LE CADRE législatif et réglementaire de la vente en ligne de médicaments semblait bien fixé grâce à l’ordonnance du 19 décembre 2012 suivie de la loi promulguée le 2 janvier 2013, les précisions apportées par le Conseil d’État en février et juillet 2013, la ratification de l’ordonnance du 19 décembre par l’Assemblée nationale le 15 janvier dernier, puis par le Sénat le 13 février… C’était sans compter la remise du rapport sur les professions réglementées par le député Richard Ferrand à Emmanuel Macron, ministre de l’Économie, début novembre. Le député souhaite, en effet, assouplir les modalités de cette activité, d’abord en supprimant l’adossement obligatoire à une pharmacie, et en autorisant, jusqu’à la délivrance, la détention du médicament par une pharmacie ou un établissement pharmaceutique. De plus, il imagine modifier l’autorisation de compétence exclusive du pharmacien en une autorisation de compétence exclusive de la pharmacie, compétence ouverte également à des personnes morales autorisées à exploiter des établissements de distribution en gros, comme les groupements de pharmacie dotés d’une centrale d’achat pharmaceutique.
Ces suggestions de modifications ont fait bondir les syndicats de pharmaciens, pour lesquels il est inenvisageable de supprimer l’adossement du site à une officine de brique et de mortier, comme il n’est pas possible de permettre ce e-commerce sans engager la responsabilité d’un pharmacien d’officine.
Le rapport Ferrand doit servir à l’élaboration de la future loi pour l’activité et l’égalité des chances économiques d’Emmanuel Macron, mais aussi de la loi de santé de Marisol Touraine. Mais la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) pense qu’il s’agit de maladresses dans la rédaction des propositions du rapport plutôt qu’une volonté d’ouvrir la vente en ligne à des non-officinaux. Les grossistes-répartiteurs ont d’ailleurs tenu à rassurer leurs partenaires pharmaciens en affirmant qu’ils seront à leurs côtés pour toute aide logistique, mais qu’ils ne prévoient aucunement de se lancer dans le commerce électronique.
Accueil réservé.
Concomitamment à la publication du rapport Ferrand, Doctissimo, célèbre site filiale du groupe Lagardère, a annoncé que sa plateforme Doctipharma, lancée en mars, était désormais en mesure de vendre des médicaments. Ouverte aux seuls pharmaciens d’officine, elle leur propose de créer leur site propre sur lequel ils peuvent vendre de la parapharmacie, et éventuellement des médicaments après autorisation de leur agence régionale de santé (ARS). Or l’un des pharmaciens présents sur Doctipharma a obtenu, début novembre, l’autorisation de l’ARS PACA et d’autres membres de Doctipharma sont dans l’attente du fameux sésame.
L’initiative divise au sein de la profession. Si les uns y voient une opportunité de lancer un site marchand en bénéficiant de la notoriété de Doctissimo et de son savoir-faire, d’autres s’inquiètent d’un projet monté entièrement par des non-pharmaciens. Ce qui n’a pas échappé à Michel-Edouard Leclerc, qui a rapidement déclaré sa volonté de créer une plateforme sur le même principe que Doctipharma. L’homme est plus que jamais décidé à vendre des médicaments, que ce soit sur la Toile ou dans ses hypermarchés. Cette affirmation fait craindre le pire à la profession qui se demande si Internet n’est pas le cheval de Troie qui va causer la perte du monopole officinal…
Le développement des sites officinaux reste modeste, avec 203 sites autorisés, répertoriés sur le site de l’Ordre national des pharmaciens début décembre. Et l’Ordre veille au grain, non seulement en faisant la chasse aux sites contrefaits, mais aussi en rappelant la réglementation. En juin, l’instance a assigné 1001pharmacies.com en justice en contestant son tout nouveau service de livraison de médicaments sur ordonnance à domicile. Le prestataire proposait aux patients d’envoyer un coursier chercher l’ordonnance à domicile, qui se rend à la pharmacie pour récupérer les médicaments, et leur rapporte. Un service que l’Ordre a requalifié de vente illégale de médicaments sur Internet. Le tribunal de grande instance a confirmé l’illégalité de la pratique et condamné la société éditrice du site, eNova Santé, à suspendre cette activité sous peine de payer une astreinte de 1 000 euros par jour.
Quant à l’accueil des consommateurs, il reste réservé. Les études réalisées dévoilent des chiffres fluctuants. En septembre 2013, une étude IFOP/PHR indique que 30 % des Français sont prêts à acheter des médicaments en ligne mais seulement 4 % ont tenté l’expérience. En avril 2014, le même IFOP publie une étude pour Pharmarket qui démontre que 13 % des Français ont déjà acheté un médicament sur Internet. Et en mai, les étudiants de l’université Pierre et Marie Curie ont souligné que 16 % des Français sont déjà allés sur le site Internet d’un pharmacien, mais à peine 2 % ont acheté en ligne…
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