Dans sa décision du 17 mars, le Conseil d’État vient de mettre fin à la distorsion de concurrence qui sévissait entre les pharmacies en ligne françaises et leurs homologues européennes. Alors que des e pharmacies belges et néerlandaises pouvaient conquérir le marché français via l’achat de mots-clés sur Google ou d’autres moteurs de recherche, les cyber pharmacies françaises se trouvaient pieds et poings liés par un arrêté du 28 novembre 2016 relatif aux règles techniques applicables aux sites Internet de commerce électronique de médicaments (article L. 5125-39 du code de la santé publique).
Celui-ci interdit aux pharmacies en ligne de recourir au référencement payant dans les moteurs de recherche et les comparateurs de prix. On se souvient de la bataille juridique qui avait opposé les adhérents de l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO) et de l’Association française des pharmaciens en ligne (AFPEL) au cyber pharmacien néerlandais Shop-Apotheke. La procédure avait trouvé son point d’orgue devant la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE), dont le jugement du 1er octobre 2020 avait estimé que l’État français n’avait pas fait la démonstration de l’impérieuse nécessité d’interdire le référencement payant.
Une démarche très onéreuse
C’est donc au niveau national, cette fois, que l’affaire a été portée par un pharmacien de Caen auprès du Conseil d’État. Celui-ci a jugé, le 17 mars dernier, que les officinaux français détenant un site d’e-commerce étaient jusqu’à présent pénalisés et a, par conséquent, donné deux mois au ministère de la Santé pour abroger ledit arrêté. En théorie, les pharmaciens concernés ont donc un peu moins de huit semaines pour élaborer leur nouvelle stratégie de communication et acheter les mots-clés ainsi que tout autre outil de communication augmentant leur visibilité sur le Net.
En théorie seulement. Car, comme le remarque Cyril Tétart, président de l’AFPEL, l’achat de mots-clés n’est pas à la portée de toutes les bourses officinales. Selon lui, il faut mettre 20 à 30 fois plus sur la table pour un référencement payant que pour un référencement naturel qui, lui, revient à environ 2 000 euros par mois. « Quand on sait qu’un euro investi dans le référencement payant rapporte autant en chiffre d’affaires, on est loin d’un retour sur investissement, en tout cas à court terme », précise-t-il, se déclarant cependant très satisfait de cette première avancée. Il ne lâche cependant pas sur ses deux autres revendications. Les e pharmacies françaises qui réalisent 60 % de leur activité en parapharmacie veulent en effet encore voir deux verrous se lever : l’interdiction des entrepôts déportés et l’indexation du nombre de pharmaciens salariés au chiffre d’affaires.
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