Le quotidien du pharmacien. - Lors d’une récente interview, vous avez souligné l’importance, dorénavant, de recourir à un audit lors de l’achat d’une officine. Pourriez-vous nous donner plus de détails ?
Philippe Becker. - En effet, l’audit d’une officine n’est pas une pratique très courante et c’est bien dommage. Les auditeurs sont surtout des experts-comptables, qui peuvent se faire aider par des informaticiens, des avocats, des pharmaciens ou encore des inventoristes. Ils interviennent actuellement dans deux cas spécifiques : en préalable à la vente d’une société d’officine ou de parts pour le compte du ou des acquéreurs, et également lorsque le nouveau titulaire d’une pharmacie a le sentiment d’avoir été trompé sur les qualités du bien acheté.
En pratique, qui est habilité à faire un audit comptable ?
Christian Nouvel. - S’il s’agit d’un audit comptable à proprement parler, on fera appel à un professionnel qualifié et donc à un expert-comptable ou un commissaire aux comptes. C’est une garantie pour le pharmacien, car ce professionnel va engager sa signature.
S’il s’agit de problématiques particulières, il faut faire appel à un professionnel spécialisé. Le titulaire doit recourir à un professionnel qualifié pour avoir des résultats probants qui lui permettront, le cas échéant, d’envisager une action en justice.
Mais attention : le terme d’audit est souvent galvaudé et utilisé par des consultants qui n’ont parfois aucune qualification ou aucune expérience du secteur. Le pharmacien doit impérativement demander des références avant de s’engager avec un professionnel.
Existe-t-il des normes pour la pratique de l’audit et si oui, lesquelles ?
Philippe Becker. - L’auditeur applique des normes professionnelles qui peuvent varier suivant les objectifs donnés. La première chose est de déterminer avec le client demandeur ce qu’il souhaite. Ce n’est d’ailleurs pas toujours facile. Par exemple, l’acquéreur d’une société doit définir le champ des investigations de l’auditeur, d’abord pour éviter une facture d’honoraires trop élevée et aussi parce que tout ne doit pas nécessairement être audité.
Comment travaille l’auditeur et sur quelles bases ?
Philippe Becker. - Dans la presque totalité des cas, le vendeur de l’officine a un expert-comptable, et l’on peut donc légitimement penser que la comptabilité et les états produits (bilan et compte de résultats) sont établis selon les normes professionnelles. Par conséquent, l’auditeur doit plutôt s’attacher à vérifier des aspects qui ne sont pas forcément examinés par l’expert-comptable mais qui peuvent avoir une incidence sur l’avenir de l’entreprise. Il peut s’agir par exemple d’un litige caché avec un fournisseur ou un salarié, de la perte probable d’un marché de fourniture à une maison de retraite, ou de pratiques non conformes aux prescriptions du code la santé publique.
C’est aussi la raison pour laquelle l’auditeur n’hésite pas à faire appel à des spécialistes lorsque les points à contrôler sont hors du champ de ses compétences. Bref, l’auditeur va plus loin que le simple examen des documents habituellement fournis à l’acheteur par le vendeur.
Quel est le prix moyen d’une mission d’audit pour une pharmacie d’environ 1,5 million d’euros de chiffre d’affaires ?
Christian Nouvel. - Le coût d’un audit est proportionnel au temps passé par les différents intervenants. Les taux de facturation varient entre 150 euros et 300 euros hors taxes de l’heure selon le niveau de technicité et de qualification. Il s’agit d’un prix moyen, et la meilleure façon d’éviter l’angoisse de la facture est de demander un devis précis.
En résumé, quel est l’intérêt et l’objectif de l’audit pour le monde de l’officine ?
Philippe Becker. - C’est une sécurité pour l’acquéreur d’une pharmacie et pour son banquier. L’audit devrait désormais être systématiquement demandé en cas d’acquisition, car les enjeux financiers, fiscaux et sociaux peuvent être importants.
L’audit permet d’avoir une vue d’ensemble des zones de risques de l’officine, dans la mesure où son intérêt est justement de mettre à jour ce qui est caché - je pense notamment aux mauvaises pratiques professionnelles. Une perte significative de chiffre d’affaires ou un litige sur le bail peuvent avoir des conséquences irrémédiables pour la survie de la pharmacie. Ceci est encore plus vrai dans le contexte économique actuel, très difficile pour de nombreuses pharmacies.
Près de 40 % du chiffre d’affaires
Médicaments chers : poids lourds de l’activité officinale
Les concentrations continuent
Hygie 31, Giropharm : grandes manœuvres au sein des groupements
Valorisation et transactions en 2023
La pharmacie, le commerce le plus dynamique de France
Gestion de l’officine
Télédéclarez votre chiffre d’affaires avant le 30 juin