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Homéopathie : le débat s'enflamme

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Publié le 13/09/2018
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Depuis plusieurs mois, l'homéopathie est au cœur d'un vif débat entre promoteurs et détracteurs de la médecine des semblables. Tandis que la Haute Autorité de santé (HAS) doit évaluer l’efficacité de l’homéopathie et le bien-fondé de son remboursement d’ici à la fin février 2019, chacun fait valoir ses arguments.
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Crédit photo : GARO/PHANIE

Le débat autour de l’homéopathie s’est de nouveau enflammé ces derniers jours. La tribune signée par 124 professionnels de santé parue en mars dernier dans « Le Figaro », par laquelle ils invitaient les soignants à ne pas utiliser « leur titre pour promouvoir des pratiques dont la science n'a jamais prouvé l'utilité, voire qui présentent une certaine dangerosité », avait mis le feu aux poudres. Aujourd’hui, c’est la décision de deux universités de retirer de leur programme le DU (diplôme universitaire) d’homéopathie qui ravive la polémique.

La faculté de Lille a en effet décidé la semaine dernière de suspendre cet enseignement « dans l’attente de la position de la Haute Autorité de santé (HAS) [sur le remboursement] et d’échanges nationaux sur l’encadrement de cette pratique et de son enseignement ». Quelques jours plus tard, la faculté d’Angers lui emboîtait le pas. Le doyen de la faculté de Lille 2, Pr Didier Gosset, explique au « Quotidien du Médecin » que cette suspension n'est pas une mesure dirigée contre les médecins homéopathes mais vise les traitements. « La médecine enseignée à la faculté est fondée sur les preuves et l'homéopathie reste pour le moment au stade de doctrine, affirme-t-il. Les études sur l'efficacité des granules sont peu nombreuses et peu solides. Or on présente souvent l'homéopathie comme efficace. Il faut avoir de l'éthique et mener une réflexion scientifique et pédagogique. » Du côté de la faculté d’Angers, le doyen, le Pr Lerolle, indique qu’« en l’absence de preuve scientifique, nous ne voulons pas endosser la responsabilité d’une formation qui permettrait l’affichage d’un diplôme de l’université pour une pratique qui n’est pas validée ». Toutefois, le doyen a demandé à un groupe de médecins, de pharmaciens, de sociologues, de philosophes et de sages-femmes de réfléchir à une nouvelle formation, qui pourrait être proposée dès l'année prochaine, et « qui permette à des praticiens confrontés à des demandes de médecine non conventionnelle de pouvoir apporter une réponse éclairée aux patients ».

Quoi qu'il en soit, les décisions de suspension de ces DU font bondir les médecins homéopathes, leur syndicat national, le SNMHF, dénonçant même une « chasse aux sorcières ». « Juger l'homéopathie avant l'avis de la HAS, c'est incohérent. Il n'y a aucune urgence, sauf peut-être médiatique », s’insurge son président, le Dr Charles Bentz. De leur côté, les présidents d'université et les doyens des facultés de médecine et de pharmacie jouent l’apaisement. Dans un communiqué commun, ils estiment qu'il faut continuer l'enseignement universitaire de l'homéopathie, tout en soutenant « une démarche d’évaluation objective » telle que celle menée par la HAS.

Que ce soit chez les médecins ou chez les pharmaciens, la question déchaîne les passions. Le dernier congrès de la Fédération internationale pharmaceutique (FIP) à Glasgow (Écosse) a ainsi été le cadre d'un vif débat entre partisans et adversaires de l'homéopathie (notre édition du 10 septembre). « Les pharmacies devraient cesser de vendre des médicaments homéopathiques », ont estimé 62 % des pharmaciens ayant participé à un atelier sur « le grand débat de l’homéopathie ». À l’inverse, interrogés il y a quelques semaines sur notre site Internet, le quotidiendupharmacien.fr, près de 7 confrères sur 10 (67 %) se déclaraient, eux, opposés au déremboursement de l'homéopathie. Le débat ne semble pas près de s’éteindre.

Christophe Micas

Source : Le Quotidien du Pharmacien: 3456