisèle.
Penchée sur une feuille de papier, elle raye ligne après ligne les dossiers traités.
- J’avance cent fois plus vite que d’habitude.
- Parce que tu n’es pas interrompue dans ton travail.
- Qui a fait des crêpes ?, leur demande J-C.
Sans attendre leur réponse, il se sert.
- C’est Marilyne. Mais on pensait les manger après la manifestation…
- Trop tard, répond le pharmacien la bouche pleine. On y va ? Qu’est-ce qu’il veut ce grand gaillard ?
Derrière la porte principale de la pharmacie, un homme fait de grands gestes pour attirer l’attention de J-C et de ses collaboratrices.
- C’est fermé Monsieur. La pharmacie est en grève.
- On dirait qu’il insiste. Il a l’air un peu paniqué, non ? On devrait peut-être aller voir, suggère Marion qui sans attendre, joint l’acte à la parole. Je passe par la porte de derrière.
Lorsque l’adjointe arrive sur le parking, un soulagement se dessine sur le visage du jeune homme :
- Là-bas, une dame est tombée. Elle n’arrive pas à se relever.
- Vous avez appelé les secours ?
L’homme fait non de la tête. Gisèle et Christèle arrivent.
- Appelez les pompiers. Madame Deligné a fait une chute. Madame, je suis là. Que vous est-il arrivé ?
- Je ne sais pas comment j’ai fait mon compte. Ce n’est pas grave. Mais je n’arrive pas à bouger les jambes. Merci de m’aider, dit la vieille dame.
À côté d’elle, la roue du vélo à terre continue sa rotation.
- Et la manif ?, demande J-C.
- Allez-y sans moi. J’attends les secours.
(à suivre…)
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