Le Conseil scientifique Covid-19 s’est récemment réjoui de l’arrivée possible, en décembre 2021, de deux antiviraux oraux : le molnupiravir et le PF-07321332. Ces traitements pourraient être administrés en ville, contrairement aux anticorps monoclonaux, uniquement utilisables à l’hôpital.
Le Laboratoire Merck et la biotech Ridgeback Biotherapeutics ont d’ores et déjà annoncé les résultats positifs de l’étude de phase 3 Move-out évaluant le molnupiravir, un inhibiteur de polymérase, chez des patients non hospitalisés à risque de forme sévère. Selon des résultats intermédiaires, lorsqu’il est administré dans les cinq premiers jours de la maladie, ce médicament réduit de 50 % le risque d’hospitalisation et de décès par rapport au placebo.
L’essai, mené auprès de 775 personnes, avait été arrêté prématurément du fait de ces bons résultats. Une demande d’autorisation a été déposée auprès de la Food and Drug Administration le 11 octobre, et la demande auprès de l’Agence européenne des médicaments (EMA) devrait suivre.
Essais en curatif et en préventif
L’essai de phase 3 Move-ahead évalue par ailleurs l’intérêt du molnupiravir en prophylaxie post-exposition, après contact avec des personnes infectées. D’après le Dr Philippe Bonnard, directeur médical de MSD France, les résultats intermédiaires de l’analyse devraient être connus en décembre.
« Le molnupiravir avait initialement été évalué chez les patients hospitalisés oxygénorequérants dans l’essai Move-in mais il n’a pas montré d’efficacité clinique dans cette indication », précise-t-il, soulignant que ce médicament est actif sur tous les variants.
Quant au PF-07321332, un inhibiteur de protéase développé par Pfizer, il est à utiliser avec de faibles doses de ritonavir. Cette combinaison est évaluée chez des patients non hospitalisés à haut risque de forme sévère (phase 2/3 Epic-HR) ou à risque standard (phase 2/3 Epic-SR) avec administration dans les cinq jours suivant l’apparition des symptômes, ainsi qu’en prophylaxie post-exposition (phase 2/3 Epic-Pep).
Un troisième antiviral oral est prometteur : l’AT-527, un inhibiteur de polymérase développé par Roche avec Atea Pharmaceuticals. Son intérêt est étudié chez les patients non hospitalisés dans l’essai de phase 2 Moonsong et dans deux autres de phase 3, Morningsky et Meadowspring. Il est aussi évalué chez les patients hospitalisés avec Covid modéré et à risque de forme sévère dans l’essai AT-030-001. « Les résultats initiaux obtenus chez ces patients ont montré une activité antivirale rapide et soutenue contre le SARS-CoV-2 », indique le laboratoire. L’essai Marjoram, qui évaluera l’intérêt de la molécule en préventif chez des personnes susceptibles d’avoir été exposées au virus, devrait débuter en 2022.
Anticorps monoclonaux
Autre voie développée en parallèle des antiviraux : les anticorps monoclonaux. Le Laboratoire AstraZeneca a récemment dévoilé les résultats de l’étude de phase 3 Tackle concernant son cocktail à longue durée d’action AZD7442. L’association tixagevimab et cilgavimab (en injection intramusculaire) a permis de réduire de 50 % le risque de forme sévère et de décès chez des patients pris en charge en ambulatoire et présentant des symptômes depuis moins de sept jours. Une évaluation est en cours à l’EMA.
Fin août, des résultats positifs en prophylaxie pré-exposition avaient été présentés, avec un risque réduit de 77 % de développer une infection Covid symptomatique. « Du fait de sa demi-vie longue, ce cocktail pourrait être administré une fois par an en prévention », a souligné la Pr Anne-Geneviève Marcelin, cheffe du service de virologie de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP) à l’occasion d’un point presse de l’ANRS-Maladies infectieuses émergentes (MIE).
Cet été, les Laboratoires GSK et Vir Biotechnology ont aussi annoncé des résultats positifs : dans l’étude de phase 3 Comet-Ice, le sotrovimab a permis de réduire de 79 % à J29 les hospitalisations et les décès chez des adultes Covid non hospitalisés à risque de forme sévère, lorsque le traitement est administré dans les cinq jours suivant l’apparition des symptômes. « L’avis de l’EMA est attendu d’ici à la fin de l’année, et un dossier d’accès précoce a été déposé auprès de la Haute Autorité de santé fin juillet », avance la Dr Sophie Muller, directrice médicale de GSK France, soulignant le fait que le sotrovimab est efficace sur l’ensemble des variants.
Des essais sont en cours pour évaluer son intérêt en prophylaxie pré-exposition chez des patients qui ne répondent pas à la vaccination, comme les patients atteints de leucémie myéloïde chronique. « Le sotrovimab protège jusqu’à 5,5 mois », précise la Dr Muller.
Anticorps polyclonaux, verdict en 2022
La bithérapie Ronapreve – association de casirivimab et d’imdevimab développée par Roche et Regeneron et à demi-vie courte – est déjà disponible en France en accès précoce. Elle est indiquée chez des patients Covid non hospitalisés de 12 ans et plus et à risque élevé de forme grave ainsi que chez des patients hospitalisés nécessitant une oxygénothérapie non invasive et n’ayant pas développé naturellement d’anticorps. En prophylaxie pré-exposition, Ronapreve peut être administré une fois par mois chez les patients de 12 ans et plus qui ne répondent pas de manière satisfaisante à la vaccination en raison d’une immunodépression et qui sont considérés à très haut risque de forme sévère de Covid. Pour cette même population de patients, la bithérapie peut être utilisée en post-exposition.
D’autres approches sont explorées. La biotech nantaise Xenothera a développé de son côté un traitement à base d’anticorps polyclonaux glycohumanisés issus de sérum de porc. Un essai de phase 3 est en cours. « On devrait avoir les résultats d’ici à début 2022 », avance la Pr Marcelin.
Par ailleurs, les immunomodulateurs tocilizumab et sarilumab, deux anticorps monoclonaux anti-IL-6, ont reçu cet été l’approbation de l’Organisation mondiale de la santé pour les formes sévères de Covid, en association avec la déxamethasone.
Et toujours en lice, les antidépresseurs de type inhibiteur de la recapture de la sérotonine, comme la fluoxétine ou la fluvoxamine, ont montré des résultats encourageants dans des essais observationnels et précliniques, mais des essais cliniques sont nécessaires pour confirmer ou non leur bénéfice. Un essai clinique de phase 2/3, appelé Therapide et mené par l’institut Pasteur de Lille, est en cours afin d’évaluer l’efficacité du clofoctol, un antibiotique, dans la prise en charge précoce des patients. Et dans le cadre de Solidarity, trois autres traitements repositionnés sont évalués : l’artésunate, l’imatinib et l’infliximab.