FACE AUX déremboursements successifs et au ralentissement du marché des médicaments remboursables, l’automédication prend une place plus grande dans le comportement des Français, dans l’espace officinal (en particulier devant le comptoir) et dans l’esprit des laboratoires pharmaceutiques. L’étude que vient de mettre à disposition le cabinet d’études Precepta note une amélioration continue au cours de ces dernières années. Si ce marché représente encore « moins de 7 % des dépenses totales de médicaments en France », alors même que cette proportion est de 12 % à l’échelle européenne, il a progressé en cumul entre 2005 et 2008 de 17 %, « soit un rythme de progression annuelle de l’ordre de 5 %, supérieur à celui du marché du médicament remboursable ».
Le comportement français - bien qu’ancré dans l’habitude du remboursement des soins, dans la consultation médicale et dans un système de dispensation sécurisé - évolue aujourd’hui vers une plus grande autonomie. Trois facteurs l’y incitent.
C’est, en premier lieu, l’effet mécanique des déremboursements, comme observé en 2006 et 2008, qui devrait se poursuivre avec de nouvelles vagues en 2010-2012. Face à la situation préoccupante des comptes sociaux, de nouvelles baisses de remboursement ont été annoncées pour un certain nombre de médicaments dont le service médical rendu (SMR) a été jugé insuffisant.
Des mesures plus drastiques.
Il s’agit en priorité des vasodilatateurs, « qui avaient échappé aux vagues précédentes », mais également de spécialités telles que « l’antiseptique Hexomédine, le décontractant musculaire Coltramyl, le traitement contre l’herpès Zovirax crème, etc. ». Le cabinet Precepta prévoit d’ores et déjà de nouveaux déremboursements pour les pathologies dites bénignes, ainsi que des mesures plus drastiques dans le cadre de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2011.
En deuxième lieu, les Français sont rassurés par la mise en place d’un cadre sécurisé et transparent, largement mis en avant avec des mesures telles que le libre accès, depuis juillet 2008, ou la promotion du parcours de soins coordonné où le pharmacien fait figure de premier recours et dont le périmètre d’action a été élargi (loi HPST). Des éléments qui « participent au transfert d’une part croissante des dépenses de soins courants vers les ménages et les complémentaires santé ».
Enfin, les groupes pharmaceutiques revoient leur business model pour faire de la médication officinale un axe de développement stratégique. Premiers défis à relever : communiquer, innover, rendre sa marque incontournable. Reste ensuite à s’adapter à la réorganisation du paysage officinal. Car, si le marché laisse une place à de nombreux acteurs, le cabinet Precepta note qu’il évolue « en faveur des leaders mondiaux de l’automédication disposant de marques fortes et susceptibles de soutenir des investissements massifs dans la communication et le développement de nouveaux services ».
Prédateurs potentiels.
En conséquence, les groupes plus centrés sur le conseil du pharmacien, pour la plupart des laboratoires français, seraient désavantagés. « Seuls les acteurs disposant de la capacité financière suffisante pour faire face à une inflation des investissements promotionnels et publicitaires tiendront le choc », analyse Precepta. Cela expliquerait les derniers mouvements marquants d’acquisition (Bayer et Roche, Johnson&Johnson et Pfizer, Reckitt Benckiser et Boots) et la reprise des fusions acquisitions (Pfizer et Wyeth, Merck&Co et Schering-Plough, Abbott et Solvay, etc.). De ce fait, Precepta considère désormais sanofi et GSK comme de potentiels prédateurs. Ils ont fait de l’automédication un secteur de prédilection afin de se diversifier « vers des activités moins risquées » ; ils devront savoir « accompagner les logiques de différenciation au sein du réseau officinal » (développement d’enseignes, stratégies de spécialisation, nouveaux services, valorisation du rôle du pharmacien) pour se différencier à leur tour. Aux laboratoires de « tirer parti des nouvelles logiques de référencement des pharmaciens », sous l’influence croissante de diverses structures de regroupements, des complémentaires santé et des génériqueurs.
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