AU DÉBUT du mois de mars, un patient consommant régulièrement de l’oméprazole fabriquée par Ratiopharm s’étonne, en relisant la notice, de voir qu’elle ne correspond pas au conditionnement indiqué sur la boîte. Il s’en ouvre à son pharmacien, qui lui-même contacte le grossiste, puis le laboratoire. Ce dernier fait immédiatement retirer les lots concernés après avoir découvert qu’il s’agissait de copies, certes « presque parfaites », mais ne provenant pas de ses usines (voir le « Quotidien » du 18 mars 2013). Deux semaines plus tard, d’autres contrefaçons d’oméprazole, similaires aux premières, sont découvertes dans les lots distribués par le laboratoire Hexal, puis par un troisième fabricant de moindre importance.
Après s’être d’abord dirigée vers les grossistes, l’enquête a finalement permis de remonter à des intermédiaires et à des importateurs et réimportateurs. Elle a débouché, fin mars, sur l’interpellation de deux personnes à Hambourg, parallèlement à la découverte, dans un hangar, de lots falsifiés. Ces copies, jugées d’excellente qualité par les laboratoires eux-mêmes, étaient fabriquées en Espagne, puis introduites frauduleusement dans la chaîne du médicament, en contournant les mesures de sécurité des grossistes, qui les ont donc, sans le savoir, distribuées aux officines. Il y a quelques jours, six autres personnes ont été interpellées dans la même affaire, et la justice estime maintenant que le trafic pouvait avoir commencé il y a deux ans, voire plus. D’autres produits pourraient d’ailleurs avoir fait, eux aussi, l’objet de contrefaçons similaires, estiment les enquêteurs qui restent toutefois extrêmement discrets sur l’ampleur réelle de cette affaire, de même d’ailleurs que les laboratoires et grossistes concernés.
Ces oméprazoles n’en sont pas moins considérées par les pharmaciens comme l’affaire de contrefaçons la plus grave qu’ait connue l’Allemagne. De plus, elle ne concerne pas, comme c’est souvent le cas, des produits « lifestyle » achetés sur Internet, mais des médicaments très courants vendus en officine. Cela amène les autorités sanitaires et pharmaceutiques à réclamer des contrôles de sécurité plus sévères, alors même que l’Union européenne a adopté des règlements dans ce sens, qui doivent encore être transcrits dans les législations nationales. Beaucoup d’experts relèvent que cette affaire pourrait n’être que le début d’une dérive beaucoup plus importante, qui doit donc être enrayée avec la plus grande vigueur. Et elle pose aussi le problème de la complexité croissante des circuits de distribution qui, comme dans d’autres affaires récentes liées à la sécurité alimentaire, rendent le traçage et le suivi des produits beaucoup plus difficile qu’autrefois.
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