Les deux organisations y rappellent leur volonté de réduire l’impact des déchets pharmaceutiques, y compris les résidus de médicaments disséminés dans l’environnement, mais aussi de développer des pharmacies plus « vertes ».
La RPS a déjà publié des recommandations sur la « résilience » des pharmacies pour les aider à réduire leur propre impact carbone. De plus, selon sa présidente, Claire Anderson, les pharmaciens peuvent favoriser l’avènement de politiques de santé plus respectueuses de l’environnement. Actuellement, on estime que l’ensemble des structures et services de santé émet 4 à 5 % des gaz à effet de serre produits dans le monde. Un quart de ces gaz est lié aux activités hospitalières, 15 % à la médecine de ville, les transports liés aux activités sanitaires en représentant eux aussi une part importante.
Certains pharmaciens britanniques veulent aller plus loin dans leur mobilisation, à l’image de Tracy Taylor, pharmacienne hospitalière qui a rejoint la branche « Doctors » de l’association Extinction Rebellion, connue pour ses coups d’éclat spectaculaires justifiés par « l’urgence de la situation ». Déterminée à faire évoluer les méthodes de travail dans la pharmacie et la santé, elle souligne par exemple que les gaz anesthésiants représentent à eux seuls 5 % des émissions de carbone du système de santé britannique, mais que leur nocivité pour la couche d’ozone varie de 1 à 7 selon les substances utilisées. De même, les hydrofluorocarbones contenus dans les inhalateurs doseurs (MDI) génèrent « plusieurs milliers de fois plus » de gaz à effets de serre que le CO2, alors que ces dispositifs peuvent être remplacés par des inhalateurs à poudre sèche inoffensifs pour l’environnement.
Vers une pharmacie durable
En Allemagne, beaucoup de pharmaciens veulent eux aussi agir concrètement, et plusieurs d’entre eux ont créé dans ce but le mouvement « Pharmacists for future ». Parmi eux, une jeune pharmacienne, Esther Luhmann, vient de publier un livre intitulé « la pharmacie durable », édité par un éditeur spécialisé dans la pharmacie. Elle y aborde les conséquences qu’aura le réchauffement sur la santé, partageant l’idée que « la santé de la planète et celle de ses habitants sont indissociables », et rappelle qu’avec 3,3 millions de contacts quotidiens par jour, les pharmaciens sont idéalement placés pour sensibiliser la population à ces défis. Son ouvrage aborde ensuite tout ce que peuvent faire les officinaux pour atteindre la neutralité carbone, en commençant par l’aménagement de leur pharmacie, son éclairage et son chauffage avec des énergies renouvelables. On peut, de même, remplacer les livraisons en voiture par des livraisons à vélo ou en véhicule électrique, mais aussi réduire ses déchets - pharmaceutiques ou autres - ou choisir des vêtements professionnels et du mobilier « durable », sans parler bien entendu des activités au préparatoire, d’ailleurs déjà largement couvertes par une législation très stricte. « Une pharmacie moyenne émet 25 tonnes de CO2 par an », explique-t-elle, ce qui est certes une goutte d’eau par rapport aux 730 millions de tonnes émises chaque année en Allemagne, mais c’est aussi avec des petits gestes que l’on peut protéger le climat et, surtout, faire changer les mentalités.
Les pharmaciens dans leur ensemble sont d’ailleurs de plus en plus conscients de ces défis et le souvenir des dramatiques inondations qui ont endeuillé la Rhénanie en juillet reste vif au sein de la profession : 65 officines ont été totalement ou partiellement détruites durant ces crues exceptionnelles, largement attribuées au changement climatique. L’association fédérale des pharmaciens, l’ABDA, consacrera d’ailleurs son prochain congrès annuel, en septembre 2022, aux défis posés par le réchauffement climatique aux pharmacies et à la santé.