LA LOI HPST (Hôpital, patients, santé, territoires), dont les décrets d’application sont encore en attente, instaure de nouvelles missions pour l’officine. Il s’agit notamment de la prévention, du dépistage ou de l’incorporation du pharmacien référent au sein des EHPAD (établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes). Cette activité en cours d’expérimentation consiste à établir une liste de médicaments à utiliser de façon préférentielle, à vérifier les prescriptions, à suivre les consommations pharmaceutiques. Un rôle qui semble taillé sur mesure pour l’adjoint, lui permettant d’étendre son expertise, en lien avec le comptoir. Mais qui dit expertise, dit responsabilité. La question est de savoir si ce nouvel espace professionnel va ouvrir de nouveaux risques et de nouvelles responsabilités pour les adjoints. Dès à présent, les responsabilités officinales sont multiples, et même cumulables. Pour un même fait, par exemple une erreur dans la dispensation d’un médicament, elles peuvent être engagées au plan civil, pénal, et disciplinaire.
- La responsabilité civile
Elle s’applique à tout citoyen lors d’un dommage causé à une victime. Pour l’invoquer, celle-ci doit apporter la preuve de la faute, du dommage et du lien de causalité entre les deux. La personne incriminée doit répondre des conséquences de son acte devant une juridiction civile (tribunal d’instance ou de grande instance). Elle peut être condamnée à verser des dommages et intérêts, dont le montant est fixé par le juge. La responsabilité civile est large puisqu’elle concerne aussi la négligence et l’imprudence du commettant, de même que les dommages causés par des personnes placées sous son autorité. C’est ainsi qu’en principe, la responsabilité civile engagée par l’action d’un adjoint s’applique à son titulaire, du fait du lien de subordination entre les deux. L’employeur ne peut se soustraire à cette responsabilité, même en faisant valoir que son subordonné ne s’est pas conformé à ses ordres exprès. Le titulaire doit donc souscrire un contrat auprès d’un assureur qui se substitue à lui pour le versement de dommages et intérêts à la victime. Ce contrat doit couvrir le titulaire, mais aussi son ou ses adjoints, son ou ses remplaçants, tout comme l’ensemble de l’équipe (préparateurs, étudiants, stagiaires). La souscription d’une telle assurance est obligatoire depuis la loi du 4 mars 2002 sur le droit des malades. Selon le Code de la santé publique (article L. 1 142-21), cette obligation s’applique aux « activités de prévention, de diagnostic ou de soins ». La responsabilité civile concerne donc toutes les activités officinales, tant la dispensation au comptoir qu’au domicile du patient. Elle porte à la fois sur les médicaments et le matériel médical qui pourraient être acheminés à domicile, que cette livraison soit occasionnelle ou régulière. Les livraisons régulières ne sont pas garanties. À noter : le véhicule utilisé à cet effet doit être assuré par l’entreprise. Si elle est la propre voiture du salarié, mention doit en être faite à l’assureur. Certains contrats proposent de couvrir les déplacements des collaborateurs de l’officine avec leur véhicule, à condition qu’ils restent occasionnels. Les pharmaciens adjoints doivent vérifier qu’une assurance a bien été souscrite et que leur embauche dans l’entreprise est signalée. En particulier, il faut vérifier qu’il n’y ait pas de clauses d’exclusion ou de plafonds de garanties qui risqueraient de réduire la portée du contrat. En principe, les adjoints n’ont pas besoin de contracter une assurance pour responsabilité civile. Il y a un cas particulier : les pharmaciens amenés à faire des remplacements de longue durée. On peut alors contester le lien de subordination avec le titulaire puisqu’il n’est pas présent pour contrôler le travail effectué. Selon la jurisprudence de la Cour de cassation, la responsabilité civile d’un employé (condamné ou non au plan pénal) peut être engagée lorsque l’infraction a été commise de manière intentionnelle, fut-ce sur ordre de l’employeur. Il peut s’agir de comportements dépassant le cadre de la fonction officinale, comme dans le cas de la vente d’anabolisants sans ordonnance. Cependant, les adjoints bénéficient d’une indépendance professionnelle. Cela « devrait les inciter, même si la loi ne les y oblige pas, à contracter une assurance de responsabilité civile professionnelle », indique la jurisprudence.
- La responsabilité pénale
Elle suppose qu’il y ait une infraction au Code pénal ou au Code de la santé publique. Le pharmacien adjoint est évidemment responsable des fautes qu’il commet, à titre personnel ou professionnel. La responsabilité pénale est examinée par des juridictions comme le tribunal de police ou le tribunal correctionnel, voire la Cour d’assises. La sanction prononcée est la condamnation à une amende, à une peine d’emprisonnement (avec ou sans sursis), ou aux deux. Au plan pénal, il peut y avoir mise en danger de la vie d’autrui, atteinte involontaire à l’intégrité d’autrui, homicide involontaire, omission de porter secours. Une faute peut également porter sur la violation du secret professionnel. Au Code pénal, s’ajoutent les dispositions du Code de la santé publique, qui portent notamment sur l’exécution fidèle de l’ordonnance, les conditions de délivrance des médicaments ou l’inscription à l’ordonnancier. Il n’est bien sûr pas possible de souscrire une assurance contre les condamnations pénales. Cependant, certains assureurs proposent de couvrir les dépenses liées à la défense du souscripteur. Et selon un arrêt de la Cour de cassation d’octobre 2006, un salarié peut demander à son employeur le remboursement des frais engagés pour assurer sa défense à un contentieux pénal dont l’objet était lié à l’exercice de ses fonctions. De son côté, le titulaire peut être mis en cause, même s’il n’est pas l’auteur des faits reprochés, notamment s’il a manqué de surveillance vis-à-vis de son personnel (Cour de cassation d’octobre 2006). Il peut, dans ce cas, tenter d’invoquer une délégation de pouvoir, donc de responsabilité. Mais il est admis, en général, que la délégation de pouvoir s’exerce dans des entreprises de dimension plus conséquente qu’une officine.
- Les responsabilités disciplinaire et administrative
La responsabilité disciplinaire s’exerce lorsqu’il y a eu manquement à un devoir professionnel, que le pharmacien (inscrit à l’Ordre) a enfreint la moralité ou la légalité. Les présidents du Conseil national, d’un Conseil central ou d’un Conseil régional peuvent invoquer cette responsabilité. Un pharmacien inscrit à l’un des tableaux de l’Ordre peut également saisir l’instance. La responsabilité disciplinaire est appréciée par les Conseils de l’Ordre, et notamment le Conseil central de la section D réuni en chambre de discipline. Ce dernier rend une sentence susceptible d’appel devant le Conseil national de l’Ordre. Les sanctions prononcées par la juridiction disciplinaire sont : l’avertissement, le blâme, l’interdiction temporaire (avec ou sans) sursis et l’interdiction définitive d’exercer la pharmacie. Il n’y a pas de sanction pécuniaire. Cette responsabilité professionnelle est très large. Elle peut être mise en œuvre à chaque manquement à un devoir professionnel ou à une erreur de délivrance. Car selon le Code de santé publique (article R4235-12), « tout acte professionnel doit être accompli avec soin et attention ». Fort de son indépendance professionnelle, l’adjoint doit refuser d’exécuter des actes contraires au Code de la santé publique. Sa responsabilité est engagée en cas de faute du personnel qualifié placé sous son autorité, dont il surveille l’exécution du travail. Il faut alors que ces attributions soient mentionnées par écrit. Au cas où il y aurait plusieurs adjoints, il faut indiquer pour chaque absence lequel aura autorité sur les autres. Les instances ordinales apprécient dans quelle mesure un pharmacien est responsable des actes professionnels accomplis par un adjoint. Les responsabilités disciplinaires de l’un et de l’autre peuvent être simultanément engagées.
Par ailleurs, les fautes, abus, fraudes et tous les faits intéressant l’exercice de la profession à l’occasion des prestations servies aux assurés sociaux sont soumis à une section des assurances sociales. Il s’agit du contentieux disciplinaire de la Sécurité sociale. Les peines encourues sont l’avertissement, le blâme et l’interdiction temporaire ou permanente de servir des prestations aux assurés sociaux. Peu d’adjoints ont été mis en cause sur ce plan.
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