* Après le roman de la passion contrariée, « Nos rendez-vous », et une incartade vers les réseaux sociaux, « Instagrammable » , loin des questions religieuses évoquées depuis « Qumran » en 1996, Éliette Abécassis écrit astucieusement le roman de l’amour pérenne. Dans « Un couple », elle raconte l’histoire d’Alice et Jules, qui vivent ensemble depuis plus de soixante ans, en remontant le temps jusqu’au jour où ils se sont rencontrés, en 1955. Sur fond de pages d’histoire qui font date, des flashes rapides évoquent une vie à deux entre passion, enfants, jalousie, désamour, retrouvailles, routine… (Grasset, 198 p., 19 €)
* Les personnages, chez Didier van Cauwelaert (prix Goncourt pour « Un aller simple » en 1994) ont la vie dure. Même quand ils sont morts. C’est ainsi que le héros de « la Vie interdite » (1997), dont l’esprit continuait de se promener dans la vie de ses proches après sa disparition, est « ressuscité » dans « la Vie absolue » après exhumation pour cause de recherche en paternité. Un voyage posthume des plus réjouissant dans les grands sentiments et les petites mesquineries. Mais quand on n’est plus de ce monde, a-t-on encore les moyens de le changer ? (Albin Michel, 268 p., 21,90 €)
* Après « Terra Alta » et « Indépendance », « le Château de Barbe-Bleue » clôt la trilogie consacrée par l’écrivain espagnol Javier Cercas (dont l’œuvre est traduite dans une trentaine de langues) à Melchior Marin. La fille du policier, devenu bibliothécaire, après la mort de sa femme, dans un village de Terra Alta en Catalogne, a disparu. Ses recherches le conduisent à Majorque jusqu’à la villa d’un multimillionnaire suédois, réputé pour organiser des fêtes somptueuses. Une enquête prétexte à dénoncer l’impunité des puissants, la corruption des politiques et des policiers et la violence à l’encontre des femmes et des filles. (Actes Sud, 348 p., 23 €)
* Raphaël Confiant, qui vit en Martinique, où il est né, est l’un des chefs de file du mouvement littéraire de la créolité et l’auteur de nombreux romans. Dans « le Bal de la rue Blomet », à travers les destins croisés de trois exilés martiniquais, il redonne vie au « Bal nègre », qui a animé le quartier de Montparnasse dans l’entre-deux-guerres. Là où Noirs, Blancs et métis, anonymes et célébrités, ouvriers et intellectuels ou bourgeois, femmes du monde et de petite vertu venaient s’amuser sur fond de biguine, de valse, de mazurka et de jazz. Un récit comme un air de nostalgie. (Mercure de France, 272 p., 21 €)
* Paraissant après « le Silence » – écrit en 2020 et qui se déroulait un soir de Super Bowl, également soir de catastrophe mondiale –, « End Zone » est en fait le deuxième roman de Don DeLillo, publié en 1972 et inédit en France. On y trouve une approche inattendue de la relation obsessionnelle que les hommes entretiennent avec le conflit et la confrontation, relatée à travers le comportement de joueurs de football américain de l’université de Logos, West Texas. On s’aperçoit que les terminologies du football et de la guerre nucléaire – le langage des end zones – devient interchangeable. (Actes Sud, 268 p., 23 €)
* Publié en 1936, « Divorce à l’anglaise » est une comédie sociale délectable de Margaret Kennedy (1896-1967), l’auteure de « la Nymphe au cœur fidèle » (1924) et de « Festin » (1950). Alors que la société anglaise n’envisage encore le divorce qu’en cas d’adultère flagrant, Betsy, qui n’était pas heureuse, annonce qu’elle va se séparer d’Alec, qui était tout aussi malheureux. Les familles, et en particulier sa belle-mère, n’ont alors de cesse de sauver leur couple, ce qui n’aura que des effets contraires et néfastes pour tous. (La Table Ronde, 394 p., 24 €)
* Alors que vient de paraître « Soleil sombre », le troisième tome du cycle de « la Traversée des Temps », qui nous emmène en 1650 av. J.C, Éric-Emmanuel Schmitt prolonge sa réflexion sur la foi, inaugurée avec « la Nuit de feu », où il décrivait son expérience mystique dans le désert du Hoggar. « Le Défi de Jérusalem » est un récit de voyage en Terre sainte vers Bethléem, Nazareth, Césarée, un retour aux sources jusqu’à sa rencontre avec ce qu’il nomme « l’incompréhensible ». Après avoir lu le livre, le pape François a écrit une lettre à l’auteur, qui est publiée en postface. (Albin Michel, 220 p., 19,90 €)
* Grande dame de la littérature anglophone, Américaine installée à Londres, Lionel Shriver (« Il faut qu’on parle de Kevin ») explore notre rapport à la vieillesse de façon originale, avec douze variations et issues possibles pour se préparer à trépasser. Dans « A prendre ou à laisser », un couple d’Anglais quinquagénaires, médecin et infirmière, jurent de se donner la mort le jour de leurs 80 ans. Les années passent ; ils ne ne sont pas trop mal en point, toujours amoureux et prompts à se disputer au sujet du Brexit, tandis qu’une pandémie inédite rebat les cartes de la vie. Alors, vivre ou mourir ? (Belfond, 284 p., 22 €)