CHARGÉ de l’intérim de la présidence du LEEM depuis août dernier, après la démission d’Hervé Gisserot, nommé vice-président de GSK pour la Chine et Hong-Kong, Patrick Errard a été officiellement élu à la tête du syndicat en décembre dernier. Pour sa première intervention publique à ce poste, ce gastro-entérologue a choisi de définir les priorités de son mandat et de présenter des propositions pour répondre aux difficultés actuelles.
L’idée n’est pas nouvelle mais elle est emblématique d’un besoin de plus en plus affirmé par les industriels. « L’exercice du PLFSS, annuel par construction, conduit à privilégier les mesures d’ajustement prises au fil de l’eau, au détriment des politiques structurelles de réorganisation de l’offre de soins. La loi de financement est un outil obsolète et inadapté, tant aux objectifs de maîtrise des dépenses de soins qu’à l’évolution de notre système de santé », constate Patrick Errard. C’est pourquoi le LEEM propose de s’orienter « vers une programmation pluriannuelle de dépenses de médicaments », pour obtenir une visibilité à plus long terme, en phase avec les cycles longs des activités industrielles et permettant d’améliorer l’attractivité de la France. Car il est urgent de renouer avec la compétitivité, notamment sur le plan économique (marché français en récession, recul de l’emploi, baisse de l’innovation).
Incohérences.
Pour cela, il faut simplifier la taxation des industries du médicament, comme le recommandent les mesures approuvées lors du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) et du Comité stratégique de filière (CSF) en juillet dernier. Or la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2014 prévoit un transfert de taxation des grossistes-répartiteurs vers les laboratoires pharmaceutiques. Un impôt qui vient s’ajouter à 11 autres taxes spécifiques à l’industrie pharmaceutique, en sus de la fiscalité de droit commun, aboutissant à des prélèvements de 1,5 milliard d’euros ces trois dernières années. Une autre mesure de la LFSS a fait bondir le LEEM : la mise en place d’une expérimentation pour la substitution des biosimilaires par le pharmacien (après parution d’un décret à venir). Pourtant, là encore, les échanges avec le gouvernement lors des CSIS et CSF avaient abouti à recommander la création d’un groupe de travail chargé d’élaborer le cadre juridique des biosimilaires. Des incohérences aux yeux du LEEM, qui s’est opposé à ces deux mesures, sans succès.
Dans un contexte de tensions, le syndicat continue à soutenir une démarche de dialogue avec les pouvoirs publics. À ce titre, et dans la perspective de préparer au plus tôt le prochain PLFSS, le LEEM a proposé à la ministre de la Santé, Marisol Touraine, la création d’un groupe de contact État-industrie répondant à trois objectifs. Le premier est de « nous mettre d’accord sur les grandes données macroéconomiques du secteur car il n’est pas normal que nos chiffres divergent s’agissant des évolutions de chiffre d’affaires, de montants de remboursement, d’évolution du marché, etc. », pointe Patrick Errard. Ce groupe de contact devra également « tester les grandes hypothèses macroéconomiques qui sous-tendent la construction de dépenses de médicaments dans le PLFSS ». Enfin, il aura un rôle essentiel en prévenant « les risques de contradiction entre, d’une part, des engagements CSIS ou CSF de moyen et long terme, et, d’autre part, des mesures de régulation de court ou moyen terme ». L’ambition affichée est de ne plus voir le médicament considéré comme une variable d’ajustement des comptes sociaux. La ministre aurait accepté le principe de ce groupe de contact et doit maintenant « confirmer sa mise en place par courrier ».