L’iode, nous en mangeons tous les jours, il est présent dans bon nombre d’aliments : produits de la mer, lait de vache, beurre, fromage, œufs, lard, bacon, viande de porc ou de mouton… Le sel de table en contient de 10 à 15 µg/g, beaucoup de produits diététiques en contiennent également, de même que de nombreux médicaments, qu’il s’agisse de produits antiseptiques ou de contraste nécessaires à la réalisation de certains examens médicaux.
« Cette notion d'allergie à l'iode impliquerait que l'atome iode soit l'allergène responsable, alors que les réactions sont dues aux produits qui accompagnent cet atome ; il serait plus exact de parler d'allergies aux produits iodés », rectifie le Pr Annick Barbaud, dermato-allergologue à l'hôpital Tenon (Paris). La faune marine en est un bel exemple. Elle peut en effet être à l’origine de réactions allergiques parfois sévères, toutefois l’iode n’a jamais été mis en cause, alors que de nombreux autres allergènes ont été identifiés. L’allergène principal des poissons est la parvalbumine. En raison de sa thermostabilité, les allergies peuvent être déclenchées par des produits frais ou cuits et persister même dans les fumets. Un autre des grands allergènes cachés dans les poissons est l’anisakiase, qui est un ver responsable de 40 % des allergies aux poissons. Dans les œufs de poisson et le caviar, l’allergène identifié est la vitellogénine. Chez les crevettes et les crustacés, l’allergène principal est une protéine musculaire, la tropomyosine, dont la structure présente une grande homologie avec un épitope retrouvé chez les acariens, les blattes et les escargots, entraînant des risques d’allergies croisées. Quant à la très rare urticaire inductible à l’eau de mer, elle est liée au degré de salinité de l’eau de mer et non à l’iode.
Les allergies aux médicaments iodés
Avec les produits antiseptiques iodés, il est plus fréquent d’observer une irritation à un pansement occlusif qu’une véritable allergie. L’allergie de contact aux antiseptiques contenant de la povidone iodée est liée aux excipients dont le nonoxynol. « Les chocs anaphylactiques aux antiseptiques iodés, rapportés en milieu opératoire, étaient tous liés à la povidone avec prick tests positifs et des IgE anti-povidone, aucun n’était dû à l’iode », précise l'allergologue.
En revanche, les allergies aux produits de contraste iodés sont insuffisamment connues. La plupart des réactions sont immédiates, à type d’urticaire, angiœdème, asthme, hypotension et arrêt cardiorespiratoire. Les réactions retardées sont très variées : exanthème maculopapuleux, érythème, desquamation palmoplantaire et les DRESS (drug reaction with eosinophilia and systemic symptoms). « Le déterminant antigénique aux réactions retardées pourrait être une chaîne « carbamoyle » commune à plusieurs produits de contraste comme à d’autres médicaments tels que des antigrippaux et le céfuroxime. Les réactions immédiates seraient davantage liées à l’hyperosmolarité des produits responsable d’une dégranulation massive des mastocytes », explique le professeur. Selon elle, seules les réactions urticariennes ou anaphylactiques doivent être testées. Il est inutile de tester les sujets allergiques aux poissons, aux crustacés ou à la povidone iodée, ainsi que les sujets atopiques ou ayant présenté, lors de précédents examens, des manifestations classiques non graves (flush, prurit, nausées, rhinorrhée, érythème localisé).
En conclusion, la dermatologue confirme que « l’allergie à l’iode n’existe pas, seule l'allergie aux produits iodés est en cause » et elle rappelle que l’iode est un élément naturel essentiel à la vie et indispensable à la synthèse des hormones thyroïdiennes.
D’après une communication du Pr Annick Barbaud dans le cadre des Journées dermatologiques de Paris (JDP) en version virtuelle. Édition 2020.