« POUR UN BELGE, la part laissée à sa charge, même d’un médicament remboursé, reste supérieure au prix total du même médicament chez nous. Il vient donc l’acheter chez nous », constate Catherine Lebrun, pharmacienne à Wattrelos (Nord). Pour elle, cependant, la clientèle belge reste peu significative. Il n’en va pas de même des officines les plus proches de la frontière, en particulier au nord de la métropole lilloise, mais sans doute aussi depuis Bray-Dunes (Nord), à l’ouest, jusqu’à Mont-Saint-Martin (Meurthe et Moselle), à l’est. Les Français sont connus pour franchir la frontière pour acheter tabac et alcool, les Belges le sont moins pour les médicaments, mais le pratiquent pourtant assidûment.
« C’est vrai depuis des années, et je l’ai toujours connu, depuis vingt deux ans que je tiens cette officine, affirme Anne Magnet, également pharmacienne à Wattrelos, à moins de cinq cents mètres de sa consœur, et encore plus proche de la frontière. De nombreux médicaments sont moins remboursés, ou pas remboursés en Belgique, et leur prix de base est plus cher que chez nous. Des médecins belges envoient même leurs patients en France avec une ordonnance. »
20 à 30 % de la clientèle.
« J’ai demandé à mon comptable de me quantifier cette clientèle, explique Évelyne Herman, à Neuville-en-Ferrain. En nombre de clients, les Belges comptent pour environ 20 %, mais leur panier moyen est plus faible. Ils achètent notamment des sirops et des pastilles, non remboursés, et ils ont des ordonnances pour des somnifères ou des tranquillisants, moins chers ici. Nous avons des clients belges habitués, qui viennent régulièrement renouveler leurs prescriptions. » Cette pharmacienne constate aussi que le phénomène est ancien : une partie de sa clientèle belge est, de ce fait, âgée, mais cet attrait concerne aussi des plus jeunes.
À l’officine de Véronique Lauwerie, à Comines, les Belges représentent 20 à 30 % de la clientèle. « Ils viennent pour des produits plus chers chez eux, avec ou sans vignette. Ils achètent des contraceptifs. Les maisons de retraite prennent des médicaments contre la constipation, comme le Movicol, trois fois plus cher en Belgique qu’en France, ou le Forlax. Les Belges achètent aussi des médicaments pour la circulation, comme le Daflon, deux fois plus cher chez eux, du paracétamol, certains hypnotiques. Je sais que certains médecins belges rédigent deux ordonnances : une pour ce qui est remboursé par la Sécurité sociale belge, l’autre pour acheter en France. Nous avons même coordonné les prescriptions, les ramenant à 28 jours, comme c’est la règle en France, alors qu’eux pouvaient prescrire pour trois mois. » Les Belges qui fréquentent cette officine ne sont pas dépaysés : leur ville porte le même nom de Comines, de l’autre côté du pont qui enjambe la Lys. Mais Véronique Lauwerie tient à préciser que la clientèle belge est importante « en nombre de clients, plus qu’en pourcentage de chiffre d’affaires ».
Un des premiers hypers de France.
« Nous avons pas mal de clients belges », convient de son côté Karine Kaciaf, titulaire de la pharmacie Saint-Jacques, dans la galerie marchande de l’hypermarché Auchan de Roncq. Situé au nord de la métropole, à portée de flèche de la frontière, cet hyper de 15 000 m2, qui réalise 300 millions d’euros de chiffre d’affaires, est classé quatrième des hypers de France par la presse spécialisée. Sa foire aux vins, en septembre, est un monument qui attire la clientèle belge en masse. Il n’est pas étonnant que la pharmacie de la galerie en profite. Karine Kaciaf cite elle aussi le Daflon, le Movicol (4,83 euros en France, 13 euros en Belgique !), le Forlax, mais aussi des médicaments contre le cholestérol. « Ils viennent avec des ordonnances, mais cherchent le moins cher. Nous avons beaucoup de clients fidèles, parce qu’ils viennent régulièrement à Auchan, précise la pharmacienne. Ils en profitent pour venir également tous les mois à la pharmacie pour renouveler leurs prescriptions, et leur médecin les envoie chez nous pour cela. Mais pour les médicaments remboursés en Belgique, ils achètent chez eux. »
Les pharmaciens frontaliers de la métropole lilloise analysent bien leur attractivité vis-à-vis de leurs voisins belges. On peut supposer que les buralistes belges en font de même vis-à-vis des fumeurs français (dont ils acceptent les chèques, un mode de paiement peu courant en Belgique). De façon curieuse, l’analyse vaut moins pour la clientèle elle-même. On peut pourtant supposer qu’elle diminuera à mesure que l’intégration européenne s’affirmera.
Industrie pharmaceutique
Gilead autorise des génériqueurs à fabriquer du lénacapavir
Dans le Rhône
Des pharmacies collectent pour les Restos du cœur
Substitution par le pharmacien
Biosimilaires : les patients sont prêts, mais…
D’après une enquête d’UFC-Que choisir
Huit médicaments périmés sur dix restent efficaces à 90 %