DÉBUT 2011, on annonçait que la réforme du diplôme de préparateur en pharmacie pourrait être effective à la rentrée 2012. Mais, en fin d’année, des désaccords persistaient entre les différentes parties prenantes, causant une panne de la réforme. Deux années ont passé et cette réforme tant attendue n’est toujours pas sur les rails. « Nous n’avons pas avancé comme nous le souhaitions, mais nous n’avons jamais arrêté de travailler sur ce dossier, que ce soit au sein de la Commission paritaire national de l’emploi et de la formation professionnelle (CPNEFP) ou au sein des différents syndicats », remarque Philippe Denry, ancien président de la CPNEFP et représentant la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), aussi bien dans cette commission qu’au sein de la Commission des préparateurs en pharmacien et des préparateurs en pharmacie hospitalière.
Effectivement, tout le monde continue à travailler avec un objectif commun : obtenir une formation de trois années en conservant l’apprentissage sous forme salariée. « La CPNEFP s’est saisie du dossier en 2008 et il y a rapidement eu un consensus entre chambres patronales et organisations syndicales de salariés sur cette réforme », se souvient Olivier Clarhaut, secrétaire fédéral FO Pharmacie. La direction prise par les syndicats patronaux et d’employés a légèrement évolué, notamment depuis quelques mois à travers un travail mené en commun avec les représentants des préparateurs hospitaliers.
Niveau de diplôme.
« À l’époque, nous travaillions avec les ministères de l’Éducation nationale, de la Santé et les inspecteurs en pharmacie, mais, après un grand nombre de travaux, la proposition du ministère de la Santé se cantonnait à une réforme du brevet de préparateur (BP) par un BTS. Ce qui ne correspond en rien aux besoins de cette formation puisque nous avons calculé 1 500 heures de formation nécessaires couplées à l’alternance salariée telle qu’elle existe aujourd’hui », note Daniel Burlet, le président de la CPNEFP. Cela revenait à demander au CPNEFP de revoir à la baisse le contenu de la formation des préparateurs, « un contenu décidé en fonction des attentes, aussi bien des pharmaciens employeurs que des préparateurs », comme le rappelle Jean-Marie Fonteneau, lui aussi ex-président de la CPNEFP et représentant la CGT. Alléger le contenu pouvait aussi signifier une perte d’heures passées en entreprise et une absence d’évolution du niveau de diplôme.
« La grande majorité des étudiants qui intègrent actuellement la formation sont des bacheliers. Or, après formation, ils ont toujours le même niveau de diplôme, un niveau IV. Nous n’abandonnerons pas nos fondamentaux : une formation de 1 500 heures avec une alternance salariée, ce qui demande bien une durée de formation sur trois années, et un diplôme reconnu. » D’autant que tous les syndicats le rappellent : l’apprentissage salarié limite aussi le risque de chômage en régulant à l’entrée l’engagement de nouveaux apprentis en fonction des besoins des officines. « C’est pourquoi il n’est pas simple de trouver la structure de diplôme qui ne déstabilise pas l’apprentissage. Aucune piste ne doit être écartée à partir du moment où le préparateur pourra apporter une valeur ajoutée. Il faut aussi réfléchir sur l’actuel contrôle effectif du pharmacien, l’officine doit fonctionner en tenant compte des évolutions du métier, des nouvelles missions », explique Philippe Denry.
Rapprochement.
Le diplôme imaginé par la CPNEFP repose sur le référentiel d’activités mis sur pied en 2009 avec la 20e Commission paritaire consultative (CPC), spécialement chargée de la création ou de la rénovation des diplômes d’enseignement technique du secteur sanitaire et social. Référentiel d’activités qui sert aujourd’hui au travail commun mené avec les préparateurs hospitaliers. En mars 2011, la FSPF avait lancé une enquête sur la formation des préparateurs auprès des titulaires. Il en ressortait un fort attachement à l’apprentissage. Les pharmaciens ne se montraient pas contre le fait de payer une 3e année leurs apprentis si au final les préparateurs suivent une formation adaptée à la réalité de l’officine.
Début 2013, les interlocuteurs des pouvoirs publics ont indiqué à la CPNEFP qu’ils devaient se rapprocher des représentants des préparateurs hospitaliers pour bâtir un référentiel de diplôme commun. « Une bonne chose » selon Olivier Clarhaut, ce rapprochement permettant d’éviter « de diviser pour mieux régner ».
« Ce rapprochement entre hospitaliers et officinaux consiste en une approche comparative des activités sur ces deux lieux d’exercice ; approche accompagnée d’échanges sur les besoins en compétences liés. Il ne s’agit donc pas pour l’instant d’un travail sur un référentiel d’activités commun mais bien d’une réflexion commune autour de la nécessaire évolution des diplômes d’exercice à l’instar des autres professionnels de santé », nuance Marie-Hélène Grongnet, présidente de l’Association nationale des préparateurs en pharmacie hospitalière. « L’ANPPH attend de ces réunions communes une meilleure connaissance des deux profils de préparateurs qui, le moment opportun, facilitera la définition et la mise en place de passerelles pour habiliter l’exercice en cas de passage d’hôpital à officine ou inversement », poursuit-elle.
Rumeurs.
Un groupe de travail se réunit donc régulièrement et son travail a bien avancé. « Les préparateurs hospitaliers ont déjà un diplôme qui s’obtient en trois ans, il n’est donc absolument pas possible de leur proposer un nouveau diplôme en deux ans. Mais les dernières rumeurs nous inquiètent », ajoute Daniel Burlet. En effet, plusieurs représentants de syndicats ont été informés par personnes interposées que le ministère de la Santé ne souhaite pas entendre parler d’autre chose que d’un BTS. « Nous n’avons pas eu cette information directement du ministère concerné, nous continuons donc à travailler avec les préparateurs hospitaliers et un document commun devrait être prêt à brève échéance », précise Daniel Burlet.
De son côté, Philippe Denry ne veut fermer aucune porte d’emblée, même si le BTS ne lui paraît pas correspondre au besoin de formation des préparateurs. « On nous parle d’un BTS en rappelant que c’est bien le niveau d’étude des opticiens ou des esthéticiennes. Mais il faut bien comprendre que, pour ces métiers, le contrat d’alternance n’est pas une absolue nécessité dans le sens où, s’ils ne trouvent pas d’emploi après leur diplôme, ils ont la possibilité de s’installer. Ce n’est pas le cas des préparateurs pour lesquels le seul débouché est le salariat. » Pour Olivier Clarhaut, cette fermeture du ministère de la Santé, si elle est confirmée, est de bien mauvais augure : « Cela nous interpelle d’autant plus que lors de notre dernière rencontre avec des représentants du ministère de la Santé en début d’année, ce n’est pas ce que nous avons entendu. La branche reste attachée au diplôme en trois ans, alors si toutes les portes se ferment, il va y avoir un problème. »
Questions salariales.
La réforme du diplôme est compliquée parce qu’elle implique trois ministères différents : la Santé, l’Éducation nationale et l’Enseignement supérieur. Ainsi que les employeurs – les pharmaciens titulaires – les préparateurs en officine et à l’hôpital. Les prochaines réunions sont programmées pour le mois de décembre, que ce soit pour le groupe de travail réunissant préparateurs hospitaliers et en pharmacie, ou pour la CPNEFP. « À l’heure actuelle, nous avons listé les activités des différents professionnels (officine et pharmacie à usage intérieur) et ressorti les similitudes. Ce document sera validé d’ici la fin de l’année pour être transmis aux ministères concernés afin de travailler ensuite sur les référentiels d’activités, de compétences et de formation », précise Marie-Hélène Grongnet.
« On ne désespère pas de faire aboutir nos idées, les pharmaciens ont besoin de préparateurs bien formés, insiste Daniel Burlet. Nous avons volontairement mis de côté les questions salariales de façon à ne pas créer de point de blocage concernant le diplôme et la formation des préparateurs. » Ce que confirme Olivier Clarhaut : « Les négociations salariales viendront en leur temps, ce n’est pas la motivation première. » En attendant, il est difficile de prédire quand la réforme du diplôme – pourtant urgente – aura véritablement lieu. « On l’espère avant cinq ans. La dernière mise à jour date de 1997, rappelle Philippe Denry, la pharmacie a beaucoup évolué depuis, des choses doivent être allégées dans le diplôme, d’autres doivent au contraire être renforcées. On peut imaginer deux années communes à tous les préparateurs et une année de spécialisation pour l’officine, d’une part, et l’hôpital, d’autre part. »
Un diplôme inadapté.
Car les syndicats d’employeurs sont tous d’accord pour dire que l’absence de réforme n’est pas envisageable, le référentiel de diplôme étant devenu inadapté aux besoins en pharmacie. Désormais obsolète, il ne permet pas d’avoir des préparateurs immédiatement opérationnels après l’obtention de leur diplôme, note Éric Myon, président Île-de-France de l’Union nationale des pharmaciens de France (UNPF). FO Pharmacie ne dit pas autre chose : « Le BP est obsolète dans sa forme et dans son contenu. Va-t-on être obligé de réduire nos prétentions pour que cette réforme ait lieu ? Le débat en est là. » De son côté, l’ANPPH n’est pas prête à baisser les bras : « Les paramédicaux et médicotechniques présents dans les établissements de santé ont un niveau de diplôme en grade licence qui conditionne leur évolution professionnelle, c’est pourquoi l’ANPPH revendique ce grade licence pour bénéficier du même profil de carrière. Une profession qui n’évolue pas avec les autres est une profession qui recule en termes de crédibilité et reconnaissance professionnelle. »
Au final, cela peut paraître un point de détail, mais il faudra certainement modifier l’appellation du métier, le terme de préparateur ne faisant plus suffisamment référence aux activités menées. « Quand nous n’aurons plus qu’à trouver le nom du métier, on sera tiré d’affaire, affirme Olivier Clarhaut. Pour le moment, il faut prendre des décisions et aller vite, car le BP s’étiole, les effectifs aussi. » C’est pourquoi le travail continue pour pouvoir reprendre langue avec le ministère de la Santé, en présentant un dossier solide d’une seule voix.
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