De la rentrée jusqu'aux examens finaux, la mise en place de la réforme de la PACES, initiée en septembre 2020, aura été un chemin de croix. Surcharge de travail pour les étudiants inscrits dans les deux nouvelles voies – parcours accès santé spécifique ou PASS et la licence accès santé ou LAS -, nombre de places jugé insuffisant pour ces derniers comparé au quota accordé aux derniers redoublants de la PACES, difficultés liées à l'obligation de suivre les cours à distance…
Rien n'aura été épargné aux pionniers qui auront expérimenté l'an 1 d'une réforme aux objectifs ambitieux. Le premier d'entre eux : mettre fin aux vices de l'ancien système. C’est-à-dire accorder une deuxième chance aux étudiants recalés au concours qui peuvent s'orienter vers un nouveau parcours en 2e année, la LAS 2, et retenter leur chance plutôt que de redoubler leur première année. Le deuxième : permettre à des profils d'étudiants plus diversifiés d'avoir accès aux études de santé. Enfin, le troisième, qui constitue le principal dessein de la réforme : former davantage de futurs professionnels de santé pour enrayer la progression des déserts médicaux.
Nul ne peut savoir si la réforme de la PACES permettra d'atteindre ces objectifs dans quelques années. Les collectifs de parents d'étudiants inscrits dans les nouveaux parcours (PASS/LAS), qui ont fleuri au niveau local ces derniers mois, en doutent déjà. Tout au long de l'année universitaire, ils n'auront eu cesse de dénoncer les lacunes observées dans l'application de la réforme, sollicitant les députés et mettant en ligne une pétition signée par plus de 50 000 personnes pour demander davantage de moyens de mise en œuvre. Leur principal combat : obtenir plus de places pour les étudiants de première année dans les différentes filières de santé. Sur ce point, le Conseil d'État finira par leur donner satisfaction, contraignant 15 universités à augmenter le nombre de places à la rentrée. En tout, sur l'ensemble du territoire, ce sont ainsi 1 000 places supplémentaires qui ont pu être créées.
« On repart sur les mêmes bases »
« Une première victoire » pour Emmanuel Voiment, représentant du collectif PASS/LAS national ; mais pour ce père d'une étudiante inscrite en LAS 2 à l'université de Rouen, le combat est loin d'être terminé. « Cette rentrée se présente un peu comme celle de l'an dernier, malheureusement, soupire-t-il. Pour les étudiants en LAS 2 les modalités d'accession pour rebasculer sur les études de santé ne sont pas encore déterminées. Les capacités d'accueil l'an prochain pour les étudiants de première année ne sont connues dans aucune université ou presque. En résumé, les étudiants commencent l'année sans disposer des règles », dénonce Emmanuel Voiment qui affirme que certaines facultés n'ont pas prévu de communiquer sur les conditions d'admission en études de santé des LAS 2 et sur le nombre de places auxquelles pourront prétendre les étudiants de première année avant octobre-novembre. « Les modalités et les capacités d'accueil doivent normalement être publiées avant le 30 septembre. Si des universités ne les publient pas avant cette date, ce sera déjà contraire aux textes. On repart donc sur les mêmes bases qui ont conduit des facs devant les tribunaux administratifs », redoute-t-il.
Trop de différences selon les universités
Les modalités en vigueur dans les facultés diffèrent par ailleurs selon les universités qui jouissent d'une grande liberté dans leur manière de mettre en œuvre la réforme. « Il y a trop de disparités, les oraux représentaient jusqu'à 70 % de la note globale dans certaines facs et beaucoup moins ailleurs, certaines ont décidé de mettre en place des notes éliminatoires mais d'autres, pas… Chaque université est autonome, nous ne le contestons pas, mais ces différences donnent l'impression aux étudiants qu'ils ne sont pas égaux entre eux selon l'endroit où ils passent leur diplôme », estime Emmanuel Voiment.
Homogénéiser les pratiques entre les différentes universités dans la mise en place de la réforme, c'est également indispensable pour Théo Vitrolles, porte-parole de l'Association nationale des étudiants en pharmacie de France (ANEPF). « Ce n'est pas possible pour tout mais il faut au moins une mise en commun », confirme-t-il. Il estime également qu'un grand travail doit être mené sur le parcours LAS qui pourrait rapidement devenir le parent pauvre de la réforme si rien n'est fait. « Il faut vraiment que ces deux parcours soient complémentaires, ne pas laisser le PASS devenir une « PACES bis » et la LAS un simple second choix. » Il pointe globalement du doigt « le manque de communication » dont ont été victimes les premiers étudiants concernés par la réforme. « Cette première année a été très compliquée, pour ne pas dire catastrophique, il est impossible d'imaginer que cette année se déroule comme la précédente. »
La pharmacie ne doit pas être un second choix
S'il est par ailleurs trop tôt pour mesurer les conséquences de cette réforme sur la filière pharmacie, Théo Vitrolles observe déjà une tendance quelque peu inquiétante. « Aucun étudiant venant de LAS ne figure en première année de pharmacie dans certaines universités. Il faut absolument faire la promotion de la filière pharmacie auprès des étudiants qui sont dans ces nouveaux parcours car pour beaucoup d'entre eux cette première année donne accès aux études de médecine et non pas aux études de santé dans leur ensemble. Ils voient toujours la pharmacie comme un second choix. » Un constat que le monde de l'officine déplore depuis de nombreuses années et sur lequel la réforme de la PACES n'a eu aucune influence pour le moment.
En cette rentrée 2021, le collectif national PASS/LAS continue, lui, de solliciter les parlementaires pour les sensibiliser à l'épineux dossier de la réforme des études de santé. Les parents d'étudiants espèrent toujours que le ministère de l'Enseignement supérieur finira par accéder à leur principale demande : augmenter sensiblement le nombre de places en filière de santé. « Il faudrait s'inspirer de ce qui a été fait dans les facs pilotes avant la mise en place de la réforme. Elles avaient augmenté le nombre de places de 30 %. Il faut quand même rappeler le but de la réforme, à savoir empêcher l'extension des déserts médicaux d'ici à 2030. On manque de monde, mais on a l'impression qu'on ne fait rien pour pouvoir former plus d'étudiants, pour nous c'est incompréhensible. »
D'après les chiffres de Parcoursup, les nombreuses difficultés rencontrées l'an dernier par les étudiants inscrits en PASS et en LAS n'ont toutefois pas dissuadé les bacheliers de choisir ces parcours en 2021, le nombre d'inscrits étant peu ou prou équivalent à celui de 2020. Preuve que les jeunes sont toujours nombreux à être motivés par l'idée de devenir un jour professionnel de santé.
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