Démographie pharmaceutique : le monde va manquer de pharmaciens

Publié le 15/10/2015
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Si le Soudan occupe rarement les podiums des classements statistiques mondiaux, il peut toutefois se flatter d’avoir été, depuis 2006, le pays où le nombre de pharmaciens a le plus augmenté : en 2006, il ne comptait que 1 488 pharmaciens pour 31 millions d’habitants, mais, trois ans plus tard, leur nombre était déjà passé à 5811, soit trois fois plus… même si cela ne fait jamais qu’un pharmacien et demi pour 10 000 habitants, près de 7 fois moins qu’en France.

Les congrès de la (FIP), dont la 75e édition vient de se tenir à Düsseldorf, sont une mine pour les amateurs de statistiques. Celles-ci, au-delà des chiffres bruts, illustrent les tendances lourdes de l’évolution de la profession : depuis neuf ans, le nombre de pharmaciens a fortement augmenté dans le monde, et avoisine les 2 millions et demi, mais la progression est très inégale selon les continents et les pays, tandis que la féminisation se développe partout. Les « décollages » rapides de certains pays africains comme, outre le Soudan, le Ghana, l’Ouganda ou le Nigeria, ne doivent pas masquer la situation dramatique d’autres pays, à l’image du Tchad, qui compte à peine un pharmacien par million d’habitants… soit mille fois moins qu’en France. Dans ces pays à la démographie très basse, les services pharmaceutiques sont assurés par des dispensaires gérés par d’autres professionnels de santé.

Malte en tête

Si Malte est le pays au monde qui compte le plus de pharmaciens par habitant, avec 800 pharmaciens pour 400 000 habitants, soit presque deux fois plus qu’en France, ce sont les pays de la Méditerranée orientale qui affichent les densités de pharmaciens les plus élevées, en particulier le Liban et la Jordanie, et, dans une moindre mesure, la Syrie, du moins avant la guerre (voir encadré). En Asie, le Japon se distingue lui aussi par sa forte densité, toujours en progression.

Depuis 2006, la Finlande, la Hongrie et le Zimbabwe ont vu leur nombre de pharmaciens diminuer de 2 à 5 %, tandis qu’il a stagné dans un grand nombre de pays sud-américains et européens, dont la France, notamment à cause de l’augmentation des départs à la retraite.

La densité des pharmaciens n’est pas forcément représentative de celle des pharmacies : il existe des pays où l’on compte quasiment autant d’autant d’officines que de pharmaciens, comme la Grèce, et d’autres où l’assistanat et le salariat sont très développés. De plus, ces chiffres concernent tous les pharmaciens en activité, y compris donc les hospitaliers, les services publics, les universitaires, les industriels et les grossistes.

Toutefois, même si la densité moyenne des pharmaciens dans le monde est passée de 700 à 850 par million d’habitants entre 2006 et 2012, cette progression ne suffira pas à compenser le déficit global de professionnels de santé sur la planète : estimé actuellement à 7 millions de professionnels, il atteindra 13 millions en 2035, avec, parmi ceux-ci, une part croissante de pharmaciens « manquants ». L’amélioration de la formation professionnelle, mais aussi le développement de nouvelles méthodes et techniques permettant de compenser les insuffisances démographiques seront indispensables pour pallier le manque de main-d’œuvre qualifiée. En outre, plus d’une cinquantaine de pays complètent la formation initiale des pharmaciens par des formations spécialisées, ou par des formations post-universitaires, sanctionnées par des diplômes complémentaires. Les pharmaciens disposent donc, globalement, d’une formation plus large et plus variée qu’au cours des décennies précédentes.

D. D. B.

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3208