AVEC 300 000 UNITÉS vendues en 2010 pour un chiffre d’affaires de 9 millions d’euros, le segment qui réunit eaux fraîches, eaux de Cologne, eaux de toilette et eaux de parfum n’est certes pas le plus important de la pharmacie. Le circuit, en effet, ne concentrerait pas plus de 1 % des ventes du marché national en valeur, la plus grande part revenant aux chaînes de parfumeurs (près de 75 %) devant les grands magasins, les parfumeries indépendantes et le duty free. Mais le rayon des senteurs est sans doute le plus propice aux voyages immobiles, au cœur d’univers sensoriels enchanteurs. Le véhicule à emprunter pour explorer ces contrées imaginaires ? La fragrance. Pulvérisant tous les records de vitesse jamais accomplis, elle dépose n’importe quel individu instantanément au milieu des contrées fantasmagoriques les plus diverses. Seule condition au transport, une grande inspiration.
Et nous voilà transportés aux portes de la tradition, dans un décor au charme désuet fait de lavande, œillet, violette, rose, "extra-vieille" côté femmes, ou encore vétiver et tabac pour ces messieurs. « C’est un marché de niche dont la majeure partie de la clientèle est plutôt âgée, indique Bertrand Sonnier, à la tête des eaux de Cologne Jardin de France. Il y a encore une dizaine d’années, nous fournissions les pharmacies en bonbonnes de 10 à 15 litres et les personnes venaient recharger leur flacon en verre de 500 ml directement à la source ! ». Aujourd’hui, ce sont les petites contenances qui emportent le marché à plus de 60 %. « Le grand standard pour les eaux de Cologne c’est le flacon de 100 ml, surtout en vaporisateur, sans parler du format nomade 50 ml qui tend à se développer. » Des contenances étudiées pour séduire un public plus jeune à l’intention duquel de nouvelles fragrances ont été créées. Elles figurent, depuis, au catalogue permanent des fabricants : on ne présente plus les senteurs thé vert et gingembre, très en vogue il y a quelques années et qui sont venues enrichir une palette partagée entre accents fruités (pamplemousse, orange…) et exotiques (ylang ylang, lotus, hibiscus…). Depuis, et depuis toujours d’ailleurs, les créateurs ne cessent de combiner les notes, donnant naissance à autant de mondes olfactifs. Jardin de France va ainsi lancer sa toute nouvelle gamme Étoffes de parfum à la rentrée. Inspirée des précieuses étoffes, les nuances féminines évoquent la soie, la dentelle et le velours, le cuir et le tweed pour les hommes. « Il s’agit d’eaux de parfums présentées en petits flacons (100 ml et 50 ml) », précise Bertrand Sonnier, l’idée étant de préparer la période de Noël où s’effectue le plus gros des ventes. L’intention est aussi celle de proposer un produit directement issu de l’univers du luxe, puisque l’eau de parfum affiche, aux côtés du parfum, les plus fortes concentrations en senteurs, les plus légères étant réservées aux eaux de Cologne, eaux de toilette et eaux fraîches.
Cap sur l’officine.
D’autres fabricants ont décidé de jouer d’emblée la carte du parfumeur. Huong Mangin a ainsi créé en 2009 une gamme exclusivement composée d’eaux de parfums, L’Essence des Notes, qu’elle a réservée au seul circuit pharmaceutique - la parapharmacie étant impliquée dans une moindre mesure. Avec 9 fragrances élaborées pour couvrir toute la « famille » olfactive qui existe en parfumerie, elle s’est lancée à la conquête du public de l’officine. « J’ai voulu mettre un produit de luxe à la portée du plus grand nombre grâce à une gamme de qualité proposée à prix abordable, soit 50 % moins cher qu’en circuit sélectif. » Le pari ne manque pas d’audace, mais il relève aussi d’une stratégie bien pensée. Car l’officine est riche en points de vente et la concurrence des grands parfumeurs y est inexistante. Huong Mangin se considère d’ailleurs seule sur son segment de marché : « Je pense avoir introduit un nouveau produit en pharmacie, à savoir un vrai parfum aux senteurs suffisamment variées pour que chacun puisse trouver sa signature olfactive et ce en toute sécurité puisque nos produits sont testés. » Référencée dans 370 officines, la gamme connaît des destins variés mais se développe toujours dans les pharmacies qui adhèrent au concept. « Certaines en sont à leur 10e réassort. Il faut y croire et savoir la conseiller », souligne la fondatrice, qui met l’accent sur la marge importante que le produit dégage : 40 % au minimum !
Même foi en l’officine chez Roger & Gallet, qui n’a jamais renié un partenariat entamé il y a 60 ans grâce à l’eau de Cologne Jean-Marie Farina. Récemment, la marque a renforcé sa présence aux points de vente en développant le concept d’accompagnement sensoriel des produits. « L’idée est de multiplier les occasions de découvrir nos senteurs aux moyens d’échantillons et de testeurs », explique Benoît Beyls, directeur général Roger & Gallet France. Cette politique aurait contribué à l’augmentation de 20 % en valeur constatée au début de l’année sur le rayon de la parfumerie. Un marché où la marque leader, presque monopolistique, laisse peu de place à une variété d’acteurs pourtant non négligeable : Thomas Guinamand et sa large gamme d’eaux de toilette et eaux de Cologne Claude Galien ; Acorelle (Odysud) et sa gamme d’eaux de parfum et d’eaux fraîches certifiées Bio, mais aussi les eaux de Cologne Berdoues…
« Une partie du marché est très disparate, avec des acteurs qui peuvent se développer localement. » La marque Roger & Gallet réalise 50 % de son chiffre d’affaires grâce aux eaux parfumées, à savoir eaux de Cologne et eaux fraîches. « En parfumerie, la tendance est aux concentrations les plus légères. Des produits aux notes fraîches (hespéridés et agrumes), sans fortes tenues, étudiés pour une utilisation en friction aux périodes estivales. » De ce fait, ce sont les grandes contenances qui sont développées par la marque, jusqu’à 500 ml, voire un litre.
L’air du temps.
L’autre moitié des ventes Roger & Gallet provient des produits de soin et d’hygiène. Les fameux savons et gels douche, bien sûr, mais aussi et surtout les soins dérivés des dix lignes parfumées : crèmes et laits corporels, crème mains et une huile corporelle, dernier lancement de la marque sur un segment en plein développement. « Les huiles corporelles ont gagné 20 % en valeur au cours de l’année 2010 », précise Benoît Beyls, en soulignant le leadership de son Huile Sublime sur l’entière gamme Roger & Gallet. Un succès qui répond à une franche tendance à la recherche des petits gestes plaisir et qui est illustré par le développement de tous les produits légèrement parfumés, comme les eaux d’abondance, les savons et les huiles corporelles aux senteurs prononcées : « L’huile, après le lait corps, correspond à un nouveau geste légèrement parfumant et capable d’apporter un bien-être au quotidien. » Lierac a pu le constater après le succès remporté l’an passé par son Huile Sensorielle aux 3 fleurs blanches qui, cette année, est secondée d’une eau parfumée hydratante (Eau Sensorielle) dans la même ligne. Autres gammes où les senteurs sont reines, celles de Nuxe et Caudalie qui, toutes deux, abritent des eaux parfumées : nouveau trio d’eaux fraîches (Fleur de vigne, Zeste de vigne et Thé des vignes) chez Caudalie et les notes Fruits du soleil et Fruits épicés pour les eaux fraîches 100 % naturelles Bio Beauté by Nuxe. On ne présente plus les soins solaires et après-soleil Polysianes (Klorane) au monoï de Tahiti, ainsi que l’huile corporelle au jojoba chez Dermagor, le parfum tiaré étant à l’œuvre dans la gamme Hei Poa, tandis que Laino (Gilbert) présente sa nouvelle Eau Fraîche par nature.
Le plaisir que procure le parfum ne se borne pas à la sphère corporelle. L’air ambiant peut aussi s’en imprégner et bénéficier au bien-être émotionnel, voire à la santé physique. C’est là qu’entrent en scène les huiles essentielles qui, diffusées dans l’atmosphère, visent généralement à assainir l’air ambiant, soulager le système respiratoire ou relaxer l’individu. « On est à la frontière entre un parfum d’intérieur et un produit actif », explique un fabricant. Les puissantes substances végétales ont ainsi retenu l’attention de plusieurs fabricants : Naturactive décline 6 senteurs de brumes aux huiles essentielles (relaxation, tonique, assainissante, respiratoire, transport, équilibre), toutes d’origine biologique, et propose deux diffuseurs, fonctionnant par chaleur douce ou nébulisation à froid ; Sanoflore cultive la puissance olfactive des huiles essentielles au sein de la gamme SOS, faite de 3 sprays actifs concentrés (coups de froid, relaxation, pureté) 100 % naturels ; Arkopharma référence le spray Arkorespir pour le bien-être respiratoire et Le Comptoir Aroma (Sabiluc) propose deux sprays ambiants assainissants…
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