Le titulaire de la pharmacie Lafayette d'Agen - jusque-là Pharmacie du Grand Sud Ouest - reste très discret sur ses motivations et ses projets, soulignant que l'annonce dans la presse locale de cette ouverture lui vaut déjà quelques déboires. Des plaintes auraient été déposées au Conseil de l’Ordre pour avoir laissé publier le seul nom de son enseigne. « Je comprends assez mal les réactions, confie-t-il, nous avions auparavant une officine traditionnelle sans histoire. Nous existions déjà, et nous n’avons fait que nous rattacher à un réseau. Mais il n’y a pas lieu d’en parler, car je ne souhaite pas étendre la polémique. »
Pour Corinne Tremon, présidente par intérim du syndicat du Lot-et-Garonne, installée dans le proche voisinage de la nouvelle officine, l’impact concurrentiel de cette dernière sera évident : « Je ne souhaite pas trop m’exprimer sur cette implantation, déclare-t-elle, mais je rappellerai simplement qu’ici, en Nouvelle Aquitaine, nous pratiquons depuis longtemps une politique de prix raisonnable. Notre offre reste globalement bon marché, si on observe le rapport entre la moyenne nationale et la moyenne locale. Nous sommes donc très compétitifs, et cette nouvelle enseigne tirera certes les tarifs vers le bas, mais jusqu’où ? »
Un premier essai avorté
La ville, qui compte 16 officines pour environ 35 000 habitants, avait déjà connu en 2008 l’implantation de la même enseigne, qui s’était d’ailleurs terminée par une faillite quelques années plus tard.
« Comment voulez-vous qu’un commerce fonctionne sans faire de bénéfices ? interroge Pierre Beguerie, président du Conseil de l’Ordre régional Nouvelle Aquitaine. Car c’est le système, que j’ose qualifier de pourri, développé par les marques discount qui est en cause : en l’absence de marge, rien ne peut fonctionner, et on porte obligatoirement tort aux autres par une concurrence déloyale. Les officines sont certes des acteurs de santé publique, mais aussi des entreprises, avec des frais, du personnel, des charges qui ne peuvent être payés que par un bénéfice. D’autre part, je confirme qu’une plainte est bien en cours envers le pharmacien en question, suite à la publication de nombreux articles dans la presse régionale mettant en valeur le nom de ce groupement. »
Réactions identiques du côté des proches voisins de l’intéressé. À la pharmacie Floréal (500 mètres plus loin), Caroline Albert évoque les mêmes causes et les mêmes effets, tout en restant lucide sur son devenir : « Pour l’instant, nous ne constatons pas de baisse réelle de notre activité, mais il est trop tôt pour que nous nous en rendions compte. Il faudra attendre quelques mois de plus. Nous allons tenir, en réduisant un peu nos marges, en baissant autant que nous le pourrons les prix sur certains produits, comment faire autrement ? On verra bien ou cela nous mènera. »
Reste la question de la viabilité de l’entreprise. La tentative précédente, qui s'était traduite par un échec il y a neuf ans, laisse quelques espoirs aux pharmaciens d’Agen qui, faute de mieux, font le gros dos sous l’orage. En espérant qu'après la pluie revienne le beau temps.
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