C’est une double attaque en bonne et due forme à laquelle l’assurance-vie doit faire face depuis quelques mois. Il faut dire que quand Bercy racle les fonds de tiroir et dans ce contexte, le beau gâteau de l’assurance-vie est très tentant. Le gouvernement a donc profité de l’été pour commencer à sérieusement écorner les avantages liés à la souscription des contrats d’assurance-vie. Et ce, sur le volet fiscal mais aussi, beaucoup plus discrètement, sur les droits de succession.
• Fiscalité : un grignotage possible
C’en est sans doute fini : les fonds en euros des contrats multisupports ne devraient plus échapper aux annuels prélèvements sociaux. Alors que ces contrats n’étaient jusqu’alors taxés qu’au moment du rachat ou du dénouement du contrat au décès de son titulaire, leur compartiment en euros devrait désormais être chaque année amputé de 12,1 % de prélèvements sociaux.
Pour le coup, il ne s’agit pas uniquement de payer plus tôt ce qui aurait de toutes les manières été dû un jour : en effet, les cotisations prélevées représentent autant d’argent qui ne sera pas générateur d’intérêts les années suivantes, et ampute donc le rendement net !
En revanche, la partie en actions des multisupports devrait, elle, continuer à ne pas supporter de prélèvements, sauf en cas de retrait, puisque par définition leurs rendements ne sont pas garantis. Inutile de dire que si cette décision est confirmée, c’est une véritable usine à gaz qui devra être mise en place : quid en effet si les pertes de la partie multisupports s’avèrent supérieures aux gains de la partie en euros... Bercy rembourse les cotisations indues ? De plus, le taux de prélèvement libératoire devrait augmenter d’un point à partir du 1er janvier 2011.
En parallèle, il semblerait que Bercy ait également idée de taxer les plus-values réalisées par les assureurs sur les réserves de capitalisation, petite cagnotte qui sert à ces derniers à lisser les fluctuations des taux d’intérêt. Un taux de 10 % en 2011 est évoqué.
• Droits de succession : un grignotage confirmé
Mais c’est sans aucun doute le chamboulement concernant les droits de successions qui en étonnera plus d’un... sous réserve de parvenir à en comprendre les tenants et aboutissants, à défaut d’en saisir la logique ! Pour résumer, il faut retenir que :
z cette mesure concerne uniquement les couples mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, soit un grand nombre de ménages puisque c’est le contrat par défaut des couples mariés qui ne sont pas passés devant un notaire ;
z selon cette mesure, les héritiers autres que le conjoint survivant seront soumis aux droits de succession sur la valeur de rachat des contrats d’assurance vie non dénoués, financés par des fonds communs (Réponse Bacquet, JO Assemblée nationale, 29 juin 2010, page 7283).
Pour en arriver à cette « conclusion », l’administration fiscale a pris prétexte de la jurisprudence. Et plus précisément de la jurisprudence Praslicka : lors du divorce des époux, le contrat d’assurance-vie étant alimenté avec des fonds communs, Mme Praslicka demande que la moitié de la valeur du contrat soit intégrée dans l’actif de communauté afin qu’elle puisse percevoir une somme égale à la moitié de la valeur du contrat ; les juges accèdent à sa requête, ce qui paraît relativement logique. De là à considérer que les conditions sont identiques lorsque le bénéficiaire du contrat décède (contrat alimenté par des deniers communs + dissolution de la communauté + contrat non dénoué puisque c’est le conjoint bénéficiaire qui décède, et non le conjoint assuré sur le contrat), il n’y avait qu’un pas que l’administration vient de franchir allègrement.
Bercy avait été plus prudent dans un premier temps, laissant aux héritiers du conjoint décédé, le choix de déterminer eux-mêmes la nature juridique du contrat d’assurance-vie : soit un bien commun (et la moitié de la valeur du contrat intègre la succession du conjoint décédé), soit un bien propre du souscripteur (et le contrat reste hors succession et attaché à la personne du seul souscripteur). Inutile de dire que la seconde option était retenue par la quasi-totalité des héritiers, ce qui permettait d’échapper aux droits de succession.
Mais depuis, la position de la Chancellerie en 2009 (réponse Proriol) est passée par là : elle précise qu’un contrat d’assurance-vie financé par de l’argent commun devait, en cas de décès du bénéficiaire, être inclus dans la liquidation successorale
civile. Temps de crise oblige, l’administration fiscale, prétextant le nécessaire alignement sur la réponse Proriol, a donc décidé de revenir sur sa tolérance,
arguant que, avec la loi Tepa, les époux ne sont de toutes les manières plus taxés aux droits de mutation. Conséquence : la valeur de rachat des contrats d’assurance-vie souscrits avec des fonds communs fait désormais partie de l’actif de communauté, les sommes en jeu étant comprises pour moitié dans la succession imposable.
Revoir ses simulations !
Pour bien comprendre, prenons un exemple. Le Dr Durand et sa femme n’ont pas souscrit de contrat de mariage et sont donc, « par défaut », mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts. Pour se protéger mutuellement, les époux ont ouvert chacun à leur nom un contrat d’assurance-vie en désignant chacun leur conjoint comme bénéficiaire. Ces deux contrats ont été alimentés par les deniers communs du couple.
Le décès du Dr Durand a désormais des conséquences sur les deux contrats :
comme précédemment, la valeur du contrat au nom du Dr Durand est versée à Mme Durand, bénéficiaire du contrat (rien ne change donc pour ce contrat)?;
et (et c’est là le grand changement !), le contrat au nom de Mme Durand, dont le Dr Durand était bénéficiaire, est désormais inclus dans la succession du Dr Durand pour la moitié de sa valeur, puisque la moitié des fonds ayant servis à alimenter ce contrat proviennent de la communauté.
Les grands gagnants : les notaires (dont les honoraires sont assis sur la masse des biens transmis) et l’Etat qui perçoit des droits. Certains diront aussi que les enfants du conjoint pré-décédé percevront désormais plus tôt une part de l’héritage, alors qu’ils ne la percevaient jusque-là qu’au décès du 2e parent... sous réserve que les capitaux n’aient pas été, dans l’intervalle, dépensés par le conjoint survivant. Mais ce serait oublier que les enfants du Dr Durand pouvaient espérer recevoir, au décès de leur mère, les capitaux du contrat de cette dernière avec, pour chaque bénéficiaire, un abattement de 152 500 euros !
Autrement dit, cette réponse va pénaliser les enfants du défunt qui auront un supplément de droits de succession à payer au fisc. Également du côté des perdants : le conjoint survivant, dont le patrimoine se trouvera largement réduit. Autrement dit, si vous comptiez sur les assurances-vie pour protéger votre conjoint, il est temps de revoir vos simulations !
Sachant que faute de précisions, on suppose que cette nouvelle doctrine s’applique aux successions ouvertes depuis le 29 juin 2010, date de publication de la réponse Bacquet au «?Journal officiel?».
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