INSPIRÉ d’expériences américaines, le « hackathon », compression de « hackers » et de « marathon », vise à réunir, pendant quatre jours, des professionnels de santé et des informaticiens pour concevoir ensemble des projets innovants. Les premiers viennent avec des besoins ou des idées, et les seconds avec des solutions techniques : ils ne se connaissent pas au départ, et disposent de 50 heures pour élaborer leur projet… qu’ils pourront ultérieurement proposer à une grande entreprise ou commercialiser.
Terminant actuellement sa dernière année de pharmacie à la faculté de Chatenay-Malabry, Sébastien Jousset a raflé quatre prix lors de la rencontre strasbourgeoise, grâce à un système très innovant de lectures de bandelettes urinaires à distance, « ipipi ». Associé à des développeurs, il espère que ces distinctions lui permettront de trouver des investisseurs pour donner vie à son projet. Celui-ci est constitué d’un boîtier, capable de lire les bandelettes urinaires et d’envoyer les résultats sur le smartphone de l’utilisateur. En cas de résultat anormal, ce dernier est automatiquement prévenu par son téléphone, qui lui donne la marche à suivre. Le système permet ainsi un suivi quotidien, très utile pour certains patients ou pour les femmes enceintes. À l’image des 300 autres participants, Sébastien Jousset et ses développeurs informatiques ont passé les quatre jours de la rencontre à concrétiser cette application, dormant deux à trois heures par nuit, le tout dans une joyeuse ambiance à la fois studieuse et festive.
Des inventions pour faciliter l’observance.
Justine Roethinger, pharmacienne responsable du marketing et de la communication chez IFMO, Grégory Baader, pharmacien IFMO à Rothau, et Aurélien Chedevergne, marketeur chez Zentiva, ont obtenu le prix décerné par la société ihealth, leader mondial des objets de santé connectés, pour leur projet « I pill good » destiné à améliorer l’observance. Il se compose du « Pill clipse », pilulier embarqué dans une montre, ou attaché à un bracelet, collier, sacoche… qui contient les comprimés des patients, et connecté à une application smartphone permettant de flasher les codes Datamatrix des boîtes. Les données sont alors retranscrites et les patients peuvent paramétrer les moments de prises et des rappels. Le Pill clipse vibre discrètement pour rappeler le moment de prise des médicaments : d’une pression sur un bouton le patient envoie la confirmation de sa prise à l’application, un moyen idéal, pour les actifs pressés, de se souvenir si l’on a bien pris son médicament. Le projet pourra même faire l’objet de développements ultérieurs, avec par exemple le rappel de numéros de lots ou de périmés, de prise de rendez-vous avec son médecin ou l’envoi des données au pharmacien pour suivre l’observance.
Xavier Schneider, pharmacien d’officine installé près de Strasbourg, et responsable de l’Éducation thérapeutique du patient et de la santé connectée au sein de l’URPS Pharmaciens d’Alsace, a préparé lui aussi un projet sur l’observance, qu’il a fusionné sur place avec ceux de quatre autres équipes internationales pour donner naissance au projet « day 2 day ». Elaborée par des pharmaciens, des médecins mais aussi un jeune préparateur avec le concours de designers et développeurs, day 2 day, fonctionne grâce à des puces sans contact NFC fixées sur les blisters, qui envoient un signal à un smartphone dès que le médicament a effectivement été pris. De plus, l’application permet de recueillir et de centraliser toutes les données provenant d’autres objets de santé, et concernant par exemple l’activité physique, le sommeil ou la tension. Complémentaire du projet I Pill good, day 2 day s’adresse toutefois à d’autres types de patients, atteints d’affections longues, notamment des troubles bipolaires, ou aux personnes âgées polymédiquées. Il permet lui aussi de s’assurer de la prise des médicaments, et leurs promoteurs espèrent que ces initiatives trouveront un écho favorable auprès des autorités de santé, en raison des économies importantes qu’elles peuvent générer.
Xavier Schneider avait déjà, l’an dernier, remporté un prix lors du premier « hackathon », pour son projet de jeu éducatif sur l’obésité, « Nutribird ». Il constate que, cette année, les pharmaciens d’officine ont été beaucoup plus nombreux à s’investir dans le « hackathon », et s’en félicite : « cela montre que nous savons prendre notre avenir en main, et développer des outils qui offrent une valeur ajoutée à nos patients en répondant à leurs besoins », relève-t-il.