Prise en charge des douleurs chroniques

L'Académie de médecine s'inquiète du déficit en spécialistes

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Publié le 22/10/2018
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Alors que la Journée mondiale de lutte contre la douleur a eu lieu le 15 octobre, l'Académie nationale de médecine publie ses recommandations « pour une meilleure prise en charge des patients ». Elle préconise notamment de « consolider l'existence des 273 structures spécialisées douleur chronique (SDC) », mises en place au cours des 20 dernières années.

Ce rapport est le fruit d'un groupe de travail multidisciplinaire, comprenant notamment des médecins spécialistes de la douleur, des neurologues et des pédiatres, qui s'est réuni plusieurs fois entre 2015 et 2018.

Plus d'un tiers de la population adulte française souffre de douleurs chroniques résistantes aux traitements standards. Ces douleurs rebelles, qui ont des répercussions sur la vie personnelle et professionnelle, sont prises en charge au sein des SDC. Selon les recommandations de la Haute autorité de santé (HAS) de 2008, toujours en vigueur, les lombalgies et les sciatalgies représentent le motif de consultation de SDC le plus fréquent avec 26 % des patients.

Avec ses trois plans de lutte contre la douleur (1998-2000, 2002-2005 et 2006-2010), la France a été pionnière dans la prise en charge de la douleur chronique. Toutefois, l'Académie estime que la situation actuelle « fait apparaître de réelles menaces sur la prise en charge des malades douloureux chroniques ». Elle s'inquiète d'une pénurie potentielle de médecins spécialisés après les départs à la retraite à venir des médecins à l'origine des SDC et des difficultés à en recruter de nouveaux. Une situation qui s'accompagne d'une demande croissante de consultations, liée en partie au vieillissement de la population et à une meilleure survie des patients souffrant de pathologies cancéreuses.

La moitié des médecins retraités sur la période 2015-2025

Une enquête de la Société française d'étude et de traitement de la douleur (SEFTD) illustre cette inquiétude : 50,2 % des équivalents temps plein de médecins de la douleur sont ou seront retraités au cours de la période 2015-2025. Toujours selon cette enquête, 16 SDC risqueraient de fermer en cas de non-remplacement de ces médecins de la douleur.

L'Académie de médecine recommande ainsi de « veiller au renouvellement des équipes des SDC par des médecins ayant reçu une formation spécialisée transversale (FST) "Médecine de la douleur", en plus de leur DES d’origine, et par d’autres soignants ayant bénéficié d’une formation "douleur" ». Mise en place en 2020, la FST « Médecine de la douleur » devrait « permettre le renouvellement des effectifs nécessaires à la pérennisation des 273 SDC existantes ».

Dans un souci d'amélioration de la formation de la médecine de la douleur, l'Académie souhaite désigner un « coordinateur universitaire douleur » au sein de chaque unité de formation et de recherche (UFR). Elle veut également promouvoir les « nouvelles approches non médicamenteuses, technologiques et psychosociales » en facilitant l'accès des médecins à des formations complémentaires en plus de la formation initiale de tout soignant à la douleur chronique.

Enfin, l'Académie appelle la recherche fondamentale et clinique française à « accroître sa visibilité internationale ». Elle estime que « des choix stratégiques, organisationnels et politiques sont nécessaires pour soutenir une recherche translationnelle en un temps où la pharmacopée, ancienne, s’accompagne d’un ratio bénéfice/risque insatisfaisant pour lutter avec efficacité contre les douleurs chroniques rebelles, très handicapantes pour les patients et très coûteuses pour la société ». 

Charlène Catalifaud

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3467