Répartition pharmaceutique

La lumière au bout du tunnel

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Publié le 26/10/2021
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Les deux années de crise sanitaire ont fait passer les grossistes-répartiteurs de l’ombre à la lumière. Bien que malmenés économiquement depuis plusieurs années, ils ont pris à bras-le-corps des missions essentielles dans la lutte contre le Covid-19 et ont su se rendre incontournables. Résultat, des solutions voient finalement le jour pour améliorer leur situation financière.
« Cette trajectoire de sortie de crise va nous permettre de couvrir nos charges, pas plus, pas moins », prévient Hubert Oliver,  président de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (ici aux côtés de Laurent Filoche, président de l’UDGPO)

« Cette trajectoire de sortie de crise va nous permettre de couvrir nos charges, pas plus, pas moins », prévient Hubert Oliver, président de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (ici aux côtés de Laurent Filoche, président de l’UDGPO)
Crédit photo : S. Toubon

Depuis 2008, le chiffre d’affaires et le résultat d’exploitation de la répartition pharmaceutique sont en chute libre. Pire, depuis 2017, le résultat d’exploitation est négatif. « La dernière année où le secteur a été profitable en termes d’EBE, c’était 2016. Depuis lors, la répartition perd collectivement de l’argent parce que l’évolution de ses charges n’est pas couverte par l’évolution de sa marge », explique Hubert Olivier, président de la Chambre syndicale de la répartition pharmaceutique (CSRP). C’est pourquoi les grossistes-répartiteurs tirent le signal d’alarme depuis une dizaine d’années, sans obtenir l’attention espérée. Mais en 2020, tout a changé.

En appui du réseau officinal, la répartition pharmaceutique s’est massivement investie dans la lutte contre le Covid-19. « Nous avons distribué 700 millions de masques d’État, un volume considérable pour nos établissements, et 27 000 médicaments d’intérêt thérapeutique majeur ont été transportés des hôpitaux aux officines. Le chiffre est beaucoup plus modeste mais nous n’en sommes pas moins fiers parce que cela signifie que nous avons traité 27 000 patients au cas par cas à partir d’un modèle d’organisation inventé en 48 à 72 heures avec la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) et la Direction générale de la santé (DGS) », se souvient Hubert Olivier.

Dialogue efficace et constructif

En 2021, la répartition a continué sur sa lancée en s’engageant résolument dans l’approvisionnement en vaccins, en premier lieu avec ceux d’AstraZeneca et de Janssen. « La répartition a alors dû organiser une logistique non plus à la boîte mais reposant sur un déconditionnement pour faire de la préparation unitaire. Cela nous a demandé une mobilisation pharmaceutique extrêmement importante mais nous n’avons pas hésité une seconde. » Le plus complexe restait pourtant à venir avec la livraison des vaccins à ARNm et surtout l’enjeu d’un stockage à -20 °C alors que la chaîne du froid des établissements de répartition s’établit entre 2 °C et 8 °C. « Sans même attendre des engagements, la répartition a investi dans une infrastructure de stockage à -20 °C et c’est comme ça que le vaccin de Moderna a pu arriver jusqu’aux officines dès la fin du mois de mai et désormais le vaccin Pfizer depuis début septembre. Chaque semaine, la répartition livre entre 9 000 et 14 000 pharmacies en vaccins anti-Covid », se félicite Hubert Olivier. Des vaccins manipulés et étiquetés par la répartition pour adapter les dates de péremption aux conditions de stockage.

Un engagement d’autant plus important, rappelle le président de la CSRP, que les centres de vaccination ferment progressivement et que la charge de la vaccination va reposer entièrement sur la ville. Un engagement et une réactivité qui ne sont surtout pas passés inaperçus aux yeux des pouvoirs publics qui savent désormais sur quels secteurs ils peuvent compter. « En étant sortis de l’ombre, nous avons pu reprendre un dialogue efficace et constructif avec les pouvoirs publics », remarque Hubert Olivier. C’est ainsi qu’une nouvelle marge a été mise en œuvre, grâce à la parution d’un arrêté au « Journal officiel » le 17 septembre 2020, d’abord pour les mois d’octobre, novembre, décembre 2020 et janvier 2021 permettant un apport de 30 millions d’euros, puis une nouvelle marge est en place depuis février dernier. Elle devrait dégager 40 millions d’euros la première année, puis 30 millions d’euros les années suivantes. « C’est un bon début mais ce n’est pas suffisant puisque la tendance pour 2021 sans aucune mesure nous amène à un déficit de 71 millions d’euros, et de 100 millions d’euros en 2022. »

Un forfait pour la chaîne du froid

La 2e mesure attendue est inscrite au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2022 actuellement discuté par les parlementaires. Elle prévoit d’abaisser la taxe sur les ventes en gros, dite taxe ACOSS (Agence centrale des organismes de la Sécurité sociale) dont le taux passerait de 1,75 % à 1,5 %. Une nécessité selon Hubert Olivier qui indique qu’en 2020, « notre résultat d’exploitation avant cette contribution s’élevait à 110 millions d’euros, dont il faut donc soustraire cette taxe totalement confiscatoire de 190 millions d’euros ». L’allègement de cet impôt ne permettra pas encore à la répartition de revenir à l’équilibre, c’est pourquoi la CSRP attend une 3e mesure : une rémunération additionnelle sur les produits de la chaîne du froid par le biais d’un forfait à la boîte. Ce à quoi le ministre de la Santé, Olivier Véran, s’est engagé le 12 octobre lors de son audition devant la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale. Dans un courrier à la profession, le ministre a précisé que ce forfait serait mis en place au plus tard en avril prochain. « Cette trajectoire de sortie de crise va nous permettre de couvrir nos charges, pas plus, pas moins, prévient Hubert Oliver. Nous n’allons pas devenir riches, mais nous allons arrêter collectivement de perdre de l’argent. »

M. M.

Source : Le Quotidien du Pharmacien