2022 appartient au passé. Le bilan de l'année dernière clôt en effet une parenthèse de trois années hors normes, marquées par la gestion de la crise sanitaire. Dans ce contexte, bénéficiant des tests de dépistage Covid et de la vaccination contre le virus, le chiffre d'affaires bondit, selon les réseaux Fiducial, KPMG et CGP*, à 2,021 millions d'euros, 2,219 millions d'euros, voire 2,265 millions d'euros. Une croissance à deux chiffres (+ 10,92 %, 12,70 % et 13,50 %) « dont un tiers est imputable aux activités liées au Covid », confirme Joël Lecœur, expert-comptable et président de CGP.
Tests antigéniques et vaccins composent pour près de 6 % du chiffre d’affaires, tandis que la part détenue par les activités à taux de TVA à 5,5 % et à 10 % atteint entre 13,25 % et 14,98 % selon les cabinets. Les ventes de produits de TVA à 20 % détiennent entre 10,40 % et 12,95 % du chiffre d'affaires. Quant au médicament remboursé, la part qui lui revient est anormalement réduite, entre 68,04 % et 69,10 %. « Ce taux n’est pas habituel. Si on neutralise les activités Covid, la part revenant au segment de TVA à 2,1 % se situerait plutôt à 72 % », note Joël Lecœur. Il n’en reste pas moins que le médicament remboursé perd du terrain chaque année, sous les pressions conjuguées des baisses de prix et de volumes. « Depuis une dizaine d’années, les molécules les plus prescrites sont décotées. De plus, les médecins sont de plus en plus surveillés, nous le voyons à la réduction du nombre de lignes de prescription. En dix ans, on peut dire que la part du médicament remboursé dans le chiffre d’affaires a reculé de 3 à 4 points », estime Philippe Becker, expert-comptable, consultant pharmacie chez Fiducial.
Près de 7 % des pharmacies stagnent
À l’étude de l’échantillon des experts-comptables, il apparaît que l’« effet Covid » a bénéficié avant tout aux « gros faiseurs », c’est-à-dire aux pharmaciens qui ont réalisé beaucoup de tests et de vaccins. Une pharmacie sur quinze, en revanche, n’a pas tiré profit de la situation. On retrouve essentiellement des petites structures qui n’ont pu réaliser les tests. Mais, Covid ou non, l'exercice 2022 a connu en janvier et en automne, deux épisodes particulièrement intenses en pathologies. Cette résurgence des infections, mises sous l’éteignoir du Covid en 2020 et 2021, a permis à près de 92 % du réseau officinal d’être en croissance, contre 70 % les années précédant l’épidémie.
Au-delà du Covid, le chiffre d’affaires a également été porté par les effets de l’inflation sur les médicaments et les produits non remboursés. Autre explication au bond sensationnel réalisé par le chiffre d'affaires : l’érosion continue du réseau officinal. « D’année en année, nous observons la disparition de 200 pharmacies. Certes, il s’agit en majeure partie de regroupements. Néanmoins, nous assistons également à des disparitions sèches. Ce report d’activité bénéficie par conséquent aux pharmacies qui subsistent. J’estime à 0,5 ou même 1 point cette incidence sur leur chiffre d’affaires », analyse de son côté Philippe Becker.
* Sur 3 116 officines, soit plus de 15 % des pharmacies françaises (809 pharmacies étudiées par KPMG, 1 807 par le réseau CGP et 500 par Fiducial).