Les répondeurs tournent en boucle : « Pour des motifs indépendants de notre volonté, nous sommes contraints de fermer les dimanches de 8 heures à 20 heures ». Ces pharmacies qui, traditionnellement, ouvraient le dimanche, ont été contraintes par décision judiciaire de baisser le rideau. Il ne leur reste plus qu’à en avertir leurs patients, très souvent désappointés. Car ces pharmacies du dimanche avaient leurs fidèles. En témoigne l’affluence de ce jour-là. Et aujourd’hui, les lettres de regrets et de soutien.
Du Nord à la Normandie en passant par la Seine-et-Marne, à chaque fois le même scénario. Arguant du confort de ses patients, un titulaire décide d’ouvrir ses portes le dimanche. Le Code de la santé publique l’y autorise. Pourvu que, comme le stipule l’article L.5125-22, « le pharmacien qui ouvre son officine pendant un service de garde ou d’urgence alors qu’il n’est pas lui-même de service, la tienne ouverte durant tout le service considéré ».
Distorsion de concurrence
Or, souvent bien situées, ces pharmacies agissent comme un aimant auprès de la population, pour peu qu’elles disposent d’un large choix de parapharmacie, incitant les patients à un shopping du dimanche. Leur ouverture dominicale pénalise par conséquent les pharmaciens de garde, qui ne tardent pas à protester. Il n’est en effet pas rare que leurs astreintes se soldent par un nombre réduit de clients. S’en suivent alors des recours contre les autorisations d’ouverture. Deux pharmacies de Seine-et-Marne, réputées pour être ouvertes 7/7, 24/24, ont ainsi été contraintes, le 4 juillet dernier, de fermer définitivement le dimanche entre 8 et 20 heures.
Saisi par le syndicat des pharmaciens du département, le tribunal administratif de Melun a prononcé l’annulation de l’arrêté préfectoral du 31 mars 2014 qui autorisait leur ouverture tous les jours 24/24. « J’ai utilisé deux leviers, celui de l’interdiction du travail le dimanche, un accord validé par les syndicats nationaux, et le fait que ces ouvertures pesaient sur l’organisation des gardes. En ouvrant le dimanche, ces pharmacies exerçaient en effet une distorsion concurrentielle. De plus, il faut se conformer à la loi en ce qui concerne les gardes, il s’agit d’un système tournant et aucun pharmacien ne peut s’attribuer lui-même une garde. Il n’y avait, à la différence de Paris, aucun besoin spécifique d’ouvertures supplémentaires le dimanche dans le département », explique Stéphane Bour, président du syndicat des pharmaciens de Seine-et-Marne, à l’origine du recours.
De fait, comme le confirme l’ARS d’Ile-de-France, la possibilité pour un pharmacien d’ouvrir son officine même s’il n’est pas de service peut disparaître si un arrêté de fermeture le dimanche est pris par le préfet et sur demande du syndicat représentatif du département, au titre de l’article L.5125-22 du Code du travail. « Dans ce cas, aucune pharmacie non inscrite sur la liste de garde ne peut être ouverte le dimanche », précise la porte-parole de l’ARS d’Ile-de-France. C’est ainsi que la « Pharmacie de la gare », à Roissy, et la « pharmacie Khun », à Torcy, gardent désormais leurs portes fermées jusqu’à 20 heures, le dimanche.
Renvoi du commissariat
La presse locale s’émeut des files d’attente qui s’allongent dès cette heure-là devant ces deux officines, réputées pour leurs prix bas dans la région et bien au-delà. Une situation qui préoccupe Guillaume Le Lay-Felzine, maire de Torcy : « L’ouverture le dimanche répond à un réel besoin de la population. Elle correspond à une spécificité locale, à savoir la proximité de l’hôpital de Marne-la-Vallée et l’accès rapide à la pharmacie grâce à la rocade. Les personnes sortant des urgences se rendent directement à la pharmacie pour prendre leurs médicaments. Elles n’ont pas à chercher la pharmacie de garde. »
Toujours selon la presse locale, il arrive même que les commissariats de police renvoient directement les patients vers la pharmacie de Torcy. « Il est vrai que son ouverture le dimanche n’est pas seulement un service de proximité pour les Torcéens. Le pouvoir d’attractivité de cette pharmacie dépasse les limites de notre commune », expose le maire.
Et pour confirmer ses dires, les témoignages écrits de patients affluent à la mairie. Certains décrivent leur odyssée, dans le plus grand département de France, pour trouver la pharmacie de garde. D’autres, sortant des urgences, déplorent « les manquants » dans les pharmacies de garde, incriminent le manque de transports, « surtout le week-end », et exigent du préfet la réouverture de leur pharmacie accessible à toute heure. La mairie se donne une période d’observation de quatre mois avant d’envisager de possibles recours contre la décision du tribunal administratif.
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