Trop, c’est trop. Il ne se passe pas une semaine en Haïti sans que, parmi ses 11 millions d'habitants, un patient soit victime du mésusage du médicament, d’un produit de contrefaçon, ou tout simplement d’un médicament périmé. Lydolph Bauzil, jeune pharmacien haïtien, et quatre de ses confrères et consœurs hospitaliers et officinaux, animateurs de la page Facebook « Allô Pharma » (communauté de 5 730 personnes), sont bien décidés à se faire entendre. Sous la bannière « Pote Kole, Kole zepo », ce qui veut dire en créole haitïen, « pour nous soutenir, soutenez notre congrès », ils appellent à rejoindre leur mouvement. Ils profitent en effet du congrès national des pharmaciens haïtiens, du 27 au 29 juin, pour tirer la sonnette d’alarme et jouer leur rôle de pharmaciens, spécialistes du médicament.
Au-delà même des Caraïbes, Lydolph Bauzil lance un appel tous les pharmaciens francophones afin qu’ils l’aident à relayer des messages de sensibilisation contre le mésusage du médicament et la contrefaçon qui sévissent dans son pays. Ce jeune pharmacien, dont la sœur aînée a elle-même été victime d'un médicament de contrefaçon il y a sept ans, égrène les cas les plus récents : « En mars dernier, un patient a pris un comprimé de Clarithromycine 500 mg qui était en réalité du glyburide ; en novembre 2018, une fillette de 5 ans a été victime d’un faux Sérum antitétanique (SAT)… »
Un appel aux bonnes pratiques
Pierre Hugues Saint-Jean, président de l’Association des pharmaciens de Haïti (APH) a sollicité les pouvoirs publics dans le cadre de la création d’une brigade de la lutte contre le trafic de faux médicaments. Car ces produits, on l’aura compris, ne sont pas distribués dans les quelque 170 pharmacies légalement répertoriées sur l’île. En l’absence de système de Sécurité sociale, la population se fournit auprès de vendeurs à la sauvette, principalement dans les bus. Ces « agents de marketing » comme ils se baptisent eux-mêmes cèdent pour moins d’une gourde, la monnaie locale, des produits de contrefaçon. Parmi eux, un médicament réputé miracle « qui, à lui seul, peut traiter hernies, fibrome, kystes, cancers, flatulences, ulcères, infection de l’appareil génital, diabète, et même le sida pour ne citer que cela », dénonce Lydolph Bauzil. Et de poursuivre « l'automédication en Haïti est un danger qui fragmente la population en miettes de silence ».
La porosité de la frontière avec la République dominicaine, la situation insulaire permettant aux trafiquants d’accoster aisément, mais aussi l’inertie des pouvoirs publics ainsi qu’une législation inadaptée pour lutter contre les circuits pharmaceutiques parallèles, ont accentué le phénomène au cours des dernières années. Par ailleurs, 147 des 170 pharmacies du pays sont concentrées dans l’ouest du pays, ne laissant à la population d’autres choix que de s’approvisionner auprès de circuits parallèles. Une situation similaire à bien des pays africains (voir notre édition du 13 juin 2019).
Un appel aux confrères francophones
Devant le désarroi de ses concitoyens que la pauvreté pousse à l’incrédulité, le jeune diplômé, qui se veut ambassadeur de sa profession, demande à tous les professionnels de santé de soutenir la campagne de sensibilisation. Sur les ondes radio et de télévision et sur la page Facebook « Allô Pharma », chaque jour, un dentiste, un médecin ou encore un pharmacien témoigne. À l’instar de Pierre Hugues Saint-Jean, Wisbert Vilson, également pharmacien, Tamara Petit-Homme, médecin, Sabalat H. JR Dalce, dentiste, ou encore Rachelle Constant, infirmière, relatent des cas de certains patients victimes de la contrefaçon et apportent leur contribution pour une « bonne pratique pharmaceutique en Haïti ».
Lydolph Bauzil souhaite donner une envergure internationale à cette campagne en demandant à des pharmaciens français, ou francophones, d’appuyer la démarche en faisant part de leurs recommandations par mail à allpharmht@gmail.com ou sur la page Facebook « Allô- Pharma ».
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