LES GÉNÉRIQUES sont régulièrement la cible d’attaques venues de tous horizons. Parfois de l’industrie pharmaceutique, dès lors qu’elle se sent menacée par une échéance brevetaire importante, comme l’expliquait récemment au « Quotidien » le président du GEMME*, Pascal Brière (notre édition du 24 mai). D’autres fois par les prescripteurs qui, après plus de dix ans, acceptent toujours difficilement le droit de substituer accordé aux officinaux. Et l’on voit régulièrement fleurir une étude ou un rapport, comme celui de l’Académie de médecine, affirmant que l’efficacité, la qualité et la sécurité des génériques ne sont pas les mêmes que celles des princeps. Mais pour beaucoup, ces attaques sont infondées et freinent le développement des génériques en France, pourtant source d’importantes économies pour l’assurance-maladie (1,4 milliard d’euros en 2011). Selon la Caisse nationale d’assurance-maladie (CNAM), le taux de substitution en France stagne autour de 72 % en avril 2012, alors qu’il avait atteint, sur le répertoire de l’époque, 79 % fin 2010. « Il faut gommer les bruits de fond qui nous empêchent de substituer », estime ainsi Gilles Bonnefond, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Le Pr François Chast, chef du service de pharmacie clinique, pharmacologie et toxicologie de l’Hôtel Dieu, à Paris, ne dit pas autre chose. Pour lui, il est nécessaire de lutter contre la désinformation. « Nous devons en finir avec les rumeurs concernant les médicaments génériques, les faux bruits et la calomnie », explique le président honoraire de l’Académie de pharmacie.
Chasser les doutes.
L’étude présentée la semaine dernière par la CNAM devrait permettre de chasser les doutes qui continuent de peser sur l’efficacité de ces médicaments. L’organisme payeur a en effet comparé l’efficacité du princeps et des génériques d’un des poids lourds de la prescription, la simvastatine 20 mg. Pour cela, elle a suivi pendant environ deux ans (entre 2008 et 2010) près de 100 000 patients traités par l’anticholestérol (87 % par le générique et 13 % par le princeps). L’objectif : étudier lequel des deux médicaments permettaient de mieux éviter la survenue d’événements cardio-vasculaires graves (infarctus, accident vasculaire cérébral) et de décès. Le résultat est sans appel : « il n’y a pas de différence constatée d’efficacité entre le princeps et les génériques de la simvastatine 20 mg », conclut la CNAM, qui entend mener la même étude pour la classe des antihypertenseurs. « Notre travail ne fait que confirmer un fait extrêmement connu », souligne le Pr Hubert Allemand, médecin-conseil national à la CNAM. En effet, explique-t-il, les études publiées récemment par les principales revues scientifiques montrent également une absence de différence en termes de résultats cliniques et d’effets secondaires entre princeps et génériques. « Celles-ci ont porté sur les antiépileptiques, un anticoagulant (la warfarine) et neuf classes de médicaments cardio-vasculaires** », précise Hubert Allemand.
Lever les réticences.
Ces résultats ne surprennent pas le directeur général de l’Agence national de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), le Pr Dominique Maraninchi. Pour lui, c’est clair, ce n’est pas parce que les génériques sont moins chers que ce sont des médicaments au rabais, ni en qualité, ni en sécurité. Il souligne également qu’il n’y a pas plus d’effets secondaires avec un générique qu’avec un princeps. Par ailleurs, le Pr Maraninchi rappelle que, depuis trois ans, toutes les données concernant le clopidogrel sont passées au crible, et que, à ce jour, aucune différence entre « original et copies » n’a été mise en évidence. « Le discours ambiant sur le générique est souvent lié à des impressions et repose pour beaucoup sur de l’irrationalité, ajoute François Chast. Depuis une quarantaine d’années, nous avons l’expérience des génériques et de la substitution à l’hôpital et plus aucun hospitalier ne se pose aujourd’hui la question de la sécurité de ces médicaments. » Même le Pr Jean-Paul Giroud, membre de l’Académie de médecine, en convient : « il n’existe pas de différence entre générique et princeps. »
L’étude de la CNAM et ces prises de position devraient enfin mettre un terme à la polémique et lever les réticences à la substitution. Et peut-être faire hésiter des médecins toujours tentés d’apposer la mention « non substituable » sur leurs ordonnances (voir ci-dessous). En tout cas, cette étude tombe à pic pour les officinaux dont la convention fraîchement signée prévoit des objectifs de substitution individuels et un taux national ambitieux de 85 % pour 2012.
** Bêtabloquants, diurétiques, inhibiteurs calciques, antiagrégants plaquettaires, statines, inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine, alphabloquants, antiarythmiques, warfarine.
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