Des prix de médicaments différents d'une officine à l'autre, y compris au sein d'un même groupe… C'est l'un des défis commerciaux auquel doit faire face le pharmacien russe.
« En fonction de la marque, une plaquette de paracétamol pour être vendue de 5 à 300 roubles (de 8 centimes à 4,45 €, ndlr) »,O explique Denis Chentsov, responsable de l'informatique décisionnelle (business intelligence) au sein du groupement de pharmacies 36.6. Acteur majeur des officines dans les régions de Moscou et Saint-Pétersbourg, 36.6 exploite un réseau de 1 782 officines (une chaîne discount, l'autre haut de gamme) développant environ 750 millions d'euros de chiffre d'affaires.
Prix libres
Sur le marché russe, la question du prix du médicament est scrutée de près par la population. À l’exception d'une liste d'environ 600 médicaments jugés essentiels et vitaux par les autorités* (platypilline, drotaverine, ondansétron, acide glycyrrhizique, phospholipides et acide glycyrrhizique, lactulose…) ainsi que la prise en charge de maladies graves (cancer, tuberculose, Sida, Hépatite B et C, diabète…) et orphelines, les prix des médicaments sont libres. Or, rien qu'au premier semestre 2017, le prix de ces médicaments, majoritairement importés, a augmenté de 7,6 % selon les chiffres cités par l'agence d'information TASS.
Ainsi, selon un rapport de l'ambassade de France en Russie rédigé en 2015, « le marché se décompose en quatre segments d’importance inégale : la vente de médicaments dans les réseaux de pharmacies représente près de 60 % du marché (675 Mds RUB en 2014, 10 Mds €), la vente de produits parapharmaceutiques, 16 % du marché (183 Mds RUB, 2,7 Mds€), les achats de médicaments par les hôpitaux, environ 18 % (210 Mds RUB, 3,1 Mds€) et les commandes de médicaments passées par l’État, environ 8 % du marché (84 Mds RUB, 1,25 Md€) ». Une analyse qui ne prend pas en compte la part de la contrefaçon qui, selon l'OMS, représente de 12 à 15 % du marché.
Ventes sur Internet
« Dans ce contexte, il est crucial pour nous de ne pas surstocker. C'est pourquoi nous avons entièrement revu la façon de dresser nos inventaires, qui comportaient jusqu'ici de nombreuses erreurs », poursuit l'expert informatique russe. Pour mener à bien ce travail, 36.6 s'est adjoint les services de la société américaine SAS, spécialiste de l'analyse des big data. Résultat, depuis quelque mois, 36.6 réalise chaque semaine une analyse de ses stocks contre une fois par mois auparavant. Les entrées et sorties de médicaments au sein de chaque officine sont ainsi analysées plus finement afin de mieux anticiper les réassorts. En outre, l'utilisation d'un tel outil permet également d'avoir un œil sur le prix des médicaments appliqué par la concurrence en surveillant, de façon automatique, ses sites Internet.
« Il faut nuancer les données brutes car, en général, les médicaments proposés par les officines sur Internet sont vendus moins cher qu'à l'intérieur de la pharmacie. Chez 36.6, nous appliquons ainsi une réduction moyenne de 10 % », soutient Denis Chentsov, qui précise que la commande sur Internet en Russie oblige le patient à se rendre en pharmacie pour chercher son traitement.
Rotation des stocks optimisés
« Grâce à ces innovations, si les ventes sont restées sur la même tendance à la hausse, nous avons multiplié par 1,5 la rotation des stocks tout en diminuant les volumes entreposés », avance Denis Chentsov. À présent, fort de ces outils d'analyses, le groupe russe va, comme dans la grande distribution mondiale, travailler la question du prix de médicaments en se servant de certains comme produits d'appel… Une stratégie qui permet de répercuter la hausse générale des prix subie sur d'autres médicaments à plus forte marge.
*http://apps.who.int/medicinedocs/documents/s19766ru/s19766ru.pdf.
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