LE TAUX de pénétration des génériques avoisine aujourd’hui les 80 %. Toutefois, il existe des disparités importantes entre les molécules. La société de conseil Smart Pharma Consulting, a cherché à comprendre les raisons de la résistance de certains princeps à la concurrence des génériques. Pour y parvenir, elle a interrogé des pharmaciens d’officine*, autour des cas particuliers de la rispéridone (Risperdal), du fentanyl (Durogesic) et de la buprénorphine (Subutex). Trois médicaments indiqués dans des pathologies complexes et/ou sévères.
Pour le fentanyl, le pharmacien et le patient seraient tous deux les principaux responsables du faible taux de substitution de la molécule, relève l’enquête. En effet, dans près de 7 cas sur 10, l’officinal ne propose pas le générique ; et quand il le fait, le malade le refuse 6 fois sur 10. Pour la buprénorphine, le patient est de loin le principal obstacle à la substitution (refus du générique 6 fois sur 10). Pour ce produit, le comportement du médecin est également déterminant, puisque 4 ordonnances sur 10 portent la mention « non substituable », rapportent les titulaires interrogés. Ces derniers reconnaissent également que la non-proposition de génériques du fentanyl vient essentiellement du fait qu’ils n’en ont pas en stock. Autre élément à prendre en compte, selon Smart Pharma Consulting : la barrière réglementaire que constituent les restrictions à la substitution imposées par l’AFSSAPS**. En ce qui concerne la buprénorphine, la réticence des pharmaciens provient principalement des refus fréquents qu’ils rencontrent. Essayent-ils pour autant de convaincre les récalcitrants ? Généralement non, note Jean-Michel Peny, président de Smart Pharma Consulting. Cependant, lorsqu’ils s’y emploient, ils parviennent à faire tomber les réticences une fois sur cinq pour la buprénorphine et près d’une fois sur deux pour la rispéridone.
Encore aujourd’hui, les motifs de refus invoqués par les patients restent majoritairement la crainte d’une moindre efficacité du générique. Les influences négatives de leur médecin n’y sont pas non plus étrangères. Enfin, certains patients mettent en avant, pour la buprénorphine, une galénique moins pratique ou moins agréable du générique.
Plus de moyens.
Les officinaux interrogés regrettent, par ailleurs, que les fabricants ne leur donnent pas suffisamment de moyens permettant de faciliter la substitution de ces trois molécules. Alors même que les laboratoires de princeps sont parfois plus actifs pour promouvoir leurs spécialités génériquées auprès des pharmaciens. Interrogés sur la possibilité de substituer prochainement certains traitements immunosuppresseurs, les pharmaciens craignent d’essuyer de nombreux refus, en raison de la sévérité de la pathologie traitée. En revanche, la substitution de traitements contre la maladie d’Alzheimer leur paraît plus aisée, l’achat se faisant souvent par les proches et non par les patients eux-mêmes.
« Bien que très favorable au générique, le pharmacien peut limiter sa démarche de proposition de la substitution notamment lorsque les ventes du princeps sont trop faibles pour justifier la constitution de stocks importants et mobiliser l’équipe officinale », conclut Jean-Michel Peny. Il en est de même, poursuit-il, « dans les cas de pathologies sévères ou complexes, associées à de fortes douleurs ou lorsque le patient est en fin de vie ». Enfin, analyse le président de Smart Pharma Consulting, il arrive au pharmacien de ne pas proposer un générique tout simplement parce qu’il anticipe, à tort ou a raison, un refus du malade.
** Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.
Retrouvez l’étude de Jean-Michel Peny intitulée « Comment expliquer la résistance de certaines marques aux génériques ? » sur notre site Internet.
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