Au moment du déconfinement, Olivier Véran le répète, il faut « tester, tester et tester » pour identifier le plus précocement possible les personnes infectées et avoir une idée du nombre de personnes contaminées à l'échelle nationale.
Après avoir rendu un premier avis sur les tests virologiques, la HAS émet de premiers doutes sur les tests sérologiques. Ils ne permettent pas de répondre à la question : « Suis-je contagieux ? ». Ils ne permettent pas non plus de répondre à la question : « Suis-je protégé contre le Covid-19 ? ». Ces limites font dire à la Haute Autorité de santé (HAS) que « mal utilisés, les tests sérologiques pourraient induire en erreur les patients sur leur immunité ». Toutefois, le gouvernement qui s'est fixé comme objectif de dépister 700 000 personnes par semaine à partir du 11 mai, ne les met pas définitivement de côté. Les représentants de la profession se positionnent, à commencer par les groupements. « Nous sommes extrêmement favorables à ce que les tests sérologiques soient réalisés en pharmacie. Ils ont toute leur place dans la stratégie de dépistage », annonçait ainsi Laurent Filoche, président de l'Union des groupements de pharmaciens d'officine (UDGPO). Après la parution, quelques jours plus tard, de la liste des tests sérologiques homologués par le Centre national de référence (CNR), les pharmaciens désireux de proposer des TROD Covid-19 et les représentants de la profession ont espéré que l'arrêté les autorisant à les réaliser sorte rapidement. Leurs espoirs vont être déçus. « C'est une situation ubuesque. Les tests validés sont connus, la Haute Autorité de santé est favorable à l'idée que les pharmaciens proposent des TROD Covid-19. Il ne manquait plus que l'arrêté et nous n'avons aucune idée de quand il sortira », déplorait Carine Wolf-Thal, présidente du Conseil national de l'Ordre des pharmaciens (CNOP), dans le « Quotidien du pharmacien » du 2 juin. Dès le 18 mai, la Haute autorité de santé précisait en effet au sujet des TROD qu'ils étaient « réalisables dans davantage de lieux et par tout professionnel de santé (dont les pharmaciens) », même s'ils ne permettent pas de poser formellement le diagnostic de Covid-19 et ne peuvent se substituer aux examens de biologie médicale réalisés en laboratoire. « Il est nécessaire après un TROD positif de confirmer le résultat par un test sérologique ELISA ou TDR », indiquait ainsi l'instance.
Des pharmaciens se risquent aux TROD
Lassés par la lenteur de l'administration et soucieux de répondre à la demande de certains de leurs patients, des officinaux vont commencer à réaliser des TROD Covid-19 au lendemain de la parution de la liste du CNR. Des initiatives qui ont parfois fait l'objet de reportages télévisés suscitant émoi et incompréhension par mi la profession mais aussi chez les patients. Pharmacien à Levallois-Perret, dans les Hauts-de-Seine, Bruno Fellous expliquait ainsi pourquoi il avait pris le risque de réaliser des TROD Covid-19 dans sa pharmacie. « Si toutes les officines du pays réalisaient quotidiennement 50 TROD, on pourrait tester un million de personnes par jour. À l'étranger, cela ne pose pas de problème, en France, l'administration traîne. Alors je me suis peut-être mis en danger en faisant cela, mais je ne vois pas où est le mal. J'ai anticipé et je l'assume. » Si les syndicats n'ont bien sûr pas incité les pharmaciens à enfreindre les règles, ils n'ont malgré tout pas caché leur agacement. Gilles Bonnefond, président de l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (USPO) a notamment pointé du doigt l'une des raisons qui expliquait, selon lui, le blocage de la situation. « Il y a un véritable lobbying des biologistes médicaux pour exclure les pharmaciens de la pratique des TROD Covid. Ils mènent un combat qui est totalement inapproprié, déplorait-il. Pour les Français, il est maintenant naturel de venir se faire dépister en pharmacie. Il s'agit désormais de mettre en place une véritable stratégie de santé publique pour que nous puissions contribuer à mesurer l'immunité collective de la population. Pas besoin de prescription médicale, le pharmacien saura parfaitement déterminer si un patient a besoin ou non d'un TROD. Notre profession a montré qu'elle savait être responsable, comme on l'a vu au sujet du Plaquénil ou par rapport au Doliprane », soulignait-il. « On prône davantage d’agilité et un allègement administratif, on assiste, en ce qui concerne les TROD sérologiques au Covid-19, à la mise en place d’un contre-exemple total », déplorait Gilles Bonnefond début juin.
Bientôt un arrêté
Quelques jours plus tard, le 16 juin, Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès du ministre de la Santé a finalement annoncé qu'un arrêté serait pris « rapidement » pour permettre aux officinaux de réaliser des TROD sérologiques. « Les pharmaciens pourraient intervenir de façon complémentaire aux laboratoires pour dépister les individus asymptomatiques qui le souhaitent (...) L'ouverture réglementaire prévue par l'arrêté les concerne donc », a-t-elle affirmé au Sénat. Alors que l'épidémie est en décrue et que les Français n'ont peut-être plus autant envie de se faire tester aujourd'hui qu'il y a quelques semaines, la décision peut sembler un brin tardive mais comme le pense le président de l'UDGPO, Laurent Filoche : « mieux vaut tard que jamais. »
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