L’hémorragie continue. Après 188 fermetures d’officine en 2016, et 193 en 2017, le réseau officinal accuse à nouveau des pertes sèches. 226 officines ont disparu du paysage au cours de l’année 2018. Du jamais vu depuis 10 ans. Cette dernière décennie, 1 556 pharmacies ont fermé leurs portes. Résultat, en France le nombre d’officines est passé sous le seuil des 21 000, à très exactement 20 966. Signe de la fragilité des petites structures maintes fois soulignée par les cabinets d’experts-comptables, sept fermetures sur dix ont frappé des officines totalisant moins d’un million d’euros de chiffre d’affaires.
Aujourd’hui, ce solde négatif se traduit mécaniquement dans les effectifs de la section A qui a subi un recul de 1,3 % du nombre de titulaires au cours de la seule année 2018. En dix ans, la profession a perdu 1 926 titulaires (soit - 6,9 %) et n'en dénombre plus que 26 212. Pour autant, ces chiffres sont loin d’alarmer les élus ordinaux à la présentation du « Panorama de la démographie des pharmaciens au 1er janvier 2019 ». Ils seraient même de nature à les rassurer. Car comme le remarque Carine Wolf-Thal, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP), « avec 32,4 pharmacies pour 100 000 habitants, ou 3 087 habitants par officine, le maillage reste équilibré et harmonieux. »
Attention aux zones sous-dotées
Selon les statistiques de l’Ordre rendues publiques le 22 mai, un tiers des officines françaises sont installées dans des communes de moins de 5 000 habitants. Un autre tiers est situé dans des villes moyennes. L’Ordre national des pharmaciens, qui se félicite de cette répartition homogène, n’en détecte pas moins une menace : « le maillage pourrait se trouver fragilisé si les officines situées dans les zones sous dotées, comme le Centre Auvergne, venaient à fermer. »
Raison de plus pour miser sur les évolutions réglementaires intervenues au cours des dernières années tant sur le statut juridique des officines (SEL, SPF-PL…) que sur le maillage officinal avec l’ordonnance réseau. Leurs effets se font déjà ressentir puisque la restructuration du réseau est menée volontairement par ses acteurs dans 53 % des cas. L'Ordre relève cependant une évolution dans les modes de fermetures d’officine entre 2017 et 2018. Désormais, les regroupements bien que constituant toujours près d’un quart des modes de fermetures, n’ont plus le vent en poupe. Leur nombre régresse de 8 %, celui des cessions de clientèle de 4 %, tandis que le nombre des restitutions de licence gagne 4 points.
Structuration
Autre critère de bonne santé du réseau, le nombre de transferts demeure stable depuis dix ans et concerne d’année en année environ 1,2 % des officines. Il faut dire que très encadrée, la procédure de transfert est destinée à préserver l’accès aux médicaments sur le territoire. Ce que confirme l’Ordre : « Ces transferts effectués dans le cadre de l’amélioration des conditions d’exercice garantissent une desserte médicamenteuse optimale. » Selon Alain Delgutte, il ne s’agit que d’un début puisque l’ordonnance réseau entrée en vigueur en juillet 2018 « donnera des outils supplémentaires aux pharmaciens souhaitant déplacer leur officine pour mieux servir la population ».
L’ensemble de ces statistiques traduirait-il une rationalisation du réseau, voire sa consolidation ? De fait, les effectifs de l’officine font preuve d'une certaine stabilité. Elle continue de concentrer les trois quarts des quelque 26 212 pharmaciens inscrits à l’Ordre, grâce notamment au renfort des adjoints dont le nombre a augmenté de 5,4 % en dix ans.
Deuxième signe de vitalité, l'année dernière le marché des cessions, qui n’a jamais été aussi dynamique depuis six ans, a comptabilisé 1 209 mutations. Lissé sur les six dernières années, le nombre des cessions reste néanmoins stable et concerne environ 6 % du marché. Dans plus de la moitié des cas (54 %), la cession impliquait en 2018 un repreneur de moins de 36 ans. « Les plus jeunes d’entre nous croient plus que jamais en l’avenir de notre métier. C’est un signal évidemment encourageant », analyse Alain Delgutte, président de la section A.
Pour enthousiastes qu'ils sont, les titulaires, et particulièrement les plus jeunes d’entre eux, n'en sont pas moins résolus dans le choix de leurs conditions d’exercice. En témoigne, le mode d’exercice en associations qui ne cesse de gagner du terrain alors que l’exploitation en nom propre ne concerne plus aujourd’hui que 21 % des officines. Parmi les pharmacies exploitées en associations, les sociétés d’exercice libéral ont triplé leur nombre en huit ans, avec 11 165 SEL. Aujourd'hui, pour la première fois, la part des SEL représente plus de la moitié des officines. Selon l’Ordre, elle devrait poursuivre sa progression à raison de 7 à 10 % par an. Environ 10 % des pharmacies sont constituées en SARL. Parallèlement, la création de SPF-PL (Société de participations financières de professions libérales) a augmenté de 29 % entre 2017 et 2018 à 2 381, même si ce rythme est moins soutenu qu’il ne l’a été (+ 49 % en 2017). À défaut de produire des données conjoncturelles, ces évolutions structurelles révèlent une maturation du réseau officinal. Elles ont pour autre avantage d’offrir à la génération montante, sinon la garantie d’une stabilité, tout au moins une certaine visibilité sur son futur exercice professionnel.
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