ROSELYNE BACHELOT est prête à ouvrir le chantier d’une nouvelle marge pour les pharmaciens. Venue inaugurée la 25e édition du salon Pharmagora samedi dernier, la ministre de la Santé a en effet annoncé qu’elle avait demandé la constitution d’un groupe de travail pour « y voir clair sur l’évolution des marges des pharmacies ». Pour elle, il est impératif d’adapter le modèle économique de l’officine à un marché du médicament structurellement moins dynamique qu’auparavant. Et la ministre ne compte pas laisser traîner ce dossier. Les conclusions du groupe de travail seront ainsi traduites dans les faits dès le prochain projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2011. Une idée qui laisse les syndicats d’officinaux quelque peu perplexes. Même s’ils sont très demandeurs de ce changement, ils jugent toutefois le cadre du PLFSS peu adapté, voire dangereux (voir ci-dessous).
Le monopole réaffirmé.
Au-delà de l’amélioration de l’économie des officines en général, Roselyne Bachelot souhaite apporter un soutien particulier aux pharmacies rurales, dont « l’implantation est essentielle pour la santé de nos concitoyens et le dynamisme de nos territoires. » La ministre va même demander l’inscription de ce sujet à l’ordre du jour du prochain comité interministériel d’aménagement du territoire. Plus concrètement, elle entend faciliter leur installation dans les maisons médicales et examiner la possibilité de les associer aux projets de télémédecine. « La pharmacie pourrait constituer l’endroit approprié pour réaliser des téléconsultations lorsque l’offre médicale alentour se fait rare », explique Roselyne Bachelot.
La ministre de la Santé a également profité de sa visite porte de Versailles pour rappeler son attachement aux « piliers » de l’officine. Réaffirmant la place, à ses yeux, du monopole pharmaceutique en faveur de la santé publique, elle se dit satisfaite de la récente décision du tribunal de Colmar du 21 janvier dernier, concernant la campagne de communication d’une enseigne de grande distribution, en l’occurence Leclerc. De même, elle affirme qu’elle continuera à se battre pour la pérennité du maillage territorial des officines.
Civisme.
En ce qui concerne le libre accès à certains médicaments, la ministre se félicite que les pharmaciens aient joué le jeu de la diminution des tarifs. Ainsi, selon une étude qu’elle avait elle-même demandée, plus de 60 % des produits de médication officinale ont enregistré une baisse de prix, « ce qui est un résultat très satisfaisant ».
Roselyne Bachelot reconnaît également la mobilisation de la profession lors de la campagne de lutte contre la grippe A(H1N1). « L’implication de chacun d’entre vous a été exemplaire, souligne-t-elle. J’ai bien conscience que le forfait pour la délivrance des antiviraux et la distribution des masques ne compensera pas intégralement l’implication de chacun d’entre vous dans cette campagne inédite en France, ajoute la ministre. Aussi, je tiens à saluer votre civisme, qui honore votre profession. »
Autoriser la vente sur la toile.
Pour demain, elle appelle les officinaux à se saisir des évolutions induites par la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST), dont les décrets seront tous signés pour le 21 juillet 2010, date anniversaire de la promulgation du texte, affirme-t-elle. La ministre souhaite que les pharmaciens s’engagent dans des expérimentations pour mettre en place les nouvelles missions prévues par la loi : actes de prévention, de dépistage ou de suivi de patients chroniques. « J’ai demandé que soit organisée rapidement par la CNAMTS* une réunion d’information à destination des syndicats de pharmaciens, afin de mieux expliquer toutes les possibilités offertes par le fonds d’intervention pour la qualité et la coordination des soins (FIQCS) dont l’objectif est de financer des expérimentations », indique-t-elle.
La ministre se montre également déterminée à donner un cadre juridique à la vente de médicaments sur Internet. Elle prévoit une concertation sur ce sujet avec les instances professionnelles dans un bref délai. Son objectif : permettre aux officines légalement installées sur notre territoire de commercialiser les médicaments en libre accès adaptés à ce type de commerce à distance. « Les défis ne manquent pas et je sais qu’ensemble, comme nous l’avons toujours fait, nous les relèverons », conclut Roselyne Bachelot.