Un « baromètre » réalisé par un institut spécialisé pour l’ABDA, leur association faîtière, montre que 40 % des pharmaciens s’attendent à une dégradation de leur situation dans les années à venir, taux qui monte à 65 % chez les pharmaciens titulaires. Plus de la moitié de ces derniers envisagent d’ailleurs de réduire leurs investissements, et un tiers pense devoir limiter ses embauches. La question des rabais empoisonne la vie et l’ambiance des pharmaciens (voir nos éditions précédentes) bien que, selon le président de l’ABDA, Friedemann Schmidt, l’image de la profession reste excellente dans l’opinion publique, et que le nombre d’étudiants soit même reparti à la hausse. Le chiffre d’affaires a progressé de 3,4 % au cours des 6 premiers mois de l’année… mais le nombre d’officines continue à baisser.
Fonctionnant comme un véritable « parlement » des pharmaciens, avec 300 délégués élus au sein des Ordres et des syndicats régionaux, le congrès discute et vote des résolutions concernant l’ensemble de la vie professionnelle, et organise aussi des débats et des tables rondes.
À l’issue d’une longue séance sur la politique européenne, menée avec plusieurs juristes, le congrès a décidé de renforcer la présence des pharmaciens à Bruxelles, pour y mener un lobbyisme plus efficace. Déplorant, à l’image du président du tribunal administratif fédéral, que « la cour de justice européenne détienne le vrai pouvoir en Europe », les pharmaciens estiment qu’ils peuvent, en se mobilisant, faire évoluer la vision européenne de la « compétitivité », dogme sacro-saint de l’Union : « la compétitivité ne doit pas être uniquement une affaire de prix, mais doit se mesurer en termes de qualité et de proximité, des domaines où nous sommes excellents », a expliqué Mathias Arnold, un des vices présidents du syndicat national. En outre, l’ABDA appelle le gouvernement à mieux faire respecter les traités européens, en rappelant que l’organisation de la santé reste une compétence nationale et non communautaire.
Réforme de la rémunération
Le congrès demande aussi à l’ABDA de poursuivre ses travaux au profit d’une réforme de la rémunération, qui dépasserait le cadre du seul honoraire de délivrance : depuis plusieurs années, les pharmaciens sont rémunérés par un honoraire à la boîte, qui gomme certes les effets pervers de la marge, mais qui reste lié aux quantités délivrées. « Si un médecin prescrit cinq boîtes et que nous pensons qu’il n’en faut que trois, nous perdons de l’argent si nous retranchons deux boîtes : si au contraire notre honoraire était totalement indépendant du volume, nous serions plus à l’aise pour le faire », explique le groupe de travail sur ce thème, qui n’en est toutefois qu’au début de sa réflexion. Toutefois, les pharmaciens lient cette question à une véritable rémunération de leurs nouvelles missions, toujours trop faible voire inexistante. Elle doit intégrer notamment leur rôle dans l’élaboration et le suivi des « plans médicaments » pour les patients recevant plus de cinq médicaments en même temps, mais aussi pour la mise en place et le suivi des ordonnances électroniques, dossier qui a pris énormément de retard, pour des raisons de sécurité et de confidentialité.
En outre, les pharmaciens réclament une politique active de lutte contre les ruptures de stock, qui passe, selon eux, par le retour de certaines productions sur le sol européen. Ils s’élèvent par ailleurs contre les « contingentements » pratiqués par l’industrie pour certains médicaments, tout en admettant qu’ils ont leur part de responsabilité dans cette affaire : « certains pharmaciens achètent beaucoup de médicaments juste pour les revendre ensuite, c’est immoral et anticonfraternel et nous devons dénoncer ces comportements », a déclaré M. Schmidt.
Comme chaque année, le congrès s’est déroulé parallèlement au salon Expopharm, sur lequel « le Quotidien » reviendra plus en détail dans ses prochaines éditions.