Face aux difficultés rencontrées pour réaliser le retrait des lots de laits infantiles Lactalis susceptibles d’être contaminées par des salmonelles en décembre et janvier dernier, la commission d’enquête de l’Assemblée nationale créée pour « tirer les enseignements de l'affaire Lactalis et étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d'information » se penche sur tous les axes d’amélioration possible. C’est dans ce cadre qu’elle a auditionné mardi les représentants de l’Ordre des pharmaciens et des deux syndicats de titulaires. Au détour des explications sur le fonctionnement du dossier pharmaceutique (DP) et en particulier de la fonctionnalité DP Rappel-Retrait dédiée aux médicaments mais qui a été utilisé pour le rappel des laits infantiles, le président de la commission, Christian Hutin, a sollicité les avis des pharmaciens sur l’idée de réserver la vente des laits 1er âge et les laits spécifiques à l’officine en lui donnant un statut de médicament.
Prix encadré
« Le statut de médicament clarifie les responsabilités des différents acteurs. Bien évidemment nous y sommes favorables puisque ce statut simplifie la procédure de rappel de lots, et nous sommes aussi prêts à débattre avec les autorités sur un prix réglementé », répond immédiatement Gilles Bonnefond, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). D’autant qu’il est plus facile « pour une maman de se rendre dans une pharmacie de proximité que dans une grande surface » au vu du maillage officinal, ajoute-t-il. Philippe Gaertner, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) se souvient : « Quand j’ai commencé mon activité professionnelle, les laits 1e âge étaient dans le monopole pharmaceutique », avant d’être disponibles dans d’autres circuits de distribution au début des années 1980. C’est la raison pour laquelle Gilles Bonnefond a rapidement parlé d’un prix encadré, car « à l’époque, la raison de cette sortie de monopole reposait sur le fait que la mise à disposition dans d’autres circuits de distribution provoquerait de la concurrence et ferait baisser les prix ; ça a peut-être été vrai au début mais beaucoup moins ensuite ». Pour Philippe Gaertner, un retour vers le monopole pharmaceutique se justifie pour « trois catégories de nourrissons qui méritent une attention particulière : ceux qui nécessitent une alimentation particulière, les prématurés et les enfants en bas âge ».
Compétitivité
Mais ce retour dans le monopole officinal inquiète le rapporteur de la commission d’enquête, Grégory Besson-Moreau, qui s’interroge sur la capacité des pharmacies à proposer toutes les références existantes et à recevoir toutes les personnes qui viendront acheter leur lait infantile spécifique ou 1er âge. « Je n’ai aucune crainte ni sur la capacité des pharmaciens, ni sur celles des grossistes-répartiteurs à alimenter les pharmacies. Sur les laits 1er âge, la pharmacie reste très compétitive en termes de prix et de conseil, le consommateur ne s’y trompe pas », remarque Carine Wolf-Thal, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP). Et d’ajouter que « les pharmaciens sont des professionnels de santé, ils ont l’habitude de répondre aux interrogations des jeunes mamans qui viennent à l’officine de façon hebdomadaire à ces âges de la vie de leur enfant », appelant chacun des pharmaciens présents à témoigner qu’une garde de nuit se passe rarement sans l’appel d’une maman en panne de lait infantile.
Un ensemble de réflexions que la commission d’enquête a bien enregistré, alors qu’elle auditionnait le lendemain des représentants de la grande distribution, notamment Michel-Edouard Leclerc, qui réclame depuis des années le droit de vendre des médicaments.
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