Ce congrès a été largement dominé par les enseignements que la profession a su tirer de la pandémie. Parmi les exemples récents de l’évolution rapide des compétences dans le monde, les pharmaciens québécois viennent d’obtenir le droit de prescrire « tout médicament utile contre le Covid ».
Reste que, comme l’expliquait par exemple le président des pharmaciens de Malaisie, Jack Shen Lim, « nous avons renforcé notre rôle, y compris en matière de vaccination et de télépharmacie, mais il faudra savoir conserver ces acquis, notamment pour les services en ligne où les médecins sont très présents ». Autre question récurrente, quel sera l’avenir des pharmaciens une fois la pharmacie totalement numérisée ?, s’est interrogé le pharmacien irlandais Paul Fahey. De nombreux conférenciers prédisent l’avènement de services pharmaceutiques « mixtes », associant présence humaine et intelligence artificielle, tant à l’hôpital qu’en officine, et l’enjeu reste donc, pour les pharmaciens, de garder la maîtrise de ces derniers.
Hôtes du congrès, les pharmaciens espagnols estiment avoir su « faire du Covid une opportunité », en s’adaptant aux exigences de santé publique et aux besoins de la population. De la dispensation de médicaments hospitaliers en officine à la mise en place de protocoles de dépistage en passant par la prévention des violences domestiques et de l’isolement social, « nous avons été là pendant toute la crise », se félicitent-ils. Pour le président du conseil de l’Ordre espagnol, Jésus Aguilar Santamaria, « nous sommes désormais beaucoup mieux placés pour renforcer notre position vis-à-vis de notre système national de santé, mais il reste de nombreux chantiers ouverts ». Selon lui, l’Espagne est aujourd’hui « le pays le plus avancé en matière de nouveaux services numériques pharmaceutiques ». L’ordonnance électronique est généralisée depuis 2017 et le pays dispose de plusieurs outils pour prévenir les ruptures de stock, sujet lui aussi au centre du congrès. À côté du système de détection précoce des ruptures de stock CISMED, développé conjointement par la France, l’Espagne, l’Italie et le Portugal, les 52 provinces espagnoles ont mis en place un service d’échanges local, « Pharmahelp », qui permet aux officines d’une même zone de se réapprovisionner entre elles en cas de besoin, ce qui réduit la durée et la gravité de ces pénuries.
« Nous devons partager nos expériences avec les pays moins avancés dans ces domaines pour qu’ils puissent eux aussi les concrétiser », ont rappelé les responsables de la FIP. Son président, le Suisse Dominique Jordan, voit dans la santé mentale et la vaccination des enfants deux nouveaux champs d’action pour les pharmaciens : « les dépressions et les troubles anxieux ont augmenté de 25 % depuis l’émergence du Covid, et la couverture vaccinale des enfants recule dramatiquement », souligne-t-il. Dans les deux cas, les pharmaciens sont bien placés pour repérer précocement ces troubles et remédier aux déficits vaccinaux, ont montré de nombreux projets et initiatives menés par les pharmaciens à travers le monde.