Robert Sidje aime les gens. Attaché à mettre ses connaissances au service de ses semblables, ce diplômé de la faculté de Rouen promotion 1995 le répète à l’envi : « C’est la raison pour laquelle j’ai choisi de faire pharmacie. » Après des années en tant que pharmacien adjoint dans sa région d’origine et « une petite expérience dans l’industrie chez Dolisos » (racheté depuis par Pierre Fabre, puis par Boiron), Robert Sidje devient titulaire en 2007, en reprenant la pharmacie du centre commercial des Carmes, dans le quartier des Mézereaux à Melun.
Mais les années passent et les autres commerces ferment les uns après les autres. Jusqu'à la boulangerie, en juillet 2019, après un incendie ayant partiellement touché la pharmacie. Désormais seul dans le centre commercial, l'irréductible Robert Sidje ne baisse pas le rideau. Ni les bras. Après quelques jours de nettoyage et de réparation, il est fidèle à son poste, refusant d’abandonner ses patients. C’est d’ailleurs tout naturellement qu’il a repris l’association ACTIM, créée par son prédécesseur, dès son arrivée à Melun, pour aider les habitants à s’intégrer. Si l’association n’est plus active depuis deux ans, Robert Sidje n’a pas arrêté l’accompagnement mis en place, aidant ses patients à déchiffrer des courriers qui n’ont souvent rien à voir avec leur santé et les orientant vers les bonnes démarches.
« Je suis très impliqué dans leur vie personnelle et ils ne m’ont pas lâché quand ma pharmacie était le dernier commerce du centre commercial. » À demi-mot, Robert Sidje reconnaît que les dernières années avant le transfert ont été difficiles. Il a dû se résoudre à se séparer de ses deux préparateurs. Puis son adjoint a eu le Covid et a décidé de ne pas revenir. Seul avec une rayonniste, il a continué à accueillir les patients, notamment des familles pour qui il peut être difficile de payer certains restes à charge… qu’il réglait alors de sa poche, « pour leur santé ».
Engagement humain
Heureusement, le transfert de sa pharmacie a été validé à 300 mètres de là, dans le même quartier. En octobre 2020, Robert Sidje a été le premier à emménager dans un nouvel espace en rez-de-chaussée d’immeuble dans le cadre d’un programme de rénovation urbaine mené par la ville. Il a dû essuyer les plâtres, l’absence d’électricité et de téléphone les premiers jours, mais il est ravi de son nouvel espace de travail, « aménagé pour que les patients s’y sentent bien ». Déjà, un café s’est installé à proximité immédiate, une boulangerie, une pizzeria et une épicerie sont attendues d’ici peu, ainsi qu’une boucherie, une supérette et un cabinet médical à plus ou moins long terme. Les débuts ont été d’autant plus compliqués que le transfert a eu lieu en pleine deuxième vague du Covid, et que Robert Sidje était submergé de demandes en gel hydroalcoolique qu’il fabriquait pour les médecins, les infirmiers et ses patients. Ensuite, il a évidemment répondu présent pour réaliser les tests antigéniques et les vaccins. « Il est important de s’impliquer dans toutes les missions demandées par les autorités, et aussi toutes les nouvelles missions des pharmaciens, que ce soit pour le suivi des patients ou la vaccination contre la grippe saisonnière. »
Un engagement humain sans faille qui a fini par payer. Touché d’avoir été « adopté par les habitants du quartier », le titulaire n’a jamais envisagé de partir. Aujourd’hui, il est satisfait d’avoir pu étoffer son équipe d’un pharmacien adjoint et de deux préparateurs. « Je vis mon rêve de pharmacien : une vie simple au service des autres qui me permet de subvenir aux besoins de ma famille. » Une famille qui devrait s’enorgueillir d’ici quelques années d’un nouveau pharmacien, Robert Sidje ayant transmis sa vocation à son aîné, qui a, lui aussi, « l’amour de ses semblables » chevillé au corps.