Débat

Déremboursement de l'homéopathie : et après ?

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Publié le 05/12/2019
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Attaquée depuis plusieurs mois, l'homéopathie vit une crise sans précédent. Réunis à Niort par le collectif MonChoixMonHoméo le 15 novembre, professionnels de santé et patients ont exprimé leurs craintes face à cette situation, mais aussi leurs espoirs pour dépasser cette épreuve.
homéopathie

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Crédit photo : phanie

Le déremboursement complet de l'homéopathie à compter du 1er janvier 2021 ne doit pas signer son arrêt de mort ; au contraire, cette épreuve doit ouvrir de nouvelles perspectives scientifiques, médicales et sociétales. Telle est la conclusion de la rencontre organisée à Niort le 15 novembre par le collectif MonHoméoMonChoix, qui a rassemblé près de 120 personnes.

Parmi les intervenants, le Dr Gérard Pacaud a appelé les professionnels de santé à rester unis, quel que soit leur choix de pratique thérapeutique. « C'est une erreur d'opposer l'allopathie et l'homéopathie », répète ce médecin retraité qui a consacré sa carrière à la recherche médicale et à l'enseignement. Auteur de plusieurs ouvrages, dont deux consacrés à l'homéopathie, il reste aujourd'hui un scientifique animé par la curiosité et l'humilité : « Le mode d'action de l'homéopathie reste un mystère parce qu'il défie nos connaissances physiques et chimiques. » Pour lui, la biologie cellulaire et la physique quantique apporteront des réponses, à condition de renforcer les travaux de recherche dans ce domaine.

Éviter la fracture médicale

Karine Thomas, médecin généraliste à Chizé (Deux-Sèvres), pratique l'homéopathie depuis 20 ans. « Je me suis intéressée à cette thérapeutique après mes études, alors qu'on commençait à parler de résistance aux antibiotiques et que j'observais régulièrement des effets secondaires causés par les médicaments traditionnels », explique-t-elle. Avec l'homéopathie, elle a découvert une autre façon de soulager, plus précise et surtout individualisée. « Je suis certaine que l'on trouvera comment fonctionne l'homéopathie. Il n'y a qu'à regarder du côté de la nanochimie et des travaux sur l'infiniment petit. » Aujourd'hui, Karine Thomas ne comprend pas le procès fait à l'homéopathie ; elle souffre surtout du rejet exprimé par ses confrères, tantôt ironique, tantôt violent. « La décision récente de l'Ordre des médecins concernant le titre de médecin homéopathe et la suppression de DU d'homéopathie dans plusieurs universités sont des décisions qui accentuent la stigmatisation de la pratique homéopathique et la fracture médicale », s'inquiète-t-elle. Car si la formation disparaît, le renouvellement des médecins homéopathes n'aura pas lieu. « L'homéopathie doit rester un médicament, et sa pratique doit rester une spécialité médicale. Le risque à terme serait de voir certains patients se détourner des médecins et des pharmaciens au profit de pseudo-soignants, avec pour conséquence une prise en charge dégradée et une perte de chance », commente Agnès Cardinet, pharmacienne rétaise et formatrice en homéopathie. L'épreuve inédite que traverse l'homéopathie aura au moins réussi le défi de rassembler médecins, pharmaciens et chercheurs autour des patients.

David Paitraud

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3563