Le Quotidien du pharmacien. — Vous venez de publier, comme chaque année, une première tendance de l’activité de l’année passée. Sur quelle base de clients cette étude a-t-elle été réalisée ?
Philippe Becker.- Cette étude initiale est issue de l’analyse de 381 comptes de résultats de pharmacies sélectionnées sur l’ensemble de notre clientèle. Cela représente 2 % des officines françaises pour un chiffre d'affaires global d’environ 600 millions d’euros. La population est répartie sur l’ensemble de la métropole. Il s’agit, il faut aussi le souligner, de pharmacies qui ont clôturé leurs comptes sur les trois premiers trimestres 2018. Ces premiers chiffres devront donc être interprétés avec recul car le quatrième trimestre est manquant.
Même si la variation de l’activité est positive, on ne peut pas parler d’un redécollage. Vous attendiez-vous à une si faible croissance ?
Christian Nouvel.- Surpris ? Pas vraiment car les relais de croissance qui existaient il y a dix ou quinze ans ont disparu. Tout va dans le sens de la déflation ! Les prix des molécules remboursables baissent et, il faut le dire aussi, il n’y a pas ou peu de grandes innovations ces dernières années. Admettons aussi dans un sens positif que les campagnes de prévention commencent à porter leurs fruits. On s’en félicitera mais, par effet de ricochet, des citoyens mieux portants sont des patients qui dépensent moins. Un point positif à noter : une meilleure tenue de l'activité sur le 2e et le 3e trimestres.
Comment expliquez-vous que la variation moyenne de l'activité cache des disparités ?
Philippe Becker.- Comme chaque année, cette moyenne globale ne dit pas grand-chose sur la situation des officines. Grosso modo, la moitié des officines voit leur chiffre d’affaires régresser de 3,44 %, l’autre moitié progresse de 3,96 %, d’où un chiffre moyen qui n’exprime pas grand-chose. Il faut vraiment aller dans le détail pour comprendre ce qui se passe réellement. Nous avons regardé aussi l’évolution des petites pharmacies (CA inférieur à 1 M d'euros) et celles qui sont considérées comme les plus importantes (CA supérieur à 2 M d'euros). Le constat est toujours identique : là ou les petits chiffres d’affaires perdent encore -1,53 %, les officines de taille supérieure continuent de progresser de +1,58 %, soit un écart qui devient structurel de plus de 3 %. Tout cela est purement factuel mais néanmoins inquiétant si on met cette tendance en perspective à 3-5 ans !
Comment évoluent la marge commerciale et la marge brute en 2018 par rapport à 2017 ?
Christian Nouvel.- Ces chiffres sont attendus car l’application de la nouvelle convention a été un sujet de polémiques en 2018. Tout d’abord, il est utile de rappeler que les pharmacies étudiées ont été impactées de manière variable par l’application de la nouvelle convention : certaines sur 3 mois, d’autres sur 9 mois. Sur l’ensemble de l’année, la baisse est de -0,62 % pour ce qui est de la marge commerciale et de -0,35 % pour la marge brute. Sur la marge brute, la perte moyenne en valeur absolue sur notre population est de 4 000 euros par pharmacie.
On observe que la variation négative N/N-1 de la marge brute s’accentue à compter du 2e et du 3e trimestres. N’est-ce pas inquiétant ?
Philippe Becker.- Il est encore trop tôt pour porter un jugement définitif car bon nombre d’officines clôturent leurs comptes à l’année civile et elles sont absentes de ce panel. Mais bien sûr, cette tendance nous a interpellés également.
Concernant les prestations de services, on a l’impression que l’on fait du « sur-place ». Quelle est votre analyse ?
Philippe Becker.- La prestation de services au sens large (honoraires, ROSP et nouvelles missions) avait mécaniquement augmenté sur les 4 années précédentes du fait des changements de mode de rémunération sur les médicaments remboursables. Aujourd’hui, nous sommes en allure de croisière, on peut faire le pari d’une progression douce liée aux effets de la nouvelle convention. Il faut avoir à l’esprit que les primes sur objectifs pour les génériques augmentent faiblement, voire diminuent, et que les nouvelles missions représentent peu aujourd’hui en valeur absolue.
On vous sent pessimiste sur ce dernier point…
Christian Nouvel.- Nous faisons juste des constats mais, par exemple, la vaccination contre la grippe semble être un réel succès là où elle est expérimentée. Mais attention, c’est une prestation qui est associée à une vente, donc plus facile à mettre en œuvre. Changer de modèle économique est un long chemin et passer d’une activité de dispensation à une activité de services prendra du temps car il faut aussi, ne l’oublions pas, l’adhésion voire l’enthousiasme des patients…
Même si ce chiffre n’apparaît pas dans votre étude, pour ce qui est de la rentabilité brute, sur quoi tablez-vous sur 2018 ?
Philippe Becker.- Il est plus que probable que l’excédent brut se dégrade d’un petit demi-point en 2018. Tout cela sera à confirmer avec notre étude plus globale qui sera publiée milieu 2019.
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