Agnès Buzyn évalue autour de 25 % des dépenses de santé le montant des actes inutiles et les prescriptions non justifiées. Cela représente une manne de 48,8 milliards d'euros au regard de l'objectif de dépenses maladie fixé pour 2018 à 195 milliards d'euros (ONDAM). La semaine dernière, la ministre de la Santé l'a reconnu devant l'association des journalistes de l'information sociale (AJIS) : la pertinence des soins, c'est une « marge de progrès considérable et d'économies sans douleur pour la Sécurité sociale ».
Si la chasse aux actes et soins inutiles n'est pas nouvelle, l'offensive du gouvernement Macron, portée par une ministre forte de 25 ans de carrière hospitalo-universitaire et d'un passage à la Haute Autorité de santé (HAS), pourrait réussir là où d'autres ont échoué. « Combien de fois entend-on parler du "scanner d'attente" en attendant l'IRM, fait pour rassurer le patient ? Et les prises de sang tous les deux jours à un malade pour justifier sa présence une semaine à l'hôpital dans l'attente d'une chirurgie, c'est quoi ? C'est un acte inutile, les médecins le savent très bien ! » a assené Agnès Buzyn.
Préjudice
Les opérations chirurgicales font partie de la panoplie. « Le jour où nous avons posé la question de la pertinence des appendicectomies, nous avons réduit de 70 % le nombre de ces actes réalisés dans notre pays, ce qui veut bien dire que tous les malades opérés n’avaient pas l’appendicite », a-t-elle lancé aux députés lors de l'examen du budget de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2018.
Comment différencier un acte justifié d'un acte qui ne l'est pas ? Pour l'assurance-maladie, la pertinence des actes (et des prescriptions) s'inscrit dans la logique de « maîtrise médicalisée » engagée il y a plus de dix ans, qui repose sur le principe « de l’administration du juste soin par les professionnels, c’est-à-dire un soin utile, efficace et efficient ».
Le gouvernement a évalué à 575 millions d'euros les économies attendues sur le budget de la Sécu l'an prochain grâce à la pertinence des actes et des prescriptions à plusieurs niveaux : maîtrise médicalisée, adaptations tarifaires (biologie, imagerie)mais aussi transports et indemnités journalières, deux postes régulièrement visés.
La création dans le PLFSS d'un fonds de financement consacré à l'innovation organisationnelle et tarifaire doit permettre de changer la donne en soutenant les pratiques pertinentes (parcours, prises en charge, forfaits globaux…). Au programme par exemple : l'expérimentation d'une rémunération forfaitaire à l'épisode de soins, dérogatoire à la tarification à l'activité, censé valoriser les établissements les plus vertueux. Agnès Buzyn l'a assuré : « Deux ou trois actes et deux ou trois parcours médicaux et chirurgicaux expérimenteront cette tarification dès 2018. »
Autre outil : le « CAQES », contrat financier qui incite les établissements à développer les bonnes pratiques – telles que l’achat de génériques, le bon usage des antibiotiques ou la déclaration systématique des événements indésirables graves.
La CNAM propose (comme chaque année) la réduction des disparités des taux de recours pour dix actes : amygdalectomie, appendicectomie, césarienne, chirurgie bariatrique, chirurgie de la tumeur bénigne de la prostate, chirurgie du canal carpien, cholécystectomie, hystérectomie, pose d’une prothèse de genou, thyroïdectomie. Gain éventuel : au minimum 100 millions d'euros, soit 34 000 séjours évitables.
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