Réseaux sociaux, gare aux dérapages :
En dehors de l’entreprise, l’employeur n’a en principe aucun droit de regard sur les agissements privés des salariés. Mais attention aux réseaux sociaux qui donnent l’impression virtuelle de pouvoir tout dire, abrité derrière un écran. Ainsi, le directeur artistique d’une agence de publicité avait posté sur un site accessible à tous : « La direction est drastique à tous points de vue. Salaire minimum, aucune prime, ni même d’heures sup' payées, sauf celles du dimanche pour les téméraires ! Le client est roi en toutes circonstances, peu importe qu’il faille travailler à perte, et votre travail sera parfois descendu devant le client. Rien n’incite à la motivation, si ce ne sont que les promesses jamais tenues. » Pas d’injures, de mots grossiers ou vulgaires, mais des critiques qui visent directement l’entreprise et portent atteinte à sa réputation. La faute grave a été retenue. Le litige porté devant les tribunaux, les juges ont relevé le caractère excessif des propos en soulignant que les termes « déloyaux et malveillants à l’égard de l’employeur » justifiaient le licenciement du salarié. De manière générale, Facebook et Twitter sont considérés comme des espaces publics. Mieux vaut faire profil bas ou appliquer « la règle du 4X3 » suggérée par un avocat cité dans TTSO (Time To Sign Off, 19 février 2020) : « C'est bien simple, pour ce qui est du partage sur le Net - que ce soit un mail, une vidéo ou autre - je dis à mes clients, il n'y a qu'une règle : ne partager QUE ce que vous seriez OK pour voir en affiche de 4 mètres sur 3 devant l'entrée de votre bureau. »
L'hyper-connexion, danger !
Consulter Facebook pendant son temps de travail, scroller sur Twitter ou envoyer des SMS sont des actes relevant de la vie privée que les salariés effectuent couramment au travail. Cet usage d’internet qui sort de la sphère professionnelle constitue une tolérance et doit rester « raisonnable ». En cas de connexions internet privées excessives avec son smartphone ou avec les outils informatiques de l’entreprise, le salarié s’expose à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’à son licenciement. Reste à savoir où placer le curseur de l’usage excessif ? La chambre sociale de la Cour de cassation a par exemple validé le licenciement d’un salarié qui s’était connecté 800 fois en un mois, dont 200 fois en seulement une semaine. À l’inverse, dans une autre affaire, un salarié avait envoyé plus de 1 000 tweets, sans lien avec son activité professionnelle, en 16 mois de travail. Les juges ont fait le calcul et considéré que l’usage n’était pas excessif car les tweets représentaient un temps très limité, moins de 5 minutes par jour de travail. Le comportement du salarié n’était donc pas fautif et ne pouvait justifier son licenciement. L’employeur a été condamné à lui verser plus de 17 000 euros d’indemnités. C.Q.F.D., tout est une question de dose.
La vidéosurveillance, sans ingérence :
Le fait pour l’employeur d’utiliser « un système qui place les salariés sous une surveillance permanente est disproportionné », avertit la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) dans une décision du 5 décembre 2019 rendue publique et mettant en demeure une entreprise de 14 salariés. Avec 14 caméras, dont 2 filmant en continu un poste de travail correspondant à la caisse du magasin et un emplacement pour la préparation des commandes, ce dispositif excessif constitue « une ingérence dans la vie privée des salariés ». Prévenue, l’entreprise n’est pas sanctionnée mais a 2 mois pour redimensionner son dispositif afin que cesse ce caractère « intrusif ». Passé ce délai, elle s’expose à une sanction administrative pouvant atteindre 4 % de son chiffre d’affaires ou 20 millions d’euros. À l’officine, les caméras ne doivent pas viser les collaborateurs sur leur poste de travail, les zones de pause ou de repos, les vestiaires, la zone d’accès aux toilettes, le local d’orthopédie, etc. Les salariés, comme les clients, doivent être informés de l’existence d’un système de vidéosurveillance. Cette transparence ne peut être flouée sous peine de sanctions. Le Code pénal prévoit jusqu’à un an d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
Le secret des correspondances personnelles :
Recevoir un courrier privé, postal ou électronique, sur son lieu de travail ou sur son téléphone professionnel n’est pas interdit. Mais il faut savoir que l’employeur peut l’ouvrir. Sauf si le courrier est clairement identifié comme « privé ». Le seul nom du salarié destinataire n’est pas suffisant. La mention « perso » ou « personnel » doit apparaître sur le courrier, ou en objet du mail ou du SMS s’il s’agit d’une correspondance électronique. À défaut, le courrier est présumé avoir un « caractère professionnel ». La même règle s’applique aux fichiers informatiques. À savoir, le dossier « Mes documents » qui accueille par défaut tous les fichiers sur un ordinateur n’est pas considéré comme appartenant à la personne qui utilise le poste informatique. De même, le répertoire portant le prénom du salarié n’est pas suffisant pour considérer que ces documents sont personnels. Il faut impérativement la mention « personnel » qui constitue la ligne blanche à ne pas franchir. Maintenant, vous êtes prévenu !
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